Chapitre 7 : Le nouveau

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A 3h30, je me levai, m'habillai et allai réveiller le groupe pour partir. Quand nous fûmes tous debout, je vérifiai que tous les appareils étaient chargés et que les boussoles fonctionnaient correctement. Nous remplîmes tous nos sacs de nourriture et de vêtements propres, remerciâmes le chef de nous avoir accordé la nuit, et partîmes au dehors.
Je regardai la ville : elle n'était pas plus différente que Billings. Bâtiments démolis, voitures cabossées, ville détenue par la végétalisation.
Quand nous arrivâmes - après une demi-heure de voiture - dans l'immense bâtiment de pierre aux vitre ravagées, je fis un pas en arrière : je ne me sentais pas à l'aise, et j'avais la désagréable impression d'être observée. Nous prîmes tous la direction des pistes d'avion. Je m'approchai des toilettes de la salle d'attente, armée de ma mitraillette. J'enjambai une valise au sol et la porte se referma aussitôt sur mon passage. Avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, je sentis une main se refermer comme un étau sur ma bouche. La personne alluma une lampe-torche et la pointa vers elle. C'était un bel homme aux cheveux aussi sombre que les ténèbres, et aux yeux aussi bleus que l'océan. Il était plutôt grand (Assez même, je me tordais le cou pour le regarder dans les yeux !) et musclé, et sa poigne ferme et sûre.
Il me dévisagea de haut en bas et brandit la lumière sur mon visage. Pendant une longue minute, ni l'un ni l'autre ne dîmes quoi que ce soit. Il regarda à travers les trous du mur. Quand je tournai la poignée pour sortir, ce fut à ma grande surprise qu'elle était verrouillée. Je me tournai vers l'individu et dis :
- Laissez-moi sortir.
Il détourna le regard et le planta sur moi.
- Pourquoi ? Pour que vous vous fassiez dévorer par ces bêtes au dehors ?
- De quel droit me retenez-vous prisonnière ici ? sifflai-je. Laissez-moi sortir !
Sur ce dernier mot, je pointai mon arme vers son visage. Il ne cilla pas et me toisa de la tête aux pieds.
- J'ai entendu dire que vous étiez à la recherche d'un sérum contre le virus... Laissez-moi vous accompagner.
Il suivit cette phrase d'un large sourire.
- Si vous voulez, répondis-je, mais laissez-moi sortir.
- Vous ne risquerez pas de sortir si vous poussez au lieu de tirer la porte.
Une fois sortie des toilettes, je rejoignis mon groupe qui était au dehors. Hillary m'informa que Tom, le pilote, avait trouvé un avion en bon état.
- Qui est-ce ? demanda Sky durement derrière moi.
- Il veut venir avec nous, déclarai-je en grimpant les marches de l'appareil. Il s'appelle...
- Asher Hudson, compléta ce dernier.
Sky hocha la tête et monta à son tour.
- Toi, dis-je à l'attention du nouveau, tu viens avec moi.
Une fois que tout le monde fut dans l'avion, Tom put manœuvrer et nous voilà partis dans les airs.
Seul le bruit du moteur se faisait entendre dans le silence des cieux. Les nuages remplissaient l'immensité de l'horizon, et quelques fois, un fin filet d'air causé par un trou dans le hublot s'écrasait sur mon visage. Le ciel dragée était tacheté de barbe-à-papa blanches. C'était un paysage de rêve et de cauchemar, dénudé de tout sentiment. Pas un mouvement, pas un bruit. Pas un oiseau, pas un avion. Le silence olympien résonnait dans ma tête comme le gong. Ce ciel inconnu, insondable et mystérieux abrite les mystères et envoûte les étoiles perdues. Le ciel est imprévisible. En quelques heures, il peut passer du calme plat à l'ouragan enragé.

Observant les profondeurs du ciel, je ne vis pas tout de suite que Asher s'était assis à mes côtés, les jambes calées contre le siège de devant.
- On risque de passer un petit bout de temps coincés sur le même avion, ça te dirai de parler ?
- Sauf si je te balance par-dessus bord avant, répondis-je sérieusement.
Il sourit et plongea sa main dans un paquet de chips trouvé dans un porte-bagage.
- Je ne sais même pas comment tu t'appelle...
- Alexis, dis-je en tournant la tête. (Après quelques minutes, de silence, je repris la parole :) Je pense que tu as dû t'en rendre compte, mais je n'ai pas confiance en toi. Fais tes preuves... en me passant une chips, je meurs de faim et je n'ai pas mangé depuis l'aube.
Il émit un rire et m'en tendit une.
- Qu'est-ce que tu rêvais de faire quand tu étais enfant ? dit-il en fixant l'horizon.
Je soupirai.
- Je voulais partir à l'autre bout du monde... Voilà qui est fait, mais pas vraiment dans les circonstances que j'aurais aimé. Et toi ?
- Devenir astronaute, et partir sur Mars. Un vrai rêve de gamin, et vu la crise actuelle, je ne suis pas sûr que ce soir très prochainement possible. Qu'est-ce que tu va faire une fois que tout cela sera fini - si ça finit un jour - ?
- Je ne sais pas... Avant, j'étais aide animalière, mais je faisais pas grand chose. Peut être que je vais continuer, ou partir dans totalement autre chose. Et toi ?
- J'étais barman mais mon bâtiment à été détruit alors, je en sais pas... J'ai vu que tu avais un tatouage, ajoute-il en désignant l'intérieur de mon avant-bras. Qu'est-ce que c'est ?
- Tu poses beaucoup de questions je trouve... Mais c'est une boussole : j'aime voyager. C'est aussi assez symbolique pour moi : mon frère est mort en mer ; il avait perdu sa boussole et s'est noyé. On n'a jamais retrouvé son corps.
Il prit soudain l'air navré.
- Oh, je suis vraiment désolé...
- Non, ne t'inquiète pas, ça fait longtemps il est mort quand j'étais bébé, je n'ai aucun souvenir.
- Et sinon, reprit-il après un temps, t'as l'air fit, tu fais beaucoup de sport ?
Je repris une chips et la fourrai dans ma bouche.
- Oui pas mal. Et toi ?
- Ouais, à mort, ça se voit pas ?
Il souleva le haut de son t-shirt qui laissa apparaître un ventre plat et un peu musclé mais sans plus. J'éclatai de rire et m'essuyait la bouche grasse et pleine de miettes. 
Je regardai l'ordinateur : ça ne fait même pas quinze minutes qu'on est partis... Je tournai la tête vers Asher.
- Pourquoi tu étais caché dans les toilettes de l'aéroport ?
Il avala la nourriture, s'essuya la bouche d'un revers de la main et me regarda.
- Tu as la réponse dans ta question : je me cachais, j'essayais de survivre. Je venais de quitter le bunker de New-York ; j'en avais marre de tous ces gens dépressifs. 
Je hochai la tête regardai le ciel. 
Depuis le début du périple, je repensai à ma mère. Qu'est-ce qu'elle était devenue ? Est-ce qu'elle était toujours en vie ? Et Damon, mon meilleur ami qui m'avait attaquée sans pression ? Comment allaient-ils ? Je ne savais pas, je ne saurais probablement jamais. Ils n'étaient peut-être désormais qu'un cadavre déchiqueté, ou un lycanthrope assiégeant un bunker, sans aucune empathie ni compassion.
Je soupirai, et fermai les yeux.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 09, 2020 ⏰

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