J'ouvre les yeux. Il fait chaud, mais ma peau frissonne, je me sens sereine, mais je sens une boule dans le fond de mon ventre. J'essaye de me relever, mon corps, est lourd, je n'y arrive pas, autour de moi c'est sombre, mais une légère lumière éclair l'endroit, je suis allongée par terre, je tourne la tête, j'aperçois deux silhouettes au loin, j'entends des cris, j'entends des pleurs, il faut que j'aille voir. J'essaye de me lever, mon corps est trop lourd, je n'y arrive pas, je suis immobile, je veux me lever. Je dois me lever. Je me redresse, tout devient plus léger. Sans me retourner, je fonce vers les silhouettes, elles savent sûrement où nous sommes, et comment en sortir. Je m'y approche, je suis à dix mètres d'elles, j'entends des cris, j'entends des pleurs, j'entends une voix, j'entends ma voix. Je me stop puis je m'avance doucement. J'ai les yeux fixés sur les silhouettes, qui, peu à peu, prennent formes, je vois une fille, de dos, à genoux par terre, devant elle, il y a une personne, allongée sur le dos, qui semble inconsciente. Je suis juste à côté d'elles, le sol est trempé, j'ignore si c'est la pluie ou des larmes. Je suis si concentrée sur cette scène que je n'ai pas vu que le décors avait changé, je regarde autour de moi, on est dans sur une route, il fait nuit, les lampadaires éclairs la scène d'une lumière jaunâtre, glauque. Il y a des gens tout autour, tout le monde panique, la foule se décuple. Tout le monde cherche à voir ce qu'il se passe, moi je veux comprendre. Je vois, mais je ne sais pas, je ne sais pas où je suis ni ce qu'il se passe. Je vois derrière moi les ambulances qui arrivent en courant, je tente de les interpeller,
-Eh, excusez moi, il se passe quoi ? Où suis-je ? Ils ne me répondent pas, l'impression qu'ils ne me voient pas, les cris de cette fille me rendent folle, sa voix est la mienne, ma voix est la sienne. Je sens une douleur étrange, comme si on me bousculait, comme si on me transperçait, les ambulances me passent à travers. Je ne suis qu'un fantôme dans la foule, pourtant je suis là, je fixe la scène, je fixe le drame, ils soulèvent le corps à terre, le mettent sur un brancard, je reconnais ce visage, il y a du sang, mais je le reconnais. Un sentiment d'effroi me parcourt, la fille se relève, elle cri, et je cris un même temps, le même mot, le même cri, cette fille, c'est moi, et le corps...
- NOAH ! Je n'arrive pas à réaliser, tout s'accélère, je vois le visage de cette fille, c'est le miens, je me vois hurler et pleurer près du corps, mon corps tremble, je vois mon reflet mais mon reflet ne me vois pas. Tout est si réel, tout semble si réel, sauf moi, sauvez moi, sauvez le. Tout devient flou, je le regarde partir, je me regarde me débattre, les ambulances m'empêchent de le rejoindre, et je hurle, je m'effondre, ils m'ont retiré une partie de moi. Je commence à trembler, la scène s'éloigne, mais je ne bouge pas, tout devient flou, puis tout disparaît, et moi je suis là, seule. Il n'y a plus de chaleur, non, il fait froid, seulement froid, et si je tremble, ce n'est pas parce que j'ai froid, j'ai peur, peur de ce que je viens de voir, peur de l'endroit où je suis, peur de la suite. Je veux retourner à ma vie, je veux retrouver Noah, je suis figée, je suis sortie du vide pour plonger le néant. Jamais je n'aurais pu croire que le calme puisse autant me détruire. Je me retourne, j'ignore vers où mais je pars. Une force, dont j'ignore la nature, m'attire, m'aspire, puis je me vois, encore, je me vois allongée, j'y étais tout à l'heure, je suis pieds nus, le sol est en moquette, je me mets à genoux près de mon propre corps. Cette fois ci, il n'y a rien, pas de pluie, pas de cris, pas de pleurs, juste moi, et moi. Je me regarde, j'ai l'air paisible, et à la fois si triste, dans ma main il y a une boîte, j'essaye de la prendre mais tout me traverse, il m'est impossible d'attraper ou de toucher quoi que ce soit. Je regarde le décors, c'est une chambre, petite, la moquette est bordeaux avec des petits dessins, comme de minuscules taches noires, il y a derrière moi un lit, grand lit, deux places, avec des coussins blancs et des draps blancs, une légère couverture en laine marron. La pièce semble vide, comme mon cœur, derrière moi il y a un miroir, avec un lavabo, tout semble vieux, comme un motel flippant. Mon corps est étendu, au pied du lit, comme si j'étais tombée à terre, ma tête regarde sur le côté, mes yeux sont semi-fermés. Je semble morte, pourtant des larmes coulent encore le long de mes joues, elles s'étendent sur mon cou et finissent leur course sur le sol. Ma main est serrée, et je semble tenir quelque chose, un bout dépasse, je regarde attentivement, c'est une photo, une photo de lui et moi, je l'ai toujours sur moi. Je regarde autour si il n'y a pas de portable, d'horloge, rien. Je suis ici, bloquée dans une chambre, seule, presque face à moi même. Je fixe mon corps inanimé, je regarde mieux, non, je n'ai pas l'air paisible, j'ai l'air si triste, si tourmentée, j'ai l'air d'avoir si mal. Pourtant je n'ai pas de bleus ni de marques, ma douleur n'est pas physique, j'aurais préféré. Elle est mentale, j'ai mal, j'ai mal mais ce genre de douleurs ne se soignent pas, elles vivent en nous et on apprends à vivre avec, je me demande si mon regard est aussi vide actuellement, si il souffre autant lui aussi. Et je pense, je pense que oui. Je suis assise sur le lit et je pense, puis je m'allonge sur le dos au milieu du lit, les bras étendus. Je repense à mon cri près de Noah, je l'ai déjà entendu, non pas parce que c'est moi qui ai crié, c'est étrange, c'est comme si j'avais déjà vu cette scène, je repense à cette fille, le soir du commencement, je repense à son cri, et je me dis qu'il y ressemblait étrangement. Dans ma tête c'est tout un bordel. Je fixe le plafond, il est noir, c'est fou le nombre de choses que nous pouvons voir dans du vide. J'aimerais y voir les étoiles, la lune, mais il n'y a plus rien, j'aimerais sentir à nouveau cette sensation de bonheur dans mon cœur, mais il n'y a plus rien. La porte s'ouvre d'un coup, je vois Alex, il saute sur mon corps inanimé, Laïa le suit, elle s'effondre en larmes, tous les deux sont près de moi, enfin de la moi étendue par terre. Dans ma tête plus rien ne passe et je regarde la scène comme une spectatrice, pourtant je suis l'actrice au sol, celle qui simule une mort, en espérant que ça soit de la simulation. Tout se fige, tout se fige toujours, comme une photo cérébrale la scène reste bloquée dans ma tête, j'aimerais oublier ce genre de souvenirs dont je me souviendrais toujours. La porte est restée grande ouverte, pourtant personne ne rentre. Il y a une inscription sur la porte, sûrement le numéro de la chambre, je me lève, le sol est doux, mes pas sont silencieux, sûrement parce que mon corps n'existe plus, puisqu'il est inconscient allongé derrière moi. La porte est grande, vieille, comme le couloir, comme la chambre, tout paraît plutôt ancien, * Maë et ses goûts luxueux *, sur la porte y'a une plaque en métal, une inscription gravée dessus " 112", j'entends quelqu'un marcher derrière moi. Je me retourne et aperçoit une femme, elle semble jeune, sûrement dans mes ages, je reste à la regarder puisqu'elle ne me verra pas. Elle fait ma taille, de longs cheveux noir, très noir, en contraste avec ses yeux bleu ciel, un regard si doux et un sourire brisé, faux, un sourire qui souffrait. Elle était si belle, elle avait le visage de ceux qui ne craignent plus la mort, c'était un ange vivant dans les bras de l'enfer. C'est dingue, ses yeux, je ne m'en remet pas, j'aurais aimé y plonger juste le temps d'une éternité. Elle s'arrête devant moi, elle me fixe comme si elle ne me voyait pas.
-Un problème ? A cet instant précis je beug, j'ignore si elle me parle, je me retourne, il n'y a personne, ça ne peut être qu'à moi qu'elle parle. Ne regarde pas autour de toi, on est que deux. Sa voix est délicate, elle me sourit, je ne sais pas quoi répondre.
-Pourquoi toi tu me vois et pas mes amis ? Je suis où ? Je veux sortir, pourquoi mon corps est-il étendu par terre et pourtant je suis là à te parler? Ma voix tremble, j'enchaîne les questions, je veux comprendre, j'ai peur, j'ai si peur.
-Calme toi, je ne peux pas t'apporter de réponses maintenant, tu comprendras quand tu seras réveillée. Elle me prend la main et on rentre dans la chambre, la porte se ferme seule, elle s'assoit sur le lit et me fait signe d'en faire autant, mon corps a disparu, mes amis aussi, je regarde le sol sans comprendre. Je t'avais dit que nous n'étions que deux, tout a disparu pour l'instant. Pour l'instant ? Je la regarde sans rien dire. Ici tu es dans ta chambre, c'est ici que tout se passe, c'est dans la chambre 112 que tu sauras tout.
Je la regarde dans les yeux, m'allonge, elle m'embrasse le front avant que je parte dans un sommeil profond.
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Darkness
SpiritualitéBad trip, démons, tourments, amour et deuil, difficile de différencier le vrai du faux, difficile d'accepter la vie qu'on mène. Darkness c'est l'histoire de Maë, Darkness c'est l'histoire du début, c'est le commencement d'une fin.