Léxandre Moreno - Tome 3 Emprise

Chapitre 15 - Léxandre

Je dépose Jules à son travail. Après le restaurant, je l'ai raccompagné chez elle. Pour la première fois, j'ai franchi le seuil de sa porte.

Son appartement est petit, bien entretenu. Il y a d'ailleurs une différence entre le sien et le mien. Je suis seul. Elle non. Elle a une petite tortue qu'elle dit naine. Son prénom est Madeleine. Je l'ai observé pendant que Madame se rafraîchissait. C'est une tortue quoi. Rien de particulier. Mais Jules semble très attachée.

Je suis le plus mal placé pour la comprendre. Je n'ai jamais eu d'animal de compagnie. M'attacher à autre chose qu'un être humain m'est inconnu. Un jour, peut-être que je franchirai le cap. Un petit chat ou un rat me tenterait bien. Après, il faut de l'argent pour les entretenir et du temps. Ce dont je manque cruellement à ce jour.

Entrer chez Jules a été une nouvelle étape. Elle m'a fait confiance, m'a divulgué son adresse. Cela prouve qu'elle a espoir en nous. Et que, à contrairement aux dires de Louis, elle convoite autre chose que du cul.

Nous avons passé la nuit ensemble. Un moment hors du temps. Il renforce mes sentiments naissants et mes profonds désirs.

Jules se retourne. Sa main se lève et m'adresse un signe discret. Je lui souris, dans ma voiture, prêt à voir Louis. Lorsqu'elle pénètre dans l'établissement de ce connard d'Émilien Weits, je mets les gazes.

Je savais qu'elle bossait pour lui. Mais ce sentiment haineux est plus fort que moi. Il connaît nos secrets. Il sait les trafics que Louis commet et que je suis impliqué. S'il balance tout à Jules, je la perdrais. Pire, Louis pourrait commettre d'horribles actions pour qu'elle se taise. Parce que j'ai bien compris que son business est plus important que sa propre sœur. En ayant ça dans le crâne, je sais aussi que ma vie lui est égale. Mieux vaut être dans son camp. Avoir Louis contre soi est du pur suicide.

Je roule jusqu'à sa voiture. Il m'a contacté ce matin pour une vente. Son amante et lui ont une séance de baise. Alors il me demande de livrer la drogue à un type dans un cimetière. Il me dévoilera le plan une fois chez lui. Si nos téléphones sont sur écoute, nous sommes déjà foutus !

D'ailleurs, j'attends toujours des nouvelles de Stéphane. Sa voiture grise est hors de ma vue depuis des jours. Soit il m'a lâché, soit je suis aveugle. Dans tous les cas, je préfère garder l'œil ouvert. Je ne suis pas à l'abri d'une mauvaise surprise.

Ma voiture garée dans l'allée, derrière celle de Louis, je prends soin d'envoyer un dernier SMS à Jules. Je lui souhaite une bonne journée. Sans attendre sa réponse, je range le téléphone et quitte mon véhicule.

La température fraîche est plaisante. Le ciel est dégagé et un radieux soleil se dresse fièrement dans le ciel. Ce début de décembre est agréable. Je ne supporte pas l'hiver. La neige m'agace. Il fait nuit bien vite. Pires, le froid et le verglas !

Un hurlement déchire le silence. Je le reconnais entre mille. Celui de Rachel. Mon cœur bat à vive allure. Je suis sur le qui-vive et m'approche à pas de loup de la porte. Quand un nouveau cri retentit, j'ouvre sans attendre et plonge dans le couloir. Des pleurs sont désormais audibles. Ce que j'entends me retourne le ventre.

Je dépasse l'encadrement du salon et découvre une scène plus qu'étonnante. Limite flippante.

Rachel est à terre, sa robe bleue relevée sur sa poitrine. Des larmes roulent sur ses joues, tandis que des cris s'échappent de sa gorge. Elle souffre. Je le ressens. De là où je suis, je vois mal ce qu'il se passe. La moitié du corps de Louis cache ces faits et gestes.

Louis est à genoux, de dos ; habillé et concentré dans ce qu'il entreprend.

Un éclair traverse mon esprit. Je comprends ce qu'il se passe.