Sous les regards consternés de mes « camarades de pension », je marche en suivant le chef du commando ; résignée à démarrer une nouvelle vie, à peut-être avoir un avenir pas si pourri après tout. Le commando est tout autour de moi, résigné à me « protéger », et reste, malgré la mort du lézard, en position offensive, de sorte à pouvoir gérer une autre attaque si il y en a une ; selon les soldats. Nous sommes enfin en dehors de l'orphelinat. Ouf ! Je suis enfin loin de la pression des regards silencieux de mes anciens camarades de pension autour de moi, et de la pression en général. Je ne saurais dire pourquoi, mais étrangement, ce n'est qu'avec le chef du commando que me sens vraiment bien, et non mal à l'aise. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression qu'on a une sorte de lien, lui et moi. Mais bon. Ce n'est peut-être qu'un effet de mon imagination, donc je décide de ne plus y penser. Pour le moment.
Nous arrivons à destination. Et là, je vois la plus belle « machine » de toute ma vie :
Trente mètres de long, sur dix mètres de larges et cinq mètres de hauteur, la carlingue blanche et noir par endroits, des moteurs noirs contrastant avec la carlingue, et un cockpit de couleur blanche et noir transparent. Un vrai bijou ! Le commandant semble avoir entendu mes pensées, car il me dit :
« -Une merveille de technologie, ce vaisseau. N'est-ce-pas ?
-Oui, lui dis-je. Quel est le nom de cette beauté ?
-A vrai dire, il n'a pas de nom. Juste une immatriculation, me dit-il. Mais si tu veux, tu peux lui en donner un.
-Raptor.
Je n'ai pas réfléchi une seconde, tant la réponse est évidente à mes yeux.
-Très bien. Sacha, dis bonjour à Raptor. »
Pour la première fois depuis des mois, j'arrive à esquisser un sourire sans difficulté. Décidément, même si je ne connais pas le nom du chef du commando, même si je ne sais rien de lui, c'est mon seul vrai ami.
Un des soldats du commando arrive vers la rampe d'accès du vaisseau, qui est fermée. De la même manière que le commandant a fait apparaître la lame rouge sang, le soldat fait apparaître un clavier rouge sur la pièce d'armure de son avant-bras. Il marque quelque chose dessus, et là je me rends compte que le clavier n'a pas de lettres ni de chiffres classiques, mais des signes inconnus, qui ont l'air d'être d''origine extraterrestre. La rampe d'accès au vaisseau s'ouvre en descendant vers le sol, laissant voir l'intérieur de l'appareil volant.
« -Passe en premier », me dit le chef du commando. J'obéis donc, et j'entre dans le vaisseau, succédée des soldats du commando. L'intérieur est vaste : il y a trois sièges de passagers des deux côtés, et une allée au milieu menant à une ouverture technologique permettant d'accéder au cockpit de la superbe machine.
« -Assieds-toi », m'ordonne un soldat à la droite du chef de l'équipe, qui est au milieu de l'allée, calé contre la rampe d'accès qui s'était refermée quand le dernier soldat est monté dans l'appareil. Je m'assois donc, lui obéissant. Deux des soldats du commando vont dans le cockpit, dont la porte se referme en se matérialisant dans l'ouverture. Le moteur du vaisseau démarre, et, voyant les autres soldats et le chef du commando le faire, je m'accroche à la rambarde qui se tient au-dessus de moi. Je sens les turbulences du vaisseau décollant faisant vibrer mon corps, et je sens l'excitation me gagner. Le vaisseau n'a pas de fenêtres, je ne peux donc pas voir le paysage, même si je sens à présent que nous sommes dans les airs. Je demande, plus à moi qu'aux autres :
« -Où allons-nous ?
-Tu le sauras bien assez tôt, me répond-il. Mais il faut que tu saches une chose.
J'ai hâte de savoir, donc je ne dis rien.
-Cet endroit, où nous allons... N'est pas vraiment... un endroit connu.
Comment ça, « pas vraiment connu » ?
L'endroit où nous allons... est dans une autre dimension, qu'on appelle l'Autre Réalité. C'est un peu comme le futur, mais déplacé dans une dimension alternative. Là où nous allons est dangereux. Surtout pour les personnes sans connaissance ni expérience du terrain. La plupart des personnes s'aventurant à découvert finissent souvent mal. Très mal.
Finalement, je n'ai plus très envie d'aller dans cette dimension alternative.
Mais nous t'apprendrons à survivre. Et quand nous arriverons, tu sauras enfin pourquoi nous avons besoin de ta carte SD. Il va falloir que tu me fasses confiance.
-D'accord, dis-je, mais comment voulez-vous que je vous fasse confiance si je ne connais absolument rien de vous, pas même votre visage ni même votre nom ?!
-Tu as raison, dit le chef du commando, presque en soupirant.
Sur-ce, il appuie avec son index et son majeur sur une partie de son casque blanc, au niveau de la tempe. Une ouverture apparaît alors à l'arrière du casque, assez grande pour qu'il puisse le retirer sans problèmes. Il l'enlève, et là enfin je peux voir le visage en chair et en os de celui qui m'a sauvée des griffes du lézard mutant : Il a la peau mate, le crâne chauve. Une barbe noire naissante apparaissant sur ses joues et sur son menton, ce qui lui va à merveille. Ses yeux sont d'un gris éclatant et en même temps coupant. Avec ses rides creusant ses joues et le dessous de ses yeux, il paraît plus vieux, plus fatigué.
-Je suis le commandant Jones, et je dirige l'équipe des soldats que tu vois en ce moment-même dans le vaisseau, avec nous. Mais tu peux m'appeler Mike, ça me met plus à l'aise. Nous allons atterrir. Prépare-toi au spectacle !
En effet, je sens les turbulences de l'atterrissage revenir, comme pour le décollage. Je me lève, la rampe d'accès s'ouvre. Et là je vois le plus beau et le plus triste spectacle de toute ma vie :
Un monde au ciel violet et au sol noir de jais, aux plantes hautes de trois mètres de haut d'un bleu pétant ou d'un gris métallique.
Un monde aux nuages d'un noir électrique, menaçants.
Un monde au bord de l'Apocalypse, frôlant la mort.
Et en face de moi, à peut-être une cinquantaine de mètres, une grande place au sol remplacé par de gigantesques plaques métalliques, d'un blanc pur. Un peu trop pur à mon goût, pas assez sale. Sur cette immense base métallique se dresse quatre grands bâtiments, eux aussi blancs, avec sur chacun d'eux un signe différent : une flamme, une dynamite, un lézard, et un serpent.
Au milieu des quatre bâtiments s'en dresse un autre, plus imposant, environ de la taille d'un immeuble de douze étages.
Et des soldats. Des soldats partout, des soldats avec la même armure blanche que Mike Jones et son commando. Il y a aussi de redoutables armes de guerre, des petites mitrailleuses aux énormes canons (à plasma, j'imagine) en passant par les mortiers et les snipers. Je vois des vaisseaux blanc et noir, armés de canons long et fins, décoller de derrière les bâtiments d'un blanc pétant et passer au-dessus de moi en formation serrée.
Une base militaire.
Pourquoi ont-ils besoin d'autant de soldats, d'armes et de vaisseaux ? D'ailleurs pourquoi cette base militaire est-elle là ?
« -Bienvenue dans l'Autre Réalité, me dit Mike, me tirant de mes pensées. Nous ne sommes pas sur une autre planète. Nous sommes cent ans dans le futur.
Voyant ma surprise, il continue :
-Cent ans avant l'Apocalypse que tu vois devant toi, des aliens du nom de Koan ont envahis notre planète. L'énorme lézard qui t'a attaqué en était un. Ils cherchaient quelque chose. Une relique, appelée le Prisme de la Réalité. Il est à l'origine de la réalité même, et il possède la capacité de la modifier, ou de la détruire. Imagine si les Koan arrivaient à l'obtenir. Imagine le chaos que cela provoquerai. C'est pourquoi nous sommes là. Si nous voulons avoir une chance de les battre, nous devons avoir les moyens nécessaires. Et ta carte SD. Je t'expliquerai quand tu te seras bien adapté à ce nouvel environnement pourquoi nous avons tant besoin de cette carte SD. Et je te ferai découvrir le chef de ton unité de combat. »
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T H E O T H E R R E A L I T Y : Quand la Fin prend le dessus
Science FictionSacha Lander est orpheline depuis l'âge de ses cinq ans. Elle déteste son orphelinat. Elle y mène une vie dure, jusqu'à que des soldats venus du futur lui sauvent la vie et lui donnent une mission : trouver l'objet à l'origine de tout, le Prisme de...