Le déménagement

Chapitre 1

- Écoutez les enfants, votre père a été promu à Los Angeles. Nous avons donc pris la décision de déménager, déclare Angélique, ma mère.
- Je sais que la pilule est difficile à avaler, dit mon père (il n'y a que lui pour employer des expressions aussi ringardes mais bon). Tu as d'ailleurs été très directe chérie...glisse-t-il à l'oreille de ma mère sans aucune discrétion.

Je n'y crois absolument pas, je me demande si c'est une grosse farce. Ma première réaction est donc d'éclater de rire tellement cette situation me semble invraisemblable. Nous avons déjà tout quitté il y a 3 ans afin de s'installer en France alors que je viens d'Italie à la base. Ça été terriblement dur, j'y ai laissé ma meilleure amie, ma maison, mon pays.

- Pourquoi tu rigoles Camélia ? me demande ma mère.
- Où sont les caméras maman ? je demande innocemment.
- Heu, ce n'est pas une blague chérie, réplique-t-elle.

Je n'arrive pas à réaliser. Je suis en train de revivre exactement la même scène qu'il y a 3 ans. Sauf que là, les circonstances sont deux fois pire, nous partons aux États-Unis, à l'autre bout du monde. Ça fait quelques mois seulement que je me sens comme chez moi en France et ils veulent déjà partir ! Ce n'est pas possible ils ne peuvent pas me faire subir ça une deuxième fois, mes parents savent très bien à quel point je suis timide avant de connaître les gens, ils ne peuvent pas être cruelles à ce point ? Apparemment si ... Retour à la case départ, encore une fois...
Mon visage se décompose entièrement, je regarde mon petit frère, Léo, la mine défaite mais lui est encore trop jeune pour se rendre compte de l'ampleur de la situation. Il joue avec son doudou et sourit. Il a 3 ans, et est brun aux yeux bleus, extrêmement mignon. Il a la bouille d'ange que je n'ai jamais eu. Mais je dis surement cela parce que c'est mon petit frère. Au contraire je suis blonde aux yeux verts, j'ai 16 ans et je ne pense pas être extrêmement belle ni laide. Je me sens juste banale physiquement. Je n'ai pas vraiment de complexe. Enfin disons que comme tout le monde je n'aime pas certaines choses chez moi mais je ne me focalise pas dessus. Je pense que personne n'est parfait, alors autant ne pas se rendre malheureux et s'accepter, tout simplement.
Bref, revenons à nos moutons.

- Écoute Camélia, je sais que c'est dur pour toi et pour nous aussi d'ailleurs mais c'est une occasion unique qui n'arrivera pas deux fois dans notre vie alors autant saisir cette opportunité, tu ne crois pas ? dit ma mère.
- Non, rétorqué-je.
- Bon, Camélia notre décision est prise, rien ne pourra nous faire changer d'avis, déclare mon père. Alors essaie de te faire à l'idée et de ne pas rester focaliser sur les points négatifs, vois les choses du bon côté. Par exemple, c'est incroyable la Californie, et puis notre maison sera beaucoup plus grande que celle-ci. Nous habiterons juste à côté de la plage et...

Avant qu'il ne puisse finir sa phrase je cours dans ma chambre comme une gamine de 5 ans qui tente d'échapper à la situation plutôt que de l'affronter directement, de prendre le taureau par les cornes comme on dit chez nous. J'avoue que Léo est plus mature que moi sur ce coup-là. Je m'enferme dans ma chambre et écoute la chanson qui me donne du courage habituellement : Beliver de ‪Imagine Dragons‬. Car oui, pour moi chaque chanson à son propre rôle : « Sir Duke » de Stevie Wonder me donne le sourire par exemple. Je suis très vieux-jeu. D'ailleurs je compte mettre ses deux chansons en boucle jusqu'à me sentir mieux. Mais rien n'y fait, pour une des premières fois, je n'arrive pas, ni à relativiser, ni à sourire, ni à être plus courageuse.