Theater Lessons

Chapitre 3 - Le casting

« L'amour, un délicat enfant ! Il est brutal, rude, violent ! Il écorche comme l'épine. » Roméo et Juliette, William Shakespeare

Je n'ai jamais été ce genre de personne trop ambitieuse. En fait je n'ai jamais été « trop » hormis quand il s'agit de fringues. Je ne suis pas trop exubérante. Je ne suis pas trop sociable. Je ne suis pas trop. Je n'aime pas les choses qui me font sortir de ma zone de confort, par prudence et pudeur sûrement. Mais je savais aujourd'hui que j'avais dépassé les bornes de mes limites en constatant que le casting aurait lieu demain. Les deux semaines étaient passées beaucoup trop vite. Je n'avais même pas eu le temps de réaliser la connerie que j'avais faite en acceptant de m'inscrire à ce casting sur leur site internet de mes deux. Ca ne me ressemblait pourtant pas d'être impulsive.

- Tout va bien Rosie ? Tu as l'air songeuse.

Alexander sembla me sortir de ma transe angoissante.

- Ouais, c'est ce fichu casting qui me prend trop la tête !
- Rosie ! Ne le prend pas comme quelque chose de négatif alors que ça ne l'est pas ! Tu vas probablement adorer si tu es prise.
- Si je suis prise, comme tu dis ! Avant cette étape je vais probablement devoir me ridiculiser devant un tas de gens ! Et particulièrement devant cet Edward Redmayne aca l'incroyable prof de théâtre.
- Qu'a-t-il de si incroyable ce professeur pour t'angoisser à ce point ?
- Eh bien figure toi que je me suis renseignée sur la sphère magique de l'internet, et qu'il a joué le rôle incroyable de Marius dans les Misérables, et qu'il avait déjà reçu plusieurs oscars de meilleurs acteurs dans de nombreuses scènes de théâtre. Je suis sûre que c'est un être impitoyable ! M'époumonai-je.
- Tu n'en sais rien ! Ne juge pas trop vite les gens comme ça. Et au pire qu'est ce que tu y perds ?
- Ma dignité ? Scandai-je.
- La vie est faite pour prendre des risques très chère Marshall ! Et que tu te pourrisses la vie ou non à imaginer les plus sombres des scénarios, ça ne changera rien au résultat final. Quoi qu'il arrive, ce qui doit arriver, arrivera !
- Hm. Grommelai-je.
- Mais si tu veux un bon conseil d'ami, le bon attire le bon, alors plus tu penseras positif, plus le résultat final le sera. C'est la loi d'attraction ma petite ! Alexander brandit son poing en l'air, victorieux.
- Oh je t'en prie !
- Bon allez au lieu de rouspéter fini moi tes croquis. Ria le brun.

Heureusement qu'il y avait un point positif à tout cela ; j'adorais mon stage. Alexander me laissait imaginer des croquis en rapport avec leur univers futuriste,  d'une collection féminine. Me sentant concernée à deux-cent pourcents par ce travail, j'y mettais tout mon cœur. Ma première idée était une combinaison cargo rouge et noire. Le pantalon serait style cargo streetwear avec de nombreuses poches, et le haut n'aurait qu'une bretelle partant de biais. Une fois les croquis à la main terminés, je m'attelai à les dessiner sur ma tablette graphique.

**

Une fois rentrée à la coloc, je m'emparai de mon iPhone pour appeler Tom, mon meilleur ami. Peut-être saura t-il me calmer dans mon élan de tourmente.

Tom et moi, ça avait été un véritable coup de cœur amical lorsque je suis rentrée en année préparatoire en arts appliqués, il y a maintenant cinq années de cela. Tout a commencé le jour même de la rentrée. J'étais toute stressée à l'idée de ne pas réussir à me faire d'amis. A ce moment là, Laurie avait obtenu son baccalauréat mais avait dû arrêter ses études, et c'était vraiment très dur à supporter comme situation. Je me souviens n'avoir pas réussi à rentrer mon grand carton à dessin dans ma pochette format raisin. Mais heureusement Tom était près de moi, et je lui avais, bien timidement, demandé de l'aide. Il avait tellement rigolé face à cette situation, car je me débattais comme une ravagée avec ma pochette. Depuis, on ne s'est plus jamais quitté. Il a toujours été un véritable soutien moral pour moi au travers de toutes les épreuves difficiles que Laurie et moi avions eu à traverser. Et au grand damne de ma mère, il était dans la friendzone. C'était selon elle, "le gendre idéal". Il est vrai qu'au tout début de notre relation, Tom m'avait timidement fait part de ses sentiments ambigus envers moi, mais qui ont vite été balayé par le fait qu'ils n'étaient malheureusement pas réciproques. Je sortais de ma dernière relation à ce moment là, et il me fallait retrouver ma confiance en moi, et en les hommes. Tom a très bien compris, et finalement depuis, il a eu quelques conquêtes, dont une qui lui avait brisé le cœur.