Je me réveillai le lendemain. La chambre était saccagée, certains meubles détruits, et de nombreux corbeaux morts ainsi que des branches d’arbres brisées se trouvaient dans ma chambre. Je m’asseyais sur le lit, essayant en vain de comprendre ce qui s’était passé la veille, mais je ne parvenais pas à me concentrer, j’étais chamboulé. J’essayai de ranger la pièce, mais lorsque je passai devant mon miroir, resté étonnamment intact, je fus surpris de ne presque pas me reconnaître.
En effet, mon corps semblait être différent, et je remarquai que le petit insigne en argent représentant Arkham, dont je ne me séparais jamais, avait disparu. Je le cherchai, mais en vain. Je m’allongeai sur le lit, pensif, mais mon court repos fut stoppé lorsque ma main heurta quelque chose de rigide et englué. Je me levai précipitamment et faillis défaillir ; il s’agissait du couteau que j’avais caché. Comment était-il arrivé ici ? Des brides de souvenirs commençaient à resurgir. Je me rappelai ces horribles yeux qui me regardaient dans la pénombre, prêts à me dévorer. Pourtant j’étais encore en vie. Pourquoi cette monstruosité m’avait-elle épargné ? N’était-ce qu’un jeu pour elle ? Allait-elle revenir, pour cette fois-ci m’achever ? Je sentis une crise de panique arriver. Je décidai de fuir ce couteau du diable et cette effroyable maison qui représentait à mes yeux ma future tombe.Je marchai depuis des heures. La ville était saccagée, privée d’électricité. Sur ma route, je trouvais un homme qui vendait des journaux. Je lui achetai celui du jour, et m’installai sur un banc. Je lisais depuis peu, lorsque je fus pris d’une forte émotion. Il était écrit : « Une violente tempête a touché la ville de Nantucket le 28 janvier au soir, causant de nombreux dégâts. De nombreuses personnes sont portées disparues, notamment une jeune fille de huit ans, Aria Mays. À la suite des nombreuses disparitions survenues depuis un mois, le nombre de disparus s’élève aujourd’hui à quarante-deux. » Quand je vis son nom, je ne pus m’empêcher de pleurer. Elle qui était si jeune … Toutes ces informations étaient de trop pour moi, je n’en pouvais plus, j’avais envie d’exploser, de fuir de cet horrible endroit qui ne représentait que du malheur et de la désolation pour moi. Je me ressaisis et je repris le chemin du cabinet. C’était décidé ; je devais partir.
Mes valises étaient prêtes. Je mis mon manteau et regardai une dernière fois la pièce. Dans un élan de rage et de colère, j’avais pris soin d’emmurer le couteau maudit et le Necronomicon. Plus personne ne pourrait trouver ces objets du démon ! Le cabinet dans lequel j’avais vécu, qui représentait tous mes espoirs en tant que jeune médecin et dans lequel j’avais essayé de sauver des personnes innocentes, n’était qu’à présent un cauchemar passé. J’allai prendre le premier bateau pour Arkham, et reprendre une vie paisible, loin du tumulte. Mon comportement était lâche et égoïste, mais je sentais au plus profond de moi que si je restais encore sur cette île, j’allais perdre ma santé mentale, voire pire …
Je marchai direction le port, d’un pas pressé, sans me retourner. Je vis la mer se rapprocher de plus en plus ; mon cauchemar était terminé. Mais j’avais parlé trop vite. Une fois sur place, je tombai des nues : le port avait disparu ! Il n’y avait plus aucune trace de son existence ! Les pontons n’étaient plus là, et je ne voyais aucun bateau à l’horizon. Je cherchai alors les marins, mais rien. Je n’étais pas fou, j’étais venu plusieurs fois dans ce port précisément, prendre un bateau direction Arkham. Mais que se passait-il ? Étais-je vraiment devenu fou ? Une hypothèse folle me vint à l’esprit : et si quelque chose essayait de me garder prisonnier sur l’île ? Je riais nerveusement en pensant à mon absurde conjecture. Alors que j’effectuai des tours sur moi-même, j’entendis un bruit qui me glaça le sang, un rire démoniaque. Je me retournai ; je vis à l’entrée de ce qui pour moi représentait le port, une des terribles gargouilles que j’avais vues dans mes cauchemars. Était-elle vraiment réelle ? Avais-je vraiment rêvé ? Comment était-elle arrivée ici ? Je pris mes affaires, et partis d’une marche rapide.
Je ne savais pas quoi faire. Je marchai d’un pas rapide, en cherchant une solution pour quitter l’île, cependant je me sentais observer. Je m’arrêtai un instant, et observai au-dessus de mon épaule droite ; je vis une nouvelle gargouille, cette fois-ci plus grande, arborant un sourire démoniaque. Deux gargouilles étaient à ma poursuite. Je me mis alors à courir, cherchant un vain un lieu où me réfugier, mais elles parvenaient toujours à me retrouver. Je sentis mon cœur s’accélérer, comme s’il allait exploser, je souffrais à la fois physiquement et mentalement. C’était une véritable torture pour moi. Au fur et à mesure que je courrais, le nombre de mes poursuivantes ne cessait de croître. C’est alors que je me retrouvai sur une plage qui me semblait trop familière : il s’agissait de l’endroit où j’avais recouvré connaissance durant plusieurs jours : le phare de Great Point Lighthouse. Puisant dans mes dernières forces, je courrai le plus vite possible en direction de celui-ci. Une fois à l’intérieur, je me barricadai ; il était maintenant impossible d’ouvrir de l’extérieur, j’étais sauvé. Je montai délicatement au premier étage, afin d’observer mes poursuivantes. Les monstrueuses gargouilles, étaient en bas du phare, au nombre de huit, et encerclaient mon refuge. Leur rire strident ne cessait de retentir dans ma tête. Je me recroquevillai sur moi-même. Abattu, désespéré, désemparé, je m’endormis.
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LE PHARE D'OUTRE TOMBE
Short StoryDans les années 1930, un jeune médecin diplômé de l'université de Miskatonic part sur l'île de Nantucket pour soigner la population d'une importante et inconnue épidémie.. La vie du jeune homme va alors être bouleversée pour toujours.. Bienvenue dan...