Quatrième extrait du journal de Naruto

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Jeudi 23 juin.

Le soleil estival darde ses rayons déjà brûlants sur la plaine accidentée qui s'étale à perte de vue devant mes yeux. Ce qui devait être un champ où paissaient quelques animaux n'est plus qu'un désert de terre si sèche qu'une chape de poussière semble flotter continuellement au-dessus du sol. La chaleur étouffante du zénith nous assomme tous les jours pendant quelques heures et je profite souvent de l'accalmie pour prendre mon crayon taillé à la va-vite au couteau et écrire dans ce petit carnet. Il ne reste guère plus qu'une dizaine de pages blanches. Je vais devoir demander à Sakura, l'infirmière, de m'en prendre un la prochaine fois qu'elle ira à l'arrière. Elle est toujours si gentille, si positive, alors qu'elle soigne chaque jour des dizaines de personnes blessées par la faute de l'idiotie humaine... Je l'apprécie beaucoup. Parfois, pendant nos longs tours de garde, elle vient nous parler et nous tenir compagnie. On discute alors longuement de choses et d'autres, de ce que nous ferons après la guerre, des gens que l'on reverra, des jours heureux que l'on pourra vivre. Et même si parfois cela me rend mélancolique, je vois davantage cela comme une pause, un petit rêve au milieu du cauchemar. Et je m'en porte mieux.

Au fil de nos discussions, j'ai d'ailleurs remarqué que Neji cache un cœur d'idéaliste écorché. Il veut voir la vie comme un terrain de liberté où tout est possible. Il voit les gens en face de nous comme des dictateurs par centaines qui voudraient le priver de ce droit. Je n'arrive pas à savoir s'il a raison ou pas, si je trouve sa façon de penser honorable ou non. J'aime juste en discuter longuement avec lui, confronter nos points de vue.

Sans cela, au vu de ce qu'il se passe tous les jours autour de moi, je serai bon pour l'asile depuis longtemps. Je ne compte plus le nombre de cadavres que j'ai vu être brûlés, le nombre de cris déchirants se faufilant hors de l'infirmerie et qui me réveillent la nuit, le nombre de bombes que j'ai vu éclater devant moi.

J'écris parfois à Jiraya pour oublier, on parle de tout sauf de ce que je vis en ce moment. Il s'en veut trop de ne pas avoir été appelé, je vois trop d'horreurs pour lui en parler. Nous passons sous silence tout cela, et discutons de notre village et des gens qui y sont resté. Parfois j'ai droit à une anecdote croustillante sur le vieil Orochimaru, l'apothicaire un peu fou du village, ou sur Danzō, le président du club d'arts martiaux au regard de glace et aux jambes de guimauve. Tout le monde le surnomme ainsi car il essaie de garder toute sa crédibilité d'antan en faisant les gros yeux à tout-va mais qu'il ne tient plus debout depuis déjà longtemps – la faute à la vieillesse ou à l'alcool, personne ne le sait vraiment...

Entre Neji et les quelques autres soldats avec lesquels j'ai fait connaissance, ainsi que Sakura et Jiraya, les difficultés passent plus facilement. Je me rends moins compte des jours gris qui filent et se ressemblent. Je suis au moins content de pouvoir compter sur ces gens-là pour me sentir mieux, et ça a quelque chose de rassurant.

On était très cons à vingt ansOù les histoires vivent. Découvrez maintenant