Chapitre 5 - Vertiges

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Rosov glissait son doigt pâle le long du mur en pierre froid du sous-sol de son château. Il était pensif, rêveur, descendant les dernières marches avant d'accéder aux lieux où se formaient les gardes royaux.

Le sous-sol était immense, ponctué de pièces indépendantes qui permettaient aux soldats de s'isoler pour des combats spécifiques, selon l'arme avec laquelle ils souhaitaient s'entraîner. L'ambiance des environs était lugubre, presque glauque, émanant une forte odeur d'humidité, mêlée de parfum sanglant et fétide. Tout était conçu pour que la famille Noctrum et ses gardes royaux puissent s'exercer nuit comme jour, à l'abris des rayons du soleil ainsi que des divers parasites qui pourraient perturber les entraînements.


Le Roi disposait d'un bastion avec d'excellentes salles d'entraînement, ainsi que d'un terrain qui permettait aux soldats de s'habituer aux diverses conditions naturelles qui pourraient déranger leur combat. Mais il avait exigé d'avoir son propre sous-sol pour s'entraîner, un sous-sol qui servait également à s'y confiner en cas de grand danger imminent et de catastrophes naturelles.

Car Rosov ne se pensait pas invincible, loin de là : malgré sa nature vampirique qui lui offrait de nombreux avantages, il savait qu'il pouvait rester vulnérable, lui ainsi que sa famille, face à des catastrophes naturelles de grande ampleur ou aux assauts redoutables d'ennemis qui auraient parvenu à franchir la muraille protégeant la cité de Noctra.


Il joignit ses mains derrière son dos puis s'avança lentement au travers des couloirs étroits jalonnés de portes en bois. Certaines d'entre elles étaient ouvertes et donnaient vue sur des vampires, surtout des hommes, qui s'exerçaient durement. La plupart d'entre eux étaient torse nu, car l'humidité déjà grandement présente ne faisait qu'intensifier leur sueur qui collait au dessous en cuir de leur armure. Les quelques rares femmes, quant à elles, n'hésitaient pas à se battre avec un simple tissu qui retenait leur poitrine et un short ; rares étaient les vampires qui étaient pudiques au sein du Royaume maudit de Noctarosa.

Rosov contemplait ses soldats avec grande fierté. Son armée était redoutable et les vampires adoraient repousser les limites des avantages du vampirisme pour être encore plus dangereux, plus forts, plus rapides. Les gardes royaux étaient reconnus pour être les combattants les plus puissants et imposants, capables de passer de proie en proie en les égorgeant avec une rapidité effroyable.


Alors que le Roi faisait sa petite promenade au sein des corridors du sous-sol, un des hommes, assoiffé, s'éclipsa d'une salle d'entraînement pour se ruer sur une fontaine de sang frais, mélangé à du sel pour éviter toute coagulation, et s'en abreuva abondamment. Des grognements retentirent de sa bouche asséchée, des soupirs de plaisir trahirent la soif intense du soldat qui ferma les yeux et crispa ses mains pâles sur la bordure de la fontaine. Il était comme une bête avide de sang, dans un état du vampirisme où il effleurait l'allure d'un monstre.

Rosov s'arrêta près de lui, les mains toujours jointes derrière son dos, et le taquina avec un sourire qui se logea en coin de ses lèvres :

— On a oublié sa dose de sang, ce matin ?

Le garde sursauta un peu, surpris, puis se redressa aussitôt. Du sang macula le contour de ses lèvres et dégoulina le long de son menton pour clapoter sur le sommet de son torse. Il se mit au garde à vous puis répondit d'un ton solennel :

— Votre Majesté, je n'avais plus de sang à disposition. Je suis navré que vous ayez assisté à mon hérésie.

— Hérésie ? reprit Rosov en arquant un sourcil et en esquissant un petit sourire amusé.

Ténèbres - Le Mage noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant