DRIVE ME HOME [PAUSE]

Chapitre 4

- Skay !

Je me tournai.

Vyctor et Sue se tenaient derrière moi. Vyctor était essoufflé.

- Skay, dit-il en soufflant, je sais que c'est beaucoup de te demander de croire tout cela, que la mort des parents de Kat et la révélation de tes origines, c'est beaucoup de choses à réaliser en même temps. Et je comprends que pour le moment tu n'y crois pas. Mais tu vas y croire. Si tu veux savoir la vérité, il suffit de la demander à tes parents.

Je ne savais plus quoi penser.

Je ne pensais plus rien, mais en même temps pleins de questions sans réponses planaient dans ma tête. Et s'il y avait une chose que je détestais, c'était rester sans réponse.

Je me levai, et je secouai mes vêtements pleins de terre.

- Tu as raison, acquiesçai-je. Oui, tu as raison. Parfaitement raison.

- Je sais, dit-il en reprenant le sourire.

Je me rendis compte que, même si je le connaissais depuis peu, Vyctor semblait s'inquiéter pour moi. Et j'appréciais vraiment.

Nous retournâmes à la Ford grise. Sue monta sur la banquette arrière.

Dans le rétroviseur, je la regardai, ébahie. Elle était très jolie, elle me faisait penser à une fée des contes, avec sa peau blanche, son nez retroussé, ses cheveux roses et ses yeux verts grands ouverts.

Nous roulâmes encore.

Personne ne parlait, et pour casser le malaise, Vyctor demanda :

- Qu'est-ce que tu fais ici Sue ? Tu n'es pas censée être interdite de séjour dans le monde 333 ?

Sue, d'un geste de la main, rejeta ses cheveux derrière son épaule.

- Depuis quand les règles m'arrêtent, Vyctor ? répondit-elle du tac au tac.

- Tu as conscience que si les services t'arrêtent, tu peux finir derrière les barreaux ! s'exclama Vyctor.

Je suivais la conversation avec intérêt. Leur discours me paraissait-il crédible ?

- Je rigole, Vyctor, ne t'inquiètes pas pour moi. J'ai obtenu une autorisation exceptionnelle du Grand Conseil.

- Pour quoi faire ?

- Venir te voir, sombre idiot !

Elle se leva de la banquette et claqua un baiser sonore sur sa joue. Vyctor sourit.

Ah ok.

Ces deux-là, soit ils étaient ensemble, soit ils n'allaient pas tarder à l'être.

***

- Voilà, c'est ma maison, dis-je en pointant la demeure blanche.

Vyctor gara la Ford et nous descendîmes.

Lorsque je posai le pied au sol, le stress refit surface. Sue le remarqua et posa sa main sur mon épaule, pour m'encourager et me rassurer.

Je sonnai à la porte.

Ma mère ouvrit. Ses yeux étaient rouges et boursouflés. Elle avait pleuré.

- Skay ! s'exclama-t-il.

Elle se jeta dans mes bras.

- Les parents de... commença-t-elle.

- Je sais, dis-je en la serrant.

Je pleurai.

Je ne pleurais pas que pour ça. J'avais aussi peur. Peur de la vérité.

Nous nous décollâmes, et ma mère vit Vyctor et Sue. Elle sembla sous le choc, autant que moi la première fois que j'avais vu Sue.

- Maman, ce sont mes...amis, commençai-je. Vyctor et Sue.

Elle sembla sans mot, mais eu la force de chuchoter un :

"Entrez, je vous en prie" à peine audible.

Nous nous installâmes dans le salon. Ma mère alla chercher mon père, et ils chuchotèrent dans la cuisine.

Ils apportèrent des biscuits, et ils nous invitèrent à nous assoir.

L'ambiance était très lourde.

J'avais l'impression que mes parents savaient pourquoi j'étais là. Du moins, ils s'en doutaient. Et cela m'effraya encore plus.

- Papa, maman, commençai-je. Je voudrais vous parler de quelque chose, et je veux que vous me promettiez de me dire toute la vérité.

- Bien sûr, chérie, acquiesça mon père.

Je pris ma respiration, comme si je m'apprêtais à plonger.

- Voilà... J'ai pris conscience que j'étais différente des autres, commençai-je. J'avais toujours pensé qu'avoir les cheveux bleus étaient une particularité, mais je n'avais jamais eu l'idée de me dire que, peut-être, cela signifiait que je n'étais pas comme les autres. Vous et Nolan, vous êtes bruns. Comment ça se fait ?

Ma mère se remit à sangloter de plus belle.

Mon père se leva du fauteuil, et commença à tourner autour de la table, comme il le faisait lorsqu'il allait expliquer quelque chose.

Au fond de moi, j'avais espéré qu'il dise "Mais non, pourquoi tu penses ça ? C'est une particularité, quelqu'un de ton arbre généalogique te l'a transmise. "

Mais il ne dit rien de tout cela.

- Nous savions que le jour où tu allais te poser des questions allait arriver, dit-il.

Ce début de phrase me fit frémir.

- C'était une belle journée comme celle-ci, continua-t-il. Ta mère et moi rentrions du supermarché. Alors que nous ouvrîmes la porte de la maison, nous trouvâmes un petit panier de corde, posé sur le perron. Je me penchai, et, surpris, je constatai qu'il abritait un petit nourrisson qui dormait. Ce nourrisson avait une chevelure bleue. Nous trouvions cela ravissant, pas du tout effrayant. Lorsque je te soulevai pour te prendre dans mes bras, nous trouvâmes une enveloppe cachetée dans les draps du panier. Nous l'ouvrîmes. C'était une simple note, qui disait : "Elle est pour vous jusqu'à sa majorité. Elle s'appelle Skay."

Des larmes roulèrent sur les joues de mon père.

- Voilà, tu sais tout à présent, conclut-il.

- C'est tout ? hurlai-je. Je suis un bébé orphelin que l'on a déposé sur votre foutu perron ?Pourquoi ne pas me l'avoir dit avant ?

- Parce que nous avons commis une erreur, dit ma mère. Nous aurions dû te le dire. Mais nous étions trop effrayés, nous avions peur que tu nous sois prise aussi vite que tu nous as été donnée.

Je ne savais pas quoi dire, ni quoi faire. Je me sentais...confuse, trahie. Je ne savais même plus qui j'étais. Je n'étais pas celle que je pensais être.

Je me levai brusquement du canapé.

- Vyctor et Sue ici présent viennent d'où je viens. Et je veux connaître la vérité. Je veux savoir qui je suis. C'est pourquoi je... je décide de partir avec eux.

Ma mère s'effondra en pleurs.

Mon père la prit dans ses bras.

- Ne vous inquiétez pas pour Skay, monsieur et madame, dit alors Vyctor. Nous prendrons soin d'elle, et nous ferons en sorte qu'elle ait l'autorisation de vous rendre visite le plus souvent possible.

J'appréciai le geste de Vyctor, mais je ne pensai pas que je rendrais visite à ceux qui m'ont caché la vérité aussi longtemps...