Le déménagement

Chapitre 5

Le lendemain je me réveille plutôt de bonne humeur et j'appelle directement Émilie (petit rappel : ma meilleure pote). Je lui raconte tout en détail depuis avant-hier même s'il n'y a pas grand-chose d'intéressant. Je lui dit alors que les voisins sont venus nous voir.
-       Et est-ce qu'ils ont des enfants ? me demande-t-elle.
-       Oui, ils ont quatre enfants si je me souviens bien. Trois filles et un garçon.
-       Hummm intéressant.
-       Bah quoi ?
-       Le dernier mot de ta phrase a retenu toute mon attention Camélia.
-       Rhooo, t'es vraiment une enfant ! Il y en a au moins 3,5 milliards sur Terre Émilie ! T'as les hormones en feu !

On rigole et ça fait vraiment du bien de la retrouver pendant quelques instants. Mais je crois que c'est à ce moment qu'on réalise qu'on ne se reverra pas aussi souvent qu'avant alors on se sourit tristement.

-       Mais t'as son âge ? Son prénom ?
-       Tu perds pas le nord toi ! Je te dis que je n'ai aucune information mis à part qu'il a mon âge je crois.
-       De plus en plus croustillant.

Émilie n'a jamais manqué d'imagination, elle adore se faire des films et j'avoue qu'en général, je suis une bonne spectatrice sauf lorsque c'est de moi qu'il s'agit bizarrement.

-       Mais arrête, si ça se trouve il est moche, débile et méchant.

Je regrette immédiatement mes mots qui sont sortis trop vite de ma bouche... Je n'aime pas la méchanceté gratuite.

-       Bah je sais pas tu m'as dit que les parents étaient adorables.
-       Ça ne veut strictement rien dire, peut-être qu'il est en pleine crise d'adolescence.
-       Tu me raconteras ?
-       De quoi ?
-       L'apéro.
-       Meuh oui, si ça te fais plaisir...
-       Sois ouverte au moins, faudra que tu te fasses des potes à un moment ou à un autre donc... sois exactement comme tu es quand tu es avec moi ! Gentille, drôle, pétillante, et il ne pourra pas te détester !
-       Que de compliments dis donc !

Je lui demande alors comment ça se passe de son côté, elle me dit qu'elle est en vacances avec ses parents à Malte et que ça se passe plutôt bien. Elle ne s'entend pas très bien avec sa famille alors je me doute qu'on a pas la même notion de « plutôt bien ». Pour elle, ça veut dire une dispute tous les deux jours. Mais à l'entendre, elle a la forme. Même si je sais qu'au fond le fait que je déménage est presque aussi dur pour elle que pour moi.

Je ne suis pas vraiment le genre de filles à montrer mon affection pour une personne en disant « je t'aime » par exemple ou en faisant des câlins et elle non plus. Mais malgré le fait qu'on ne se déclare pas notre flamme tous les jours, on sait très bien toutes les deux qu'on est extrêmement attachées l'une à l'autre. On est également consciente qu'on ne s'enverra pas des messages quotidiennement ou qu'on ne s'appellera pas tous les trois jours mais c'est pas grave car on aura toujours cette connexion qui fait qu'on s'aime autant.

Je raccroche en lui rappelant tout de même qu'elle va beaucoup me manquer, elle dit la même chose et quelque part je me sens soulagée. Je ne vais pas la perdre.

Aujourd'hui c'est rangement des cartons. Un peu ennuyant tout ça alors je décide d'égayer cette journée en proposant de faire des crêpes. Mes parents ne sont pas vraiment enchantés par l'idée, ils préfèreraient que je range. Ils me connaissent bien je repousse pas mal les choses à plus tard...

-       On n'a pas les ingrédients pour les crêpes, dit ma mère.
-       C'est pas un problème, si mes souvenirs sont bons, il y a un petit super marché à deux pas d'ici. Ça fera l'affaire pour quelques œufs, du lait et de la farine !
-       Ah oui, mais elles ne vont pas être très bonnes tes crêpes alors ! Au moins elles ne seront pas si mauvaises que ça pour la santé...
-       Pourquoi tu dis ça ? J'ai oublié des trucs ?
-       Aaalala 16 ans et tu ne sais toujours pas faire des crêpes ! J'ai dû probablement loupé quelque chose dans ton éducation, dit-elle, amusée.

On éclate de rire et elle me dit qu'il faut aussi prendre du beurre et du sucre.

-       Du coup, c'est oui ?
-       Oui mais à plusieurs conditions, me dit-elle d'un ton autoritaire.

Je soupire légèrement, il faut toujours des conditions avec les parents, c'est fou.

-       Dis-moi tout...
-       Tu ne prends pas tout ton temps, tu m'envoie un message quand tu arrives au supermarché, et quand tu repars aussi. Ah et il faut que tu ais rangé toute ta chambre avant la fin de la journée. Et un peu celle de ton frère aussi, tu te doutes bien qu'il ne peut pas le faire tout seul.
-       Wouah tout ça pour des crêpes ! Mais bon, j'accepte tes conditions... lui dis-je.
-       Oh et ne te gave pas trop au fait, on a l'apéro ce soir n'oublie pas ! crie mon père d'une autre pièce.

T'inquiète pas papa je l'oublie pas celui-là, je chuchote tout bas. En temps normal je m'en ficherai complètement de cet apéro mais depuis que j'ai parlé à Émilie, je n'arrête pas d'y penser. Je stresse même un peu car je sais que je vais devoir me sociabiliser un minimum...
Quand je rencontre une personne pour la première fois, je souris beaucoup pour paraître bienveillante, gentille, douce (ce n'est qu'une façade ne vous inquiétez pas ;)) mais je ne sais pas trop quoi dire ce qui peut éventuellement créer des blancs pas très sympathiques. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé le combo sourire + silence en face d'une personne mais je peux vous assurer que ça fait de vous quelqu'un d'étrange, les gens pensent que vous êtes un peu bête à sourire comme ça tout seul et sans raison (ce qui n'est pas totalement faux). Mais mieux vaut sourire et ne rien dire que faire la tête et ne rien dire. Quoi que... je sais pas en fait. Moi en tout cas je préfère paraître bête que méchante. Enfin je crois.
J'admire vraiment les gens qui sont super sociables, je ne sais vraiment pas comment ils font. Pourtant je sais m'amuser, me lâcher, je ne suis pas du tout une personne sérieuse (sauf avec le boulot) juste timide au début. Mon caractère est super étrange, pas vrai ?