Chapitre 3

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Combien de temps resta-t-elle ainsi ? A pleurer sa liberté disparue, ses rêves brisés, sa mort qui arrivait ? Combien de temps le monde la laissa-t-elle dans sa solitude bienvenue ? Combien de temps passa-t-elle ainsi ? Froide et triste. Effrayée et perdue. Son sentiment d'abandon croissait lentement dans sa poitrine. Toutes ses émotions négatives semblaient être des graines de malice ou de ténèbres qui souhaitaient lentement pousser et grandir en son âme qu'elle avait toujours espérer pure. La porte s'ouvrit dans un grincement, horrifiée, elle se redressa en essuyant ses larmes pour faire face à son vis-à-vis. Elle aurait espéré que son mari frappe à la porte ou la prévienne de son arrivée pour ne pas lui montrer un tel état de faiblesse. Ariette ne voulait pas paraître faible devant cet homme si détestable.

Il s'avança lentement dans la pièce, la porte se ferma seule derrière lui. Les rideaux se fermèrent d'eux-mêmes, comme commandés par un vent invisible et un feu bleu s'alluma dans la cheminée. Réchauffant immédiatement l'atmosphère, sa chaleur agréable vint caresser Ariette.

Elle le dévisageait, méfiante, que souhaitait-il d'elle ? Pendant un moment, elle se réchauffa sous le regard indifférent de son mari quand soudain, celui-ci mit un genou à terre. C'était comme si les ténèbres avaient dévorés la pièce, aucune lumière mis à part celle du feu bleu. Et les yeux d'or du démon qui ne la quittaient pas et il baissa la tête.

Ariette se recula sur le lit et se leva en ne quittant pas le matelas. A tout moment, il pouvait lui sauter dessus, la plaquer et faire d'elle tout ce qu'il souhaitait. Des mouches s'engouffrèrent sous la porte de la chambre, elles semblaient un millier et toutes semblaient se diriger vers elle. Ariette hurla, hurla et les mouches entrèrent dans son corps. Elle ne pouvait pas refermer la bouche et elle se retrouva allongée de force. Les insectes entrèrent et entrèrent sans cesse. La dernière mouche était une mouche d'or. Elle voleta au dessus de la bouche d'Ariette qui la regardait avec horreur.

Elle allait vomir, son ventre allait exploser. Un mauvais sort et elle sentit sa peau se marquer de traces à l'extérieur. C'était lui, il allait la tuer par les insectes, et les mouches allaient pondre des œufs dans son ventre et leurs petits allaient dévorer sa chair. L'insecte d'or fit un dernier tour puis entra dans sa bouche et Ariette sentit son corps s'arquer et se sentit convulser. Ses yeux se révulsèrent et ses mains saisirent le drap pour le serrer sous sa douleur. Et le démon vint à elle, le démon se retrouva au dessus de son corps tourmenté par un mauvais sort et ses yeux jaunâtres la dévisagèrent. Des marques du diable griffèrent la peau de ses jambes, la peau de ses joues, la peau de ses bras. Il riait d'elle.

Pour une fois, ses lèvres lui sourirent. C'était la première fois qu'il montrait un sentiment. Et ça ne plaisait pas à Ariette. Elle ne pouvait pas bouger, complètement immobilisée sous le sort et son être tout entier souffrait de ces milliers d'insectes qui étaient rentrées dans son estomac à cet instant précis.

Ça bourdonnait, ça bourdonnait, ça gesticulait et volait là dedans. Ça la faisait hurler de douleur. Ça la faisait terriblement souffrir.

Elle ne voulait pas mourir comme ça.

Et lui, passa son nez sur son ventre dans un geste obscène et vulgaire. Ariette aurait tout donné pour pouvoir le repousser. Ariette ne voulait pas le quitter du regard, qui sait ce qu'il pourrait lui faire ? Il se pencha vers son visage, lentement, très lentement. Et ses lèvres se posèrent sur les siennes et ce fut le contact le plus horrible qu'elle n'eut jamais eu avec quelqu'un. Les mouches s'agitèrent et peut-être qu'ils déchireraient sa peau de l'intérieur ... pensa-t-elle, prête à accepter la mort.

Quand ses yeux bleus se rouvrirent, il n'y avait personne dans la chambre. Elle était seule et c'était comme si rien n'était arrivé, pourtant, elle était persuadée que cela avait été réel. Elle regarda ses jambes, ses bras, rien. Elle tâtonna son ventre, il n'y avait rien. Ariette se leva et se posta devant le miroir et tira sa langue. Elle était rose, saine et non pas noire comme elle l'avait imaginé un moment. C'était impossible, ça ne pouvait pas être un cauchemar, il lui avait lancé un sort. Elle n'arrivait plus à respirer. Les rideaux étaient tirés, le feu éteint, comme si elle s'était simplement endormie et n'avait fait que rêver de ça.

Coeur d'or (Première Version)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant