Mon cur fait un bond dans ma poitrine. Est ce qu'il sous-entend que je peux rester dans sa chambre ? Le pire, c'est que l'idée ne me déplaît pas, et que je sais qu'une part au fond de moi en a envie.
- Oh.
Un blanc emplit lourdement la pièce.
- T'es sûr ? Mais, et s'ils vérifient ? demandé-je, inquiète.
- Dylan et Amy sont bien allés dans la même chambre.
- Dylan et Amy sont frère et sur, corrige-je.
- Et bien, si ces tarés viennent nous chercher, t'auras qu'à dire que t'es ma sur, propose-t-il.
- Mais Aiden, si c'est moi qu'ils veulent, ils fouilleront partout et qu'est-ce qu'il va t'arriver à toi ? Je ne veux pas être responsable d'un malheur, juste parce que j'ai eu coup de stress, ajoute-je, tentant de le convaincre.
- Ce n'était pas qu'un coup de stress, me coupe-t-il, mimant des guillemets avec ses doigts. Et je n'allais pas te laisser en plan. Et, dis donc, depuis quand tu t'inquiètes pour moi ? me lance-t-il, les yeux pleins de malice.
- Euh, non, je m'inquiète pas je...enfin hum, balbutié-je, prise de court, je cherche mes mots.
Je veux dire, c'est juste par principe.Face à ma réponse, il lâche un "oh" et fait mine d'être vexé. Voyant mon expression gênée, il reprend son air habituel puis rigole, ce qui crée malgré moi une vague de chaleur se propageant dans tout mon être.
Ceci dit, il me fascine ; il parvient à rire, et ce même dans la situation dans laquelle nous sommes.
- Comment tu fais ?
Confus, il me demande à son tour :
- Comment ça ?
- Comment tu fais pour garder le sourire ? Je veux dire, on est là, sans comprendre ni pourquoi ni comment, et la seule chose que l'on sache c'est qu'on va se faire enlever pour crever ? C'est tellement insensé.
- Ouais, j'te l'accorde, on se croirait dans un film d'horreur. Mais, vaut mieux en rire qu'en pleurer non ? Et qui te dit qu'ils nous amènent pas dans un champ pour élever des vaches ?
Je ris à sa remarque stupide. C'est dingue, le monde pourrait s'abattre sur sa tête, ce garçon resterait optimiste. Je ne sais pas si je trouve ça fou, ou au contraire, si c'est ce que l'on devrait tous faire. En tous cas, je l'envie pour ça.
- Bon et bien, reprend-il...puisqu'il semblerait qu'on va rester ici toute la nuit...Il marque une pause. Puis un sourire amusé se dessine sur son visage, lorsqu'il me lâche :
- Raconte moi ta vie.
Aiden n'a définitivement pas fini de me surprendre.
- Ma vie ? Hum...mais...bon ok, par où je commence ? réponds-je.
- Par le début, rétorque-t-il, visiblement fier de son sarcasme. Viens, il y a un fauteuil dans le coin, assieds toi, enfin, fais comme chez toi, m'indique-t-il.
Je m'installe donc en essayant d'être le plus à l'aise possible (ce qui n'a jamais été mon fort). Lui est placé en tailleur, face à moi, sur son lit, prêt à écouter le récit passionnant de mon existence. On dirait un enfant attendant qu'un de ses parents vienne lui conter une histoire avant de dormir.
Cette vision me fait penser à mon petit frère, me provoquant un pincement au cur. Quand il était petit, je prenais l'habitude de lui raconter des histoires sur les légendes grecques, je les modifiais, bien sûr, pour que ce soit adapté à son âge. Il adorait ça.
Alors je sais par où je dois commencer. Je débute en présentant brièvement ma famille, allant de William, à ma mère, qui a le don de me faire rire quand elle s'essaie au "langage des djeuns" comme elle aime le nommer, jusqu'à mon père, cette figure m'ayant toujours inspirée. J'évoque aussi mes grands-parents déjantés, qui ont toujours été mes idoles. Et je termine enfin par mes deux acolytes, Maya et Sarah. Je m'arrête quand je sens les larmes monter et la nostalgie m'envahir. Aiden le voit et me comprend.
- Et bien, je pense que ça vient de famille, cette folie ! me taquine ce dernier.
Je mime un coup de poing vers lui, ce qui le fait légèrement rire.
- Et sinon, qu'est-ce que tu aimes faire ? Et please ne me sors pas manger et Netflix ! m'implore-t-il, en imitant une prière, ses mains joignées l'une contre l'autre.
- Ah, alors si j'enlève ces deux options, il ne me reste plus grand-chose...dis-je d'une voix lasse, en m'affalant un peu plus dans le siège. Non, plus sérieusement, je lis, et avant je dessinais.
- Oh, nous avons une artiste parmi nous ! s'exclame Aiden. Pourquoi as-tu arrêté ? s'intéresse-t-il.
- A cause des cours, je n'avais plus le temps. Ici, c'est sûr qu'on en manque pas, dis-je amèrement.
- Ça, tu l'as dit. Et encore, toi t'es arrivée il n'y a pas longtemps, et je peux te dire que moi, au bout d'une semaine, je me suis jamais autant ennuyé ! surenchérit Aiden.
- Tiens, puisque tu parles de toi, raconte moi ta vie maintenant, le défié-je.
Son expression change brutalement, il doit certes être surpris de ma question soudaine, mais il y a l'air d'y avoir autre chose. Ai-je dis quelque chose de travers ? Il se ressaisit, semblant revenir à lui :
- Tu sais, la mienne n'est pas très passionnante, je doute qu'elle t'intéresse vraiment.
- Ah non ! C'est à ton tour maintenant, sinon c'est injuste, insisté-je.
- Mais c'était pas dans le contrat ça, madame Allison.
Le simple fait qu'il prononce mon prénom crée un frisson qui parcourt le long de mon échine. Mon dieu, mais qu'est-ce qu'il me prend ?
Constatant bien qu'il évite de répondre, je lui suggère de répondre à seulement cinq questions.
- Trois questions, c'est ma dernière offre, propose-t-il en appuyant ses mots d'un regard plein de malice.
- T'es vraiment difficile toi ! Laisse moi réfléchir, dis-je en m'accoudant sur le siège. Ok, alors, première question : ta couleur préférée ? lâché-je.
Parmi une multitude de questions, il a fallu que je choisisse une qui semble tout droit sortir de la bouche d'un enfant.- Oh facile ! Bleu marine. Et toi ?
- Violet, réponds-je. Deuxième question : l'endroit où tu te sens le mieux ?
- Ça, aussi, c'est facile. Ici, bien évidemment, dit-il sérieusement. Son sourire sarcastique se redessine sur son visage, quand il voit mes sourcils froncés et reprend :
- Je plaisante, ricane-t-il, je pense que ce serait ma chambre, je veux dire, ma vraie chambre, chez moi, muni de mes écouteurs. Allez, dernière question, réfléchis bien...
- Arrête de me mettre la pression ! répliqué-je. Donc -
Je n'ai pas le temps de continuer ma phrase qu'Aiden me fait signe de me taire et d'écouter. En tendant l'oreille et en m'approchant silencieusement de la porte, je peux clairement entendre des bruits de marche se rapprochant. Celle-ci est machinale, coordonnée, et me donne la chair de poule. Il y a au moins deux personnes dans le couloir. Aiden me rejoint et me fait comprendre dans son regard de ne surtout pas faire de bruit. Les pas sont de plus en plus près et renforcent mon angoisse. Mon cur cogne tellement fort que j'en ai mal aux côtes.
Au moment où les pas arrivent juste devant la porte, ils s'arrêtent, tout comme ma respiration, pendant d'interminables secondes, et repartent dans la même cadence.
Soulagés, nous soufflons tous les deux.
Ce soir, ce n'est pas notre tour.
Mais cela va-t-il durer ?
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this is not a dream
General FictionAllison, une jeune fille de seize ans, se réveille d'un cauchemar déroutant. Mais le vrai cauchemar ne fait que commencer, lorsqu'elle se rend compte qu'elle ne s'est pas réveillée dans sa chambre... Où est-elle ? Où est passée sa famille ? Tant de...