Les élus d'un autre monde sous ce même ciel - L'école des donneurs

Une rencontre

Une fois en ville, Monsieur Joye m'interpelle :

<<- Bien. Alors, selon notre accord, mène-nous chez toi.

- Oui... sortez d'abord de la ville en direction du lycée.>> Nick me regarde intrigué. C'est vrai que je lui avais dit habiter non loin de la boulangerie. Il va savoir que je lui ai menti. Je le regarde et souffle un "désolée" l'air contrit pour lui affirmer la véridicité de mon piège du mois dernier... et de toutes les fois où il m'a raccompagné vers la ville, c'est-à-dire pas mal de fois. Il fait une mou capricieuse avant de se reprendre.

<<- Bon. Au début, tu ne voulais pas nous dire où tu habitais. Comment se fait-il que maintenant tu acceptes ?

- Je ne vous connaissais pas. Et puis... maintenant je vous fait confiance et....

- Et ?>> 

J'ai failli leur dire pour la maison ! En soi, ce n'est pas grave. C'est une petite maison, éloignée de tout, exposé aux cambrioleurs et autres, pas loin des animaux sauvages, peu sécurisée, avec beaucoup de bois qui peut s'enflammer, et peu branlante... mais sinon, tout va bien ! Je lève les yeux aux ciel, épuisée de ma propre stupidité. Les jumeaux paraissent rire... au moins, ils ne me questionnent pas davantage.

<<- Tournez à gauche. De nouveau à gauche. Attention, le virage est serré. Maintenant à gauche puis à la première à droite. Ensuite, continuez pendant deux minutes et vous tournerez à gauche. De toute façon, c'est la seule maison ici, vous ne pouvez pas la louper.>> 

Encore une fois, j'ai trop parlé. J'étais sûre que les jumeaux réagiraient comme ça : quand j'ai dit "la seule maison ici", ils se sont regardés, m'ont regardée, soucieux, les sourcils froncés. Je n'y peux rien moi ! Je n'ai pas choisi le lieu où j'habite ! Et de toute façon, ça me va très bien.

Une fois arrivée à bon port, Nick paraît pâle et encore plus soucieux.

<<- Nick, ça va ?

-Ouais ouais... il n'y a pas de loups ici au moins... si ?>> 

Je me fige à cette question. Je réponds le plus honnêtement possible face à cette demande plutôt... compliquée :

<<- Heu... il n'est pas censé... les loups sont tous loin dans les montagnes, éloignés des humains, ou en captivité... alors, normalement il n'est pas censé y en avoir. Pourquoi ? Tu en as peur ? Ma mère n'en a jamais vu... ou alors elle ne m'en a pas parlé.>> 

Je n'ai absolument pas menti ! J'ai dit que des choses vraies ! J'ai simplement, omis quelques détails. J'entre et je me retiens avant de faire une nouvelle gaffe :

<<- Wa... Woaw... ça sent bon ! Maman ! Des visiteurs !>> 

Heureusement que ça sentait bon, sinon, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Je me vois mal leur expliquer pourquoi je lance un mot étrange comme "walliona" en entrant chez moi. Je fais entrer les Joye, curieux de voir l'intérieur chaleureux, contre toutes apparences extérieures. Ma mère entre dans la pièce principale, les mains pleines de peintures.

<<- Tu faisais des cartes ?

- Oui. Bonsoir, excusez-moi de ma tenue, je reviens, je vais juste me laver les mains. Asseyez-vous, le canapé et là-bas.>> 

Elle me regarde insistante... Mince ! J'ai complètement oublié de la prévenir ! Elle me lance un regard noir tandis que je pince les lèvres. Je lui souffle un << Ma faute>> avant d'aller poser mes affaires dans ma chambre et de revenir avec quelques petites choses à grignoter en guise d'apéritif.