F É L I X
- On va où ? questionne Valentin en me voyant monter dans ma voiture.- Surprise, dis-je laconiquement pour laisser planer le mystère.
Il acquiesce d'un hochement de tête avant de prendre place à mes côtés. Durant tout le trajet, le noiraud n'a pas dit un mot. Il s'est contenté de regarder par la fenêtre tout du long, l'air pensif. Nous avons roulé quatre heure sans qu'il ne pose une seule question. Il semblait complètement ailleurs.
Alors que je me gare, il paraît enfin reprendre contact avec la réalité. Il sort de la voiture déboussolé, les yeux grands ouverts, mettant quelques secondes avant d'émettre la moindre réaction.
- Tu m'as emmené à la mer ?! s'exclame-t-il encore sous le choc.
Je lui offre un grand sourire.
- Surprise !
Il me regarde éberlué avant de reporter son attention sur l'océan. Il fait nuit, pas un chat ne rôde dans les environs. La plage est déserte et nous donne ainsi l'impression de nous appartenir. Devant moi, Valentin ôte ses chaussures pour marcher pieds nus sur le sable froid. Il contemple le spectacle océanique, les cheveux flottant au gré du vent. Je ne tarde pas à le rejoindre.
- Félix ?
- Hum ?
- Ça, c'est pour m'avoir fait avouer que je t'aimais bien, déclare-t-il sournoisement avant de me pousser dans l'eau glacée.
Je pousse un cri pas très viril en entrant en contact avec l'océan.
- Putain Valentin ! hurlé-je en me relevant le plus rapidement possible, complètement gelé et trempé.
Il rit à gorge déployée. Je le foudroie du regard. Je l'adore, mais quel enflure il peut faire parfois.
- Vengeance !
- AH LE BÂTARD ! cri-t-il en se retrouvant mouillé à son tour.
Nous sommes dégoulinant d'eau glaciale, frigorifiés, et pourtant, on ne peut s'empêcher de partir en fou rire. Enfin, après nous être calmés, nous reprenons nos esprits et courrons jusqu'à mon véhicule, claquant des dents et grelottant.
- Ah mais au fait, on va dormir où ? me questionne Valentin en me voyant démarrer.
- À l'hôtel. J'ai pioché dans mes économies.
Une lueur de culpabilité se reflète dans ses beaux yeux bleus. Je lui souris pour le rassurer.
- C'est parce que je veux vraiment te pécho chéri.
Il pouffe. Il semble que j'ai réussi à détendre l'atmosphère. Fier de mon coup, je fonce vers l'hôtellerie la plus proche. J'ai cru comprendre que Valentin ne voulait pas être en couple par peur de se lasser et de tomber dans la routine. Alors je veux lui prouver que je suis capable de venir à bout de ses préjugés sur la vie de couple. Je veux lui montrer que je ferais tout pour ne pas qu'il s'ennuie avec moi. Je me suis dit qu'un séjour à la mer devrait lui faire plaisir. Et ça m'a pris toute la semaine pour planifier ce petit voyage.
Le lendemain, je l'emmène au cinéma voir le nouveau film d'espionnage qui vient de sortir. J'ai essayé de me remémorer de tout ce qu'il m'avait dit sur lui lors de notre rendez-vous au bar pour organiser cette journée au mieux. Je veux vraiment lui faire passer un bon moment en ma compagnie.
- Alors, le film ? lui demandé-je à la sortie du ciné.
- Pas mal, les effets spéciaux étaient spectaculaires. N'empêche qu'il fait assez déjà-vu. Et j'ai relevé deux ou trois cliché hollywoodien. Je lui donnerais la note de six sur dix.
- T'es dur. J'aurais mis au moins huit.
- Je suis juste objectif. Et peut-être un peu sévère.
- C'est ça qui est sexy.
Il lève les yeux au ciel, un sourire en coin, amusé.
Et finalement, la journée a filé à une vitesse folle. Je n'ai pas vu le temps passer. J'étais tellement bien avec lui que j'en ai perdu toute notion temporelle. J'espère que c'est réciproque d'ailleurs.
Nous finissons notre balade sur la plage, alors que la nuit commence à tomber. Valentin trempe encore ses pieds nus dans l'eau glacée. Personnellement, je préfère garder mes distances avec la mer, de peur de revivre la même scène qu'hier soir.
- J'ai pas envie de rentrer, marmonne-t-il en se tournant vers moi.
Je souris. Je suis heureux que notre sortie lui ai plu.
- Toutes les bonnes choses ont une fin.
- Citation à la con.
Je pouffe. Je m'assois dans le sable fin, rapidement imité par Valentin. Le vent s'est levé, faisant virevolter ses mèches ébènes. Il a le regard perdu vers l'horizon. L'air mystérieux qu'il aborde le rend encore plus beau que d'habitude.
- Grosse flemme de retourner à la ville en sachant les partiels qui m'attendent, lâche-t-il.
- Arg... Ça m'était presque sorti de la tête, l'approche des examens...
- D'ailleurs je devrais être entrain de réviser en ce moment. Tu me dévergondes Félix.
J'éclate de rire.
- Je ne pense pas que tu ais besoin de moi pour te dévergonder chéri, plaisanté-je.
- Pas faux.
Il soupire avant de reporter son regard vers la nuit étoilée. Je fais de même, laissant peu à peu le silence s'installer entre nous. Je trouve qu'il fait étrangement doux pour un mois d'avril.
- J'ai réfléchi aujourd'hui, déclare-t-il soudainement.
- Ah ?
- Je crois que je suis prêt à t'accorder une chance.
Félix.exe a cessé de fonctionner. J'ai les yeux écarquillés et la bouche entrouverte. Je crois que je beug. Je m'attendais à tout sauf à ça. Je suis surpris, choqué, étonné, chamboulé, heureux, euphorique et stupéfait. Tout ça à la fois. Pour vous montrer à quel point cette annonce est inopinée.
N'empêche, je dois sans doute avoir l'air d'un ahuri, avec la tête que je tire. Un rire cristallin me sort de ma transe.- Ne fait pas cette tronche, on dirait un poisson mort.
Sympa, cette comparaison.
- C'est juste que... Je ne m'attendais pas du tout à ça, avoué-je.
- J'aime te surprendre chéri, répond-il avec un clin d'oeil provocateur.
Je reprends mes esprits, et encre mon regard dans le sien. Cette déclaration m'a fait l'effet d'une bombe. Mais d'une bombe qui réchauffe le coeur. J'ai l'impression que je pourrais exploser de joie. Sans vraiment m'en rendre compte, mes yeux descendent vers ses lèvres. J'ai très envie de l'embrasser. Lentement, j'approche ma tête de la sienne, incontrôlablement attiré vers sa bouche des plus appétissantes. Mais je suis malheureusement stoppé par un doigt qui se pose sur mes lèvres.
- Pas si vite chéri. J'ai dit que j'étais prêt à t'accorder une chance. Mais pas tout de suite.
- Pourquoi ? me plains-je.
- Parce que ce serait bien trop facile. Bien trop ennuyant. Je veux du frisson, de l'original. Séduis-moi, surprends-moi encore. Et à ce moment-là seulement, peut-être bien que j'accepterai de sortir avec toi, murmurre-t-il à mon oreille avant de passer sensuellement sa langue sur ses lèvres.
Je crois que je suis complètement fou de ce mec.
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Transe
RomanceValentin est désinvolte, libertin et souvent dans la lune. Il est ce genre de garçon toujours ailleurs, dans sa bulle, déconnecté du monde extérieur. Il passe ses nuits en boite, à danser pour oublier la réalité ennuyeuse de son quotidien. Il semble...