.6.

57 2 0
                                    

"Je t'aime à l'imparfait"

Aimer et s'aimer, une lettre les sépare, un être les sépare.

L'amour est le sentiment le plus noble qui puisse exister pourtant les sentiments qui l'accompagnent ne sont pas tout aussi saints. Aucun sentiments n'est aussi fort que l'amour, c'est la drogue la plus intense et si elle est mal dosé ça peut faire des dégâts.

J'ai toujours comparé ça à l'anesthésique : il te fait perdre tous tes sens mais c'est justement ça qui fait que t'en prend, mais s'il y en pas assez on souffre et s'il y en a trop, on plonge dans un coma artificiel.

La première personne à remplir notre fiole est la mère, son ventre est le premier endroit à nous abriter, elle nous comble d'amour avant même d'avoir vu le jour, elle a vu son ventre grandir et ses nuits blanchir sans jamais se plaindre. On est sorti de son ventre et les peines ne faisaient que commencer, nos cris et pleurs incessants, notre fragilité, notre première dent, notre première parole, nos premiers pas, notre premier jour d'école ...
Le reste de la famille vient alors y rajouter quelques gouttes, le père qui veille à ce que la famille ne manque de rien, les frères et sœurs qui se sont trouvés un nouveau jouet mais qui veillent à le protéger, les tantes et oncles qui viennent en aide aux parents et les grands parents qui revivent leur maternité/paternité.

Et puis un jour on sort du cocon familial pour faire face au monde extérieur, on fait de nouvelles rencontres et on connaît une autre forme d'amour : l'amitié. On a droit à nos premiers délires, nos premiers potins, nos premières chamailleries aussi. Les années passent et on est toujours dans notre innocence, toujours à se réveiller par des caresses de notre maman, des câlins de notre papa et des claques de notre frère (signe d'affection), on se prépare à se rendre à l'école, excité de revoir nos amis et leur raconter notre belle soirée passé à regarder notre téléfilm préféré ou à jouer à notre jeux favori.

Jusqu'au jour où des boutons commencent à apparaître sur notre visage, notre corps se développe, notre croissance s'accélère et on commence à piquer des crises... des crises d'adolescence. On commence aussi à avoir des rapports différents avec les personnes, tout le monde n'est plus le bienvenu, on désigne avec qui on arrivera à s'entendre et avec qui ça ne va pas le faire, on découvre l'autre sexe d'une manière différente, on a de bons délires avec certains et on sent le rouge monter à nos joues à l'approche d'autre. C'est bien beau tout ça non ?!

Malheureusement je suis obligée de mettre un "mais" quelque part. Encore un coup de cette drôle de vie.

Nous avons tous une fiole d'amour certes avec la même capacité de stockage, mais des fois elle se brise et on peine à la remplir puisque la fracture laisse passer des fuites et cela arrive quand la vie nous arrache notre source et nous condamne à errer comme des êtres sans âme.
Ça peut être une mort, un abandon, une trahison peu importe, ce qui compte c'est que la personne n'est plus là et le sentiment qu'elle procurait se voit remplacer par du vide alors on cherche à le compenser, parce qu'on en a besoin.
Pour certains cela se manifeste par une relation toxique avec ce qui est matériel : l'argent, l'alcool, la drogue et pour d'autres par  des sentiments que l'on pourrait désigner comme antonyme de l'amour : la rage, la haine, la vengeance.
C'est ironique de se dire que tout ces ravages sont le fruit de l'amour. Il n'y a qu'à relire l'histoire de l'humanité pour se rendre compte des atrocités commises par amour : Kaiss et
Leyla, la première guerre mondiale, Jordan Belfort , ça peut être un amour pour une personne, pour un pays ou pour ce qui brille.

Par amour on peut mourir, tuer ou ravager le monde entier. L'amour est une faiblesse qui peut nous faire perdre le contrôle de soi même. L'amour est une force qui peut nous motiver à atteindre nos plus gros succès.

Il est 6h du matin, c'est le Ramadan, l'occasion parfaite pour prier nos morts et le paradis regorge de personnes que je souhaiterais rejoindre, mes grands parents, mes oncles, mes tantes, mes cousins, mes amis rahimahum Allah.

Mais en parlant d'amour dans le sens courant du terme, mon esprit se dirige vers une personne en particulier et pour la première fois de ma vie j'éprouve ce besoin d'en parler publiquement, à mes proches qui l'ignorait, aux quelques peu d'amis à qui j'en ai parlé et aux étrangers qui passent par la même épreuve.

J'ai connu mon premier amour assez jeune, un amour d'enfance me diriez vous, peut être bien mais qu'est ce que ça peut faire, lorsqu'on aime, on aime et puis c'est tout. Un beau brun au sourire éclatant, un musicien au corps d'athlète, Yanis. Il a été le premier à me faire chavirer le cœur et à me faire découvrir des sensations dont j'ignorais l'existence, des battements de cœur accéléré, des papillons dans le ventre, une maladresse dans les faits et gestes, son nom a été le premier à figurer dans mon journal intime.
Ses souvenirs défilent en boucle dans ma tête, son regard, son sourire, ses paroles. Et puis ce flash qui vient effacer toute lueur de mon esprit, cet accident, j'entends un bruit strident dans ma tête, assez désagréable, des images de coma, une semaine qui me semblait être une éternité, un coup de souffle, une réanimation, un teint pâle, un sourire forcé, un long serrage de main qui semblait comme .. un adieu, un regard vide, un silence qui pouvait en dire long et enfin un coup de fil, le 24 avril 2014, j'y ai pas cru mais pourtant c'était vrai, un ange avait rejoint les cieux.

Tu n'avais que 16ans et pourtant tu étais parti sans prévenir, il te restait tant de chemin à parcourir, il n'y'a pas d'âge pour mourir.

Les jours, les semaines et même les mois qui ont suivi était maussade, je perdais goût à tout ce que j'associais jadis à la plénitude, plus rien n'allait dans ma vie, j'avais du mal à avancer et l'envie de te rejoindre me submergeait. Ton absence me ronge comme une tumeur, je me sentais dépourvu de toute sensation de vie.
Ma fiole était déchargé, brisé, irréparable, j'avais l'amour de ma mère, mon père, mon frère mais chacun occupait son rôle alors je me suis tourné vers le seul dont l'amour pouvait me faire oublier tout le reste et pour qui je vivais réellement: Allah le tout puissant.

Je priais Dieu deux fois plus qu'avant, je priais pour qu'il t'ouvre les portes du paradis et pour que tu y résides éternellement, je priais pour que ta vie dans l'au-delà soit encore meilleure que celle ici bas, je priais pour espérer te revoir dans l'au-delà auprès de Allah, je priais pour qu'il nous accorde sa clémence, je priais pour qu'il te pardonne tes péchés, je priais pour que tu reposes en paix.

T'es parti mais je t'oublie pas, je n'oublie rien, je m'habitue c'est tout. J'ai passé ces années à serrer les dents et faire semblant même si c'est dur et que ça me tue.
Sache que rien ne pourra te remplacer, peu importe le temps qui passe, j'aurais toujours cette impression d'avoir le cœur cassé.

Je vis aujourd'hui avec tes souvenirs et l'idée que tu aies quitté ce monde me semble de plus en plus réaliste au fil des temps. J'ai arrêté de vivre ta mort comme une tragédie et je continue d'avancer mais sache tu occuperas toujours une part de mon esprit.
Repose en paix, Yanis.

Histoire sans finOù les histoires vivent. Découvrez maintenant