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J U I N  2 0 2 0 — L I V E R P O O L
O M N I S C I E N T

— Chapitre un : maman.

Quoi de mieux pour bien démarrer mon écriture que par le sujet principal de mes colères et de mes souffrances ?

Je n'ai jamais vraiment eu de mère aimante. Enfin si, peut-être, mais elle l'a bien cachée en tout cas. Tout a commencé durant l'été 2013. J'avais à cette époque quinze ans.

Pleine crise d'adolescence, c'était compliqué pour moi.

Mes parents m'annoncent, à moi, leur fille unique, qu'ils vont se séparer. Depuis petite je pensais qu'ils s'aimaient très fort.

Et de les voir se séparer ainsi a brisé quelque chose en moi, je ne saurai réellement le décrire.

Puis vint le mois de juillet, mois durant lequel la garde alternée débuta. Je dus quitter mon père le six juillet, et ce pendant un long mois.

C'était désagréable de le voir dans cet état.

Je le percevais toujours comme quelqu'un de fort, qui pouvait me protéger dès que quelque chose n'allait pas.

L'image cliché du papa poule.

Mais en le voyant pleurer dans mes bras, je me suis rendue compte de l'amour fort que nous nous portions.

Le mois de juillet passa, j'avais de la chance, il faisait beau. Puis... Vint le mois d'août, et j'ai craqué.

Un soir, mon père a dû m'interdire de sortir avec mes amies.

Je voulais simplement m'amuser, mais lui n'était pas du même avis. J'ai décidé de faire le mur. L'image de l'adolescente rebelle m'a toujours collée à la peau, il fallait bien que je me serve de ce déguisement un jour.

Alors j'ai fait le mur, je suis descendue par ma fenêtre, je suis allée en boîte de nuit, et j'ai bu, j'ai bu...

Et pas que de l'eau malheureusement. Je suis rentrée totalement ivre morte chez moi, mon père a ouvert la porte, surpris.

Je ne m'étais pas souvenue de ce moment précis, mais mon père me l'a raconté avec ses propres mots.

« Tu as tambouriné à la porte, je t'ai ouvert et tu as commencé à hurler en me disant que tout était de ma faute. Que chaque jour, cela recommençait. Que ta mère et moi nous nous séparions tous les jours. »

Au départ, je n'avais pas compris. Mais par la suite, en me remémorant ces phrases, j'ai appris que, ce que je voulais faire passer comme message, était que je revivais chaque jour le moment de leur séparation.

Cet événement m'avait tellement traumatisée que j'en avais gardé des petites séquelles, que j'ai transformées en paroles totalement inutiles.

Puis je suis rentrée dans une routine, une semaine chez mon père, la suivante chez ma mère. Une banalité.

Finalement, j'ai commencé à me sentir mal chez ma mère. Ça débutait par quelques petits piques, rien de bien méchant à la base.

J'étais juste exaspérée par son comportement d'adolescente alors qu'elle approchait de la cinquantaine. La voir avec un copain chaque semaine ça ne me plaisait pas.

Le matin je me levais je voyais le cendrier posé en vrac sur le sofa, ou encore, le soir, quand nous regardions la télévision, elle avait tellement bu qu'elle se cognait contre le coin du canapé, voulant aller chercher un autre verre.

Parce qu'évidemment, madame picole dès midi. Et fume sa cigarette électronique dès sept heures du matin.

J'étais mal avec elle, c'était une accumulation, les disputes à répétition parce que je sortais trop...

Mais je n'étais qu'une ado qui ne tenait pas en place, c'était normal que je sorte avec mes amies pour manger quelque part, aller à la plage...

En la voyant pleurer et sortir des arguments peu constructifs lors de nos disputes hebdomadaire, je me suis rendue compte que j'étais plus mâture qu'elle, et j'avais peur.

Été 2014, une petite année plus tard seulement, j'ai craqué, une trop violente dispute a éclaté, je lui ai dit tout ce que j'avais sur le cœur.

Le fait que l'on ne puisse pas tenir une conversation plus de deux minutes, que l'on ne s'organise rien, pas une petite après-midi entre filles, rien.

Je vivais pour moi, elle vivait pour elle. Et à ce moment là, elle m'a dit que si je n'étais pas contente, je n'avais qu'à m'en aller. C'est ce que j'ai donc fait.

J'ai pris mes quelques affaires, je suis partie de cet enfer, j'avais appelé mon père pour qu'il me vienne en aide, il est venu.

Je ne l'ai plus revu pendant un mois, je me suis changée les idées avec ma famille, j'étais heureuse.

Mon père avait songé à la garde définitive, mais il s'était rendu compte que, si je venais à m'en aller pour de bon, ma mère n'aurait pas tenu le coup et aurait été capable de mettre fin à ses jours.

Je suis donc retournée chez elle, et j'ai attendu la fin du lycée pour avoir de la liberté. Je ne la voyais presque plus, je me sentais si libre et si mieux. En même temps, j'avais déménagé ici, à Liverpool, sans but précis, pour vivre au jour le jour.

Et j'ai pris conscience que ma mère n'était une source de bonheur, seulement quand elle le souhaitait.

Quand elle m'emmenait voir des matchs de football, ou quand nous faisions quelques festivals, l'été.

Mais ça s'arrêtait là. Cette complicité se stoppait dès le retour à la maison. Comme si une frontière s'était installée.

Mais, cette frontière, sans que je ne le sache, fut construite, et ce, dès ma naissance.

C'était comme si, je vivais avec ma mère mais, que d'un côté, je l'avais perdu.

Ouais, j'avais perdu ma mère.

Mais comment pourrais-je considérer une femme qui ne prend même pas soin de sa propre mère, ni de ses propres enfants ?

Mes meilleurs alliés ne sont sans nul doute ma patience et ma maturité, face à son comportement.

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-trenteseptkm

carnet» TRENT ALEXANDER-ARNOLDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant