Histoires Creepy Et Histoires Courtes

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Cela faisait des jours que le rat suivait l'étrange convoi qui avait croisé sa route. De mémoire de rongeur, c'était bien la première fois qu'on voyait de tels êtres ici bas. Des êtres qui ne soient ni des rats, ni des araignées, ni des chauves-souris, ni même des insectes rampants. Non, ceux-là se promenaient sur deux pattes pour les uns et sur quatre pour le monstrueux animal qui les accompagnait.
Le rat courut le long de la corniche surplombant la rivière souterraine. Les étrangers la suivaient depuis un long moment maintenant, éclairant leur chemin avec des torches aveuglantes pour la faune souterraine, elle qui était habituée à la clarté diffuse des roches nox. Le rat avait décidé de leur tenir compagnie à distance respectable, mais quand ils s'arrêtaient pour dormir, il se faufilait jusqu'à eux et, surtout, jusqu'à leurs bagages. Ils transportaient de la nourriture inconnue ici et qui sentait délicieusement bon. Impossible d'y résister.
Les étrangers continuaient leur route inlassablement à travers les cavernes, s'arrêtant parfois le temps de prendre un peu de repos. La femelle passait du temps à consulter une carte ou des parchemins. Mais cette fois, s'ils stoppèrent leur animal de bât, ce n'était pas pour se reposer. Devant eux se dressait quelque chose que le rat n'avait encore jamais vu. La caverne était brutalement fermée par un mur énorme et sculpté. Sous les couches de séculaires toiles d'araignées, on distinguait d'énormes spirales usées par le temps. Le rat s'assit sur ses pattes arrières, lissant ses moustaches, fixant de ses petits yeux noirs le trou sombre qui s'ouvrait au bas de la construction et qui était flanqué de deux sculptures.

Les étrangers semblèrent s'agiter quelques minutes, puis reprirent leur route. Le rat hésita. Il était déjà très loin de son territoire, mais son instinct lui soufflait que s'engager là-dedans n'était pas une bonne idée. N'étant qu'un animal, il décida de l'écouter et fit demi-tour. Il n'alla pas bien loin. Une langue de lumière bleue turquoise s'était faufilée jusqu'à lui pour l'attraper, ne lui laissant aucune chance. La lueur s'enroula autour du petit corps poilu sans hésitation malgré les couinements du rat et rampa autour de son cou, puis jusqu'à sa gueule où elle entra. Cela ne prit que quelques secondes, mais l'animal cessa de bouger et s'effondra dans la poussière. Puis tout à coup, il eut un soubresaut et se releva pour courir en direction des étrangers, ses yeux devenus turquoises brillant dans l'obscurité.

L'Esprit s'était excusé auprès du rat alors qu'il prenait possession de son corps, mais ce n'était pas comme s'il avait eu le choix. Sa magie s'affaiblissait de plus en plus et il ne pouvait plus apparaître devant les deux Hyliens sous sa forme éthérée. Il aurait fallu qu'il se rappelle à quoi il ressemblait autrefois pour cela. 10 000 ans avaient passé et avec eux, ses souvenirs avaient fini par s'étioler, se déliter et par disparaître pour la plupart.

Il avait senti la présence des êtres humains depuis un long moment, peut-être l'équivalent de plusieurs jours, alors que le jeune homme tentait de faire passer le vieux pont à son animal qui renâclait. Il avait attendu et attendu encore, jusqu'à ce qu'ils parviennent au temple. Maintenant qu'ils étaient sur son territoire, il pouvait les observer de près grâce à son nouveau corps de rongeur et il cavala sur ses pattes pour les rejoindre.
Les deux voyageurs étaient jeunes. Blonds tous les deux, portant des vêtements similaires, ils ne semblaient pas de la même famille. Leur odeur était une mine d'informations et raviva des souvenirs chez lui qu'il croyait enfui : des vertes prairies, le soleil sur sa peau, la pluie aussi. Dans leurs provisions, il sentit la forte odeur d'un durian et de quelques bananes, et il se souvint qu'enfant, il grimpait aux arbres de la luxuriante forêt où il habitait avec son peuple pour s'en nourrir. Son peuple... Il était au bord de l'extinction au moment où il était venu ici. Sans doute que depuis, leurs édifices, leurs temples dédiés à la Force et aux Dragons n'existaient plus à la surface. Sans doute que tout le monde avait oublié les Sonau depuis des siècles.