Délivre-toi Des Songes

Doutes & volonté

Mais alors que mes pensées calmaient la morsure du thermostat, un bruit similaire à des talons explosant un trottoir goudronné retentit. Un pas lent à la déflagration freinée réveillait mes sens. J'examinais l'environnement avec précaution, sans succès. Mes oreilles encore endolories, s'essayaient à en retracer la provenance. Je patientais, ne ressentant de danger que par le vacarme assourdissant.

Une fois le troisième fracas éteint, à l'horizon, curieusement hors de portée, une silhouette me fixait. Elle dégageait une aura bienveillante. J'avais conscience de cette chose, de ce qu'elle représentait, mais je l'oubliais, au profit de sa chaleur humaine. Elle murmurait, soignant mes maux. Ses paroles inintelligibles me rassuraient. Aussitôt qu'elle le comprit, elle apposa ses mains sur son torse. Un long moment séparait chacune de ses actions, figeant le temps avec elles.

Un quatrième pas, bien plus fort cette fois, vint détoner jusque dans mon crâne. Instantanément sonnée, ma vision se brouilla. Ma tête vacilla avec mon corps, subissant le tremblement de terre causé par le choc. Pourtant, l'être, au fond, restait impassible. Il semblait hors du danger, hors de cette atmosphère mortelle.

Lorsque je revins à moi, mon unique objectif fut de trouver l'entité, brusquement disparue. Son absence m'inquiétait graduellement, tandis que l'écho s'évanouissait lentement. C'est après plusieurs secondes au paraître interminable qu'enfin, je la dessinais. Les bras toujours contre son torse, à genoux. Je percevais son regard, le ressentais. Il ne m'avait jamais abandonné.

La difficulté à en comprendre les contours n'empêcha en rien le suivie de ses actes. Bientôt, l'individu déplia une couverture, arrachant une série d'agonie qu'il semblait vociférer.

Les tressaillements incessants me firent perdre sens et remettre en question la moindre vérité. Le monstre, responsable de la mort de ma tante pouvait-il être lui ? J'en doutais, peut-être n'avait-elle pu le rejoindre à temps. Je comprenais la douleur de cette femme, la ressentait physiquement, à chaque seconde un peu plus. Bientôt, je ne pus ne serait-ce que bouger les doigts. Mes oreilles, couleurs vives souffraient encore. Mes lèvres peinaient à se détacher, ne s'exécutaient qu'à cause de mes dents, se fracassant entre elles. Cette fois, je me sentais partir, mais cet individu, au loin, souhaitait me sauver. Il me donnait une force étrange, inconnue, pour me ressaisir.

Je tentais maladroitement de me relever, m'appuyant sur mes mains à demi paralysées. Mes genoux permirent à mon corps de se redresser, mais son poids extrême ne facilitait aucunement la tâche.

Ce fut après de longues secondes de luttes contre une hypothermie bien installée qu'enfin, mes pieds foulèrent de nouveau ce sol velouté. Alors ma seule pensée allait à cet homme. Il était toujours là. Il m'attendait. Il me voulait heureux. Ma mère dut mal interpréter les évènements, cela ne faisait plus aucun doute. Il me fallait venir à lui, contredire ma promesse de la veille.

Une volonté forte guida mes pas. Assurés, ils me menaient à cette voix. Je ne comprenais aucun de ses mots, mais le ton sur lequel il les prononçait inspirait la plus honnête des confiances. Ils réchauffaient mon cœur. Mon chemin s'éclairait d'un rouge bordeaux, semblable à celui de mon sang.

Je m'approchais, couchant l'herbe ébène sur ma route. J'estimais la distance à une dizaine de mètres. Toutefois, alors que le calme reprenait ses droits, une cinquième, et non des moindres, explosion vint me plaquer violemment au sol. Un acouphène terrible m'étourdit. Les secousses m'empêchaient tout mouvement. Ma vision se troubla, dédoubla tout détail perceptible. Les bruns obscurs se redressèrent et la terre se gonflait par endroit, en de petites sphères, similaires à la chair de poule sur mes bras. Le mystérieux au loin hurla de tout son être, pestant contre cette terrifiante attaque. S'inquiétait-il pour moi ? J'osais le croire. Quelques minutes me furent nécessaires pour recouvrer mes capacités.