Chapitre 10 : Le cris du silence est transperçant

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  Elle lui avait tout pris. Sa vie, ses amis, son nom et jusqu'à son visage. De tout, il ne restait rien. En un claquement de doigt, la réalité de Hyun-Ae avait semblé s'évader en poussière. Elle l'avait vu de ses propres yeux et elle ne pouvait qu'être le témoin de ce crime imparfait. C'était les yeux rougis et les lèvres mordues jusqu'au sang par la rage, qu'elle avait découvert les pages du nouveau journal de l'école.

" La traîtresse de ses patries " avait titré le torchon de ce club d'adolescent en quête de reconnaissance. Et là, au côté de son visage plus que désavantageux placardé sur un vieux bout de papier, trônait fièrement celui de Mi-Ok. Ses cheveux bleu avait maintenant troqué un brun telle que le sien de métisse. Le même que celui qu'elle portait fièrement depuis quelques jours pour soit disant "se reconnecter avec elle même". Ses yeux était largement plus grand et ses sourcils avaient bien évidement suivis le même traitement. Sa peau avait atteint une carnation bien plus blanche que son si joli teint asiatique.

  En regardant la photo de celle qui se faisait passer pour sa meilleur amie depuis si longtemps, la jeune fille avait l'étrange impression de n'observer qu'une pâme copie d'elle même dans un miroir.

  Mais le pire ne résidait peut-être pas tant que ça dans cette photo, mais plutôt dans les écrits qu'elle accompagnait.

  Hyun-Ae ne pouvait que constater combien elle était dénigrée, malmenée et tabassée sous le poids de toutes les accusations les plus outrageuses dont on pouvait l'accabler. Elle n'était plus qu'une traîtresse qui avait eu la honte de renier sa famille, sa patrie la Corée et son autre moitié la France. Chaque lettre couchée sur le papier était un tissu de mensonge qui l'enfonçait au tréfonds des enfers et des tourments.

  La rage dansait dans le coeur de la métisse alors que sa cavalière, la vengeance, hurlait au fond d'elle pour pouvoir s'exprimer au grand jour. "Laisse-moi faire", semblait-elle lui susurrer à l'oreille, "laisse moi leur montrer qui tu es vraiment".

  Mais la voilà la triste réalité. Si elle ne laissait qu'une once de ses sentiments s'exprimer, elle donnerait raison à cette mascarade. Elle se dévoilerait sous ce jour monstrueux dont on l'accuse de revêtir l'apparence jour après jour depuis déjà plusieurs mois. Alors elle restait là, étrangement seule face à ce journal malgré toutes ses personnes qui l'encerclaient de plus en plus depuis déjà quelques minutes. Les murmures s'élevaient dans l'assemblée, mais ils paraissaient incompréhensibles pour les oreilles de la franco-coréenne. Elle était tétanisée par cette découverte passée déjà entre les mains de chaque élève de cette école.

  L'interview dans ce journal avait été un poison des plus mortels et plus le temps passait, plus celui-ci envahissait les veines de la jeune fille.

— Que fais-tu donc plantée au milieu de la cour, Hyun-Ae ? tonna une voix juste derrière elle. Ne vois-tu pas que tu bloques le passage de tout le monde.

  La métisse se tourna lentement vers son interlocuteur alors que les flammes de la colères flamboyaient dans ses pupilles brunes.

— Mi-Ok, ne peux-tu pas te taire au lieu de répandre ton venin de vieux basilic ?

— Mais voyons, je ne te veux aucun mal. Je veux simplement semer la vérité sur ton sombre visage. La seule de nous deux maléfiques c'est toi et toi seule.

   Les larmes se mettaient doucement à perler sur le visage pâle de Hyun-Ae, alors qu'elle laissa échapper que quelques mots en lâchant le journal :

— Je ne suis pas la fille que tu décris sur ce bout de papier. Je ne le suis pas et tu n'es qu'une menteuse. Chaque mot, chaque citation que tu me mets à charge, c'est faux.

Au Rythme de la NeigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant