Du haut de tes 15 ans, jamais tu n'avais pu expérimenter ce qu'était l'amour. Issue d'une éducation stricte, ta mère ne t'a jamais permise d'être séduisante, et comme ton père vous a laissées à ta naissance, elle t'a élevée seule. Et à son effigie, tu n'as jamais pu ressentir certains sentiments. Exactement comme s'il y avait un creux en toi. Comme si à la place de ton cœur, il n'y avait rien. Cependant, est-ce que ça venait de ton éducation ou d'une tare génétique, nul ne le savait. D'un naturel très solitaire, tu ne sollicitais pas souvent tes cordes vocales. À quoi bon avoir des amis si c'est pour qu'ils te trahissent un jour ou l'autre de toute façon... On est jamais mieux servie que par soi même après tout. Ils n'auraient nourri chez toi qu'un factice sentiment d'espoir, et auraient profité de ta confiance. Et puis, tu étais bien dans ta solitude. Personne pour te déconcentrer dans ce que tu fais, pour captiver ton attention... Ta vie te satisfaisait comme elle était, tu ne voyais pas l'intérêt de la changer ou quoi que ce soit.
Mais c'était sans compter sur ton entrée en école supérieure. Dans la classe au-dessus de la tienne se trouvait un garçon, Max. Il ne t'avais encore jamais adressé la parole, mais tu savais que vos destins étaient entremêlés. Et avec du recul, heureusement qu'il avait tenu ses distance lors de la cérémonie de rentrée, il lui suffisait d'être à moins de deux mètres de toi pour te mettre dans tous tes états. Est ce que c'était ça l'amour ? Le premier regard a comme comblé ce creux en toi qui te tourmentait depuis que tu en avais conscience. Tu étais prête à tout pour son beau visage. Chaque soir tu l'attendais à la sortie des cours pour profiter une dernière fois de lui avant de rentrer chez toi. S'il laissait quelque chose derrière lui, tu finirais par t'en emparer dans la journée, et par l'ajouter à l'autel que tu avais érigé en son honneur, dans ta chambre. Il devenait difficile de compter le nombre d'objets que tu gardais. Tous avaient une grande valeur à tes yeux. Tu étais vraiment prête à tout pour lui.
Mais dans sa classe, il y avait cette fille. Taha. Elle se présentait comme amie d'enfance de ce garçon. Cela expliquait qu'ils étaient toujours collés l'un à l'autre, même s'il n'y avait pas d'amour entre eux. Du moins, pas de réciprocité apparente. En effet, il ne suffisait que de les entendre parler et de légèrement analyser la façon de parler de Taha pour détecter son béguin. Sauf que ça, tu ne le permettrais pas. Il était tien. Personne n'allait te le prendre. Et surtout pas cette garce. Les voir ensemble t'était insupportable. Tu as passé toute la nuit suivante à élaborer un plan pour les éloigner. Et ce, définitivement. Tu braverais l'interdit les yeux fermés pour lui. Pour que ce vide en toi soit plus longtemps comblé, sans que tu n'aies à t'inquiéter de te le faire prendre. Il était à toi, point final.
Tu as passé toute la semaine suivante à analyser habitudes et déplacements de Taha. Au final, ça ne t'as pas été d'une grande aide, elle n'est jamais isolée. Si tu venais à passer à l'action, il serait impossible de t'échapper. Quand tout à coup, une idée t'es venue, comme une évidence. Si tu ne pouvais pas t'occuper d'elle, pourquoi le ferais tu ? Tu pourrais te contenter d'observer la scène tout en tirant les ficelles. Encore fallait-il trouver qui allait être ton pantin. Après mûre réflexion, une personne ressortait. Il y avait cette fille, qui suivait Taha où qu'elle allait. Tu ne savais pas grand-chose d'elle. Juste qu'elle portait le nom de Sarah. Ton objectif à présent était de sympathiser avec elle. Il ne fallait pas précipiter les choses, mais ne pas prendre trop de temps. Quelques observations plus tard, tu finis par te rendre compte qu'elle n'était pas aussi inaccessible qu'il n'y paraissait. Elle vivait dans l'ombre de Taha, mais n'ayant aucun autre ami vers qui se tourner, elle collait à ses talons. L'aborder et poser les bases d'une amitié allait donc être plus aisé que prévu. Il suffisait de se montrer souriante et d'y aller sans se poser de questions. Mais avec du recul, si elle est si seule sans Taha, tu pourrais simplement lui demander de te suivre, l'attirer dans un coin isolé et faire ce que tu avais à faire à ce moment là. C'est ainsi que tu t'approchas d'elle, et prétextant d'avoir quelque chose à lui montrer, finis par l'attirer chez toi à la fin des cours.
Tu entendais des murmures étouffés dans la cave. Cela faisait maintenant trois jours que Sarah subissait tes séances de torture quotidienne. Sa santé mentale commençait à devenir réellement basse. Il ne lui a fallu qu'un coup pour s'évanouir lorsque tu l'as accueillie, mais elle résistait remarquablement bien. Malgré le fait qu'elle était attachée sur une vulgaire chaise en bois, avec ses bras et ses jambes immobilisés, elle n'a arrêté de se débattre qu'au quatrième jour. Tu as donc pu la ramener en cours le lendemain, histoire de s'assurer qu'elle ne jouait pas la comédie. Voir sa réaction quand tu lui as dit l'indifférence de l'ensemble des étudiants suite à sa disparition suffisait pour être fixée là dessus. Elle était restée immobile, son visage ne trahissant aucune émotion. Arrivées suffisamment en avance, pour que tu aies le temps de mettre tout en place, tu l'as guidée dans une salle isolée, lui as donné un couteau dont tu as préalablement effacé tes empruntes et manipulé avec des gants, tu t'es arrangée pour qu'elle sorte quand Taha sera à la vue du plus de monde possible. Tu lui as aussi dit de se porter le coup fatal une fois son travail effectué. De cette manière, elle ne pourrait pas parler dans l'éventualité qu'elle aille mieux un jour. Tu n'as distingué aucune étincelle de vie dans ses prunelles vides. Elle acceptait sans rien dire le destin que tu lui avais confié. Tout était prêt.
Installée avec ton livre, tu attendais tranquillement l'heure fatidique. Tu finis enfin par voir Sarah arriver. Mais il fallait cependant que tu gardes ton excitation en toi, sinon cela pourrait devenir suspect. Sarah s'approchait lentement de sa victime, il semblait que tu étais étrangement la seule à l'avoir repérée. Mais ce qui était sûr, c'est qu'elle n'est pas passée inaperçue lorsqu'elle a sauté au cou de Taha pour l'immobiliser et la plaquer au sol en lui assénant de nombreux coups de coude. Elle avait délibérément décidé de la faire souffrir avant de l'achever. Les étudiants témoins ne bougeaient pas, tétanisés par la peur. Les assauts s'enchaînaient sans répit quand Sarah finit par sortir son couteau et le planter dans le cœur de se victime. Elle ne se retenait pas, au contraire. Chaque coup de poignard était une preuve de toute la haine qu'elle ressentait. Tu lisais à travers le sang, les sentiments d'une jeune fille perdue, ignorée de tous. Seule, dans l'ombre de sa seule amie. Ton cœur se serra à cette pensée. Une fois le corps de Taha définitivement sans vie, Sarah te lança un regard indiscernable, empli d'un mélange confus de tristesse et de reconnaissance. Puis elle planta sa lame dans sa gorge, laissant derrière elle deux cadavres, baignant dans une mare de sang chaud qui s'étalait dans le couloir de l'école.
Tout s'était déroulé comme tu l'avais prévu, à un détail près. Max était là. Il contemplait la scène tragique qui était arrivée sous ses yeux. Son regard balaya une assemblée en larmes, sous le choc. Il s'approcha lentement, tâchant ses vêtements. Sans prononcer un mot, il s'effondra sur le cadavre de son amie d'enfance. Après avoir passé plusieurs minutes dans cette position, il se releva et se saisit avec respect du couteau de Sarah, et le planta à son tour dans son propre cœur. Il s'écroula, enlacé avec les deux filles. Quant à toi, le choc de voir Max au sol te fit instantanément perdre connaissance. Tu ne t'en relèvera pas.
Ton plan si farouchement élaboré n'aura finalement engendré qu'un engrange infernal, qui aura conduit à la mort de plusieurs étudiants, sans compter les troubles psychologiques.
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Recueil OS
Short StoryBonsoir à vous, Vous trouverez ici mes OS, pas spécialement joyeux ou longs, mais on puise tous notre inspiration quelque part. C'est toujours bon à préciser, les âmes sensibles devraient rester loin d'ici. Je sais pas si un jour j'en écrirais d'aut...