CHAPITRE V : SOUVENIRS ENTERRES

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Je me réveille dans un lit d'hôpital. Je me lève. Je suis en sous-vêtements. Je tourne la tête, et je m'aperçois qu'une robe blanche est posée sur mon lit. Je ne porte jamais de robe. Mais bon, je la mets quand même, histoire de ne pas me balader en sous-vêtements dans l'hôpital. Je ne sais pas comment je me suis retrouvée dans l'hôpital, mais ce n'est pas grave. Je sors de la chambre, puis j'avance dans le couloir, pieds nus. J'arrive devant une porte, et vu les bruits derrière la porte, j'en déduis qu'une femme vient d'accoucher. Je me sens mal. Je veux partir, mais mes pieds sont collés au sol, m'empêchant de m'en aller. Puis la porte s'ouvre, et plusieurs médecins sortent, avec un lit où une personne est couchée dessus, recouverte de la tête aux pieds d'un drap blanc. Les médecins s'arrêtent, se figent. Un coup de vent venant de nulle part soulève la partie du drap recouvrant le visage de la personne en dessous. Et je me rends compte que cette personne... est... ma... mère... Je me sens happée par une force invisible dans un trou se trouvant sous mes pieds, venant de nulle part. Et je tombe.

Je me réveille en sursaut, transpirante, cette fois dans mon lit du dortoir de l'unité Snake. Cette personne, dans mon rêve... C'était ma mère... Je sens mes yeux se mouiller. Je sens la tristesse m'envahir. Je me fiche de réveiller les autres. Je pleure. Je pleure abondamment, sans pouvoir m'arrêter. Je ne vois pas mes camarades me regarder soit avec de l'incompréhension, soit avec de la pitié mêlée avec de la tristesse. Puis, sans comprendre ce qui m'arrive, je me rendors, secouée de sanglots incontrôlables.

« -Sacha ? Sacha, tu m'entends ?

Je ne sais pas où je suis. Tout ce que je sais, c'est que la voix qui me parle est celle de Mike. J'ouvre les yeux, croyant à un autre rêve.

-Où suis-je ? Encore un rêve ?

-Non, les rêves, c'est fini. Nous sommes de retour dans mon appartement, et tu es couchée dans mon lit. Comment te sens-tu, me demande Mike ?

-Honteuse. Par rapport à ce qu'il s'est passé dans le dortoir, ce matin.

-Il n'y a pas de honte à faire des cauchemars, Sacha. Ni à pleurer.

-Alors vous savez... Pourquoi suis-je de retour chez vous, Mike ?

-Tutoie-moi, s'il te plaît. Nous sommes ici pour ta première séance visant à déterrer quelques indices qui nous permettraient de trouver le Prisme. Te sens-tu prête pour ça, aujourd'hui ?

-J'espère. Merci, Mike.

-Merci pour quoi ?

-Tu es la seule personne qui n'ait pas été soit agressive, soit malveillante envers moi depuis mon arrivée dans cette nouvelle dimension, dans ce nouveau monde.

« Tu me fais penser à mon père », voilà ce que j'aurai ajouté si j'en avais eu la force.

-Non, c'est moi qui te remercie, Sacha. Merci d'avoir accepté de quitter tout ce que tu connaissais pour cette noble cause. Prête ?

-Prête. »

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Il fait noir. Je ne vois rien. J'entends la voix de Mike me dire :

« -Sacha, bienvenue dans ce que j'appelle le monde des souvenirs enterrés. Tout ceci n'est bien sûr que dans ta tête.

-Comment me suis-je retrouvée ici ?je lui demande, anxieuse.

-Tu ne t'en souviens pas, mais il y a deux minutes je t'ai fait boire un liquide qui a influencé la partie de ton cerveau gérant tes souvenirs, et en l'occurrence, ceux que tu as oublié. Tu te trouves donc dans tes propres souvenirs. Enfin, pour le moment, tu es au seuil de tes souvenirs. Un peu comme dans le lobby d'un jeu vidéo. Il suffit que tu me guide dans ce lobby, et je t'amènerais dans le souvenir que tu veux. Et si ça peut te rassurer, il n'y a aucun risque de dégradation mentale. Bon, quel souvenir serait susceptible d'être porteur d'informations concernant le Prisme et son emplacement, selon toi ?

-Peut être... Quand je suis née ? je propose. Le jour ou la semaine de ma naissance ?

-Commençons le jour de ta naissance. Quand es-tu née et à quelle heure ?

-Le 27 mars 2006, à 00h05, je lui réponds, espérant que cela fera avancer notre enquête dans mes souvenirs.

-Merci bien. Maintenant, ne t'étonne pas si tu es aveuglée par une lumière blanche. »

Puis tout devient blanc, pendant au moins cinq secondes. Ces cinq secondes m'ont paru être une éternité. Quand le nuage de lumière intense se dissipe enfin, je me trouve dans la chambre d'hôpital de ma mère. Elle est allongée dans son lit, un bébé dans les bras. Elle lui caresse la tête avec amour. Même si je sais que ce n'est qu'un souvenir, la vue de ma mère encore en vie, presque une demi-heure avant sa mort me brise le cœur. Mike, qui semble avoir deviné mes émotions, me dit d'une voix douce : « Sacha, ce n'est qu'un souvenir. Rappelle-toi notre but ici. S'il te plaît. »

Alors je me relève, tête haute. J'essaie de ravaler au maximum ma douleur, et je commence à regarder autour de moi à la recherche d'un indice en prenant bien soin de ne pas regarder ma mère. Je ne vois rien qui pourrait me donner un indice concernant la position du Prisme de la Réalité, puis je me rappelle de quelque chose d'intéressant :

« -Mike, mon père !

-Tu es sûre ? Si c'est le cas, il devrait arriver d'une minute à l'autre. »

Je n'ai donc plus qu'à attendre.

Cinq minutes plus tard, à cause de l'attente, je suis plongée dans mes pensées, quand le bruit de la poignée de la porte me tire de mes réflexions. Je me lève d'un coup, manquant de m'assommer, même si tout cela n'est que dans ma tête. Et sur l'écran de Mike. Je me mets donc à rougir de stupidité, imaginant Mike rire derrière son écran. Puis, la porte commence à s'ouvrir, et je reprends mon sérieux. Et c'est là que je le vois. Mon père. Il a l'ai si jeune... Mais si fatigué en même temps. Il a une coupe de cheveux de style militaire, une veste en cuir noir, un jean moulant noir, des baskets noir et blanc. Je le vois qui se penche vers moi, et qui me donne la carte SD que je n'ai toujours pas pu récupérer lors de mon arrivée dans l'Autre Réalité. Puis il me dit à moi et à ma mère qu'il doit partir, et qu'il est désolé de ne pas pouvoir rester. Puis il nous dit... Qu'il nous aime. Et il sort de la chambre. Il ferme la porte. Je m'apprête à dire à Mike de me sortir de ce souvenir, que ce n'est pas le bon, quand un détail retient mon attention : Ma mère me passe le collier autour du cou, et, au moment où la carte SD touche ma peau, elle se met à briller d'un faible halo bleu. Ma mère me dit une chose que je n'oublierai sans doute jamais : « Tu as une mission, Sacha. Trouve le Prisme. Tu es la seule à savoir au fond de toi comment faire. » Puis, sûrement grâce à Mike, le brouillard aveuglant revient. Je me cache les yeux avec mon avant-bras pour me protéger...

---

« -Mike, tu as vu ce que j'ai vu ?!je lui demande, une fois de retour dans son appartement, folle d'espoir, et aussi intriguée.

-Sacha, calme-toi, s'il te plaît. On dirait un générateur de Nitro en surcharge. Et oui, je l'ai vu comme toi.

-C'était étrange, ce halo bleu autour de ma carte SD quand elle a touché ma peau. Ah oui, et en parlant de choses étranges, comment ça se fait que ma mère connaissait l'existence du Prisme ?

-Pour ce qui est de ta mère, je n'en sais rien. Et, concernant la connexion entre le Prisme et ta carte SD, on trouvera une explication. En attendant, il est l'heure que toi et tous les novices aillent à la cantine du complexe. C'est celle de gauche. Celle de droite est réservée aux soldats et au personnel de la base militaire. C'est OK ?

-Oui, chef, je lui réponds. Et il me semble que cette réponse au but humoristique ait atteint son but, car en partant, j'aperçois Mike sourire. Comme quoi, même les soldats ont besoin de sourire de temps en temps.

T H E   O T H E R   R E A L I T Y : Quand la Fin prend le dessus Où les histoires vivent. Découvrez maintenant