XV. Apaisée

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L'air est frais ici. Je contemple ce qui s'étend sous mes yeux. Le clapotis de l'eau à mes pieds apaise mon âme, calme mes peurs et la tempête incessante du flux de mes pensées. Sur le petit ponton en bois mort, seule ma sombre silhouette solitaire transparaît dans le tableau autour de moi comme unique être sur cette terre. Quelques arbustes qui ont perdu leur moindre feuille, ainsi dénués de vie mais pourtant si beaux semblent m'observer. C'est ce décor idyllique m'accueillant qui verra donc ma fin. C'est une si belle image. Mon profil noir, sur ce pont à moitié détruit surplombant une eau grise et calme, admirant le matinal spectacle s'offrant à ma vue, humant les effluves de la nature et de l'eau. Yeux fermés, paumes tournées vers un ciel encore pâle, rosé mais néanmoins empli de douceur. Je profite de ces derniers instants de paix éphémère terrestre avant de goûter à l'accalmie éternelle.
Je rejoint le bord, saisi quelques lourdes pierres dans mes mains abîmées. Elles sont rugueuses au fond de mes paumes. Je les entasse dans mon sac à dos noir, le mets sur mes frêles épaules. Sa lourdeur est telle que je me sens presque ancrée au sol. L'hésitation n'a plus de place dans mon esprit, je sais ce que je veux, mon seul objectif se trouve quelques pas plus loin, au bout de ce fragile petit ponton. Mon regard balaie une dernière fois le monde réel, peut être inconsciemment en quête d'une quelconque raison de faire marche arrière. Mais non, je n'ai pas de regrets. Je m'élance, cours, je vais m'envoler, la liberté caresse ma peau, saisi mon corps. Un saut, et me voilà dans la quiétude de l'eau, si froide et si brûlante à la fois. Elle n'est que silence et sérénité, elle est sourde et elle m'entoure de toute sa présence. Non, aucun regrets. Je souris, un réel apaisement se diffuse dans mon coeur. Je me laisse guider vers le fond de l'eau noire. Il n'y à pas une once de panique dans mon corps. L'air me manque, mes poumons brûlent, mais cela m'est presque agréable. Mes membres s'engourdissent de plus en plus, la vie me quitte, le repos éternel commence, le seul but que j'ai pu avoir dans ma vie, mon unique objectif est enfin atteint.

Écrit le 13/01/20

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