Chapitre 2 : Torture

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Je sens le regard inquiet de mon père se poser sur mon visage alors que je reste silencieuse, ne pouvant détacher mes iris de l'écran. J'ai la tête qui tourne, mon sang se glace dans mes veines, tous mes muscles se tendent et j'ai la respiration coupée. J'ouvre grand les yeux car je sens que je pourrais m'évanouir à tout moment. Puis dans un élan d'angoisse et de colère je prends la télécommande posée sur la table basse en face du canapé pour appuyer sur le bouton off. Je me lève d'un bond et cours en direction des escaliers, j'entends mon père m'appeler alors j'accélère, une marche me fait un croche-pied et je m'écroule au sol, je me relève à toute vitesse en oubliant la douleur qui m'assaille le genou et fuis désespérément vers ma chambre. J'ouvre la porte et la ferme à clé derrière moi, je suis en sécurité, je m'appuie contre la porte en fermant les yeux pour calmer mon cœur en panique. Je tente de ralentir ma respiration et essaie de ne penser à rien.
On toque à ma porte et je sursaute. C'est mon père.

"Ça va chérie ? Tu veux qu'on discute ? Ouvre-moi !"

Mon cœur déraille à nouveau alors que j'avais réussi à garder un certain équilibre. Je perds mes moyens, une boule dans ma gorge se forme et mes yeux s'humidifient. J'essaie de répondre le plus calmement possible.

"Oui ça va. Non merci, je préfère rester seule.

- Tu es sûre que tu ne veux pas en parler ?"

Mon ventre se noue.

"Non, ça va, ne t'inquiète pas !"

Il semble lui aussi essayer de garder le contrôle.

"D'accord. Tu ne veux pas manger ? Ta mère vient de dire que le dîner était près.

- Non merci, je mangerai plus tard."

Je réponds le plus rapidement possible pour terminer cette conversation insupportable qui ne mène à rien.

"Ok."

Il parle calmement pour me rassurer, mais je sais qu'il est aussi mal à l'aise que moi. Il s'en va. Une vague de hargne m'envahit en regardant mes murs, recouverts de visages souriants. Qu'est-ce qu'ils ont à me regarder comme ça ? Sont-ils en train de se moquer de moi ?! Ils sont faux, tout est faux ! Je me lève et les déchire tous, un par un, jusqu'à ce que le sol soit recouvert de bouts de papiers piétinés et froissés. Enfin soulagée, je me pose à nouveau contre la porte, glisse pour m'assoir, mes jambes repliées sur moi-même et entourés de mes bras, je pose mon front sur mes genoux, en silence. Je relâche la pression et pleure d'un coup. En quelques secondes, mes yeux deviennent des cascades de larmes. Je pleure tellement sans m'arrêter que j'en oublie presque la raison. Je pleure pour Luke, je pleure pour ma vie fade, je pleure pour mes rêves bafoués, irréalisables, je pleure pour tout. Pourquoi lui ? Je l'aimais tellement, j'avais tant de choses à lui dire. Mais maintenant c'est terminé, mon miracle terrestre est parti. Tout ce à quoi je m'attache finit par me quitter.

Ma meilleure amie, Charlotte, a été mon premier miracle, mon rayon de soleil. Ça fera un an dans un mois qu'elle est partie. Je me souviens encore de la dernière fois que je l'ai vu, allongée sur son lit d'hôpital, maigre et pâle, épuisée par sa maladie incurable, l'anorexie, qui l'avait rongé depuis si longtemps. Elle se plaignait sans arrêt de son poids, elle se trouvait trop ronde, elle était constamment à la recherche du poids idéal. Dès que je lui proposais de manger, elle refusait poliment, mais elle avait faim, je le savais. Ses parents l'ont laissé mourir lentement sans réagir. Ils pensaient qu'elle ne faisait qu'un régime, et c'était le cas, mais elle s'imposait beaucoup trop de limites, et ne mangeait jamais à sa faim. Elle en est morte. Elle était belle et fine, brune aux yeux verts, elle était parfaite. Si elle s'était vu comme moi je la voyais, elle serait encore là aujourd'hui.

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