Il lui prit la main. Il s'en dégageait une chaleur radiante, qui faisait son âme se brancher sur la sienne. Ce qui, en fin de compte, rendait seulement les choses plus compliquées.
Elle ferma les yeux un instant, le temps de savourer cette sensation une dernière fois. Car, après ce qu'elle s'apprêtait à dire, elle doutait que cette main la touche de nouveau un jour. A part pour la gifler, peut-être.
Le ciel bleu éteint. La timide aurore, le triste jour gris qui se profilait. Des gazouillis d'oiseaux, lointains. Sa main. Cette chaleur. Cette connexion.
Tout cela allait être brisé. Ce bonheur factice - l'était-il vraiment? - serait sacrifié, devait être sacrifié au nom de sa plus grande valeur: l'honnêteté. Impossible de continuer de mentir, de feindre la perfection la plus totale, l'idylle par tous rêvée quand, chaque seconde dans son esprit surgissait la pensée d'un autre. Et lorsque cette main la tenait, c'était celle de l'autre qu'elle aurait aimé serrer dans la sienne. C'était sa chaleur qu'elle voulait ressentir, son âme inaccessible à laquelle elle voulait se brancher.
Une larme perla, et une hémorragie cardiaque lui labourait doucereusement la poitrine.
Puis les mots volèrent, funestes, assassins, cramer l'innocence d'un amour encore candide. Ils brisèrent l'harmonie calme de trois coups de fusil. Brefs, secs, assourdissants. Et surtout, bien visés, mortels.
Il luttait pour retenir son sang, bégayait des paroles incohérentes qu'il pressentait inutiles.
Son coeur à elle saignait plus que jamais, inondant tout son être de douleur passion, sourde et pourpre.
Il agonisait. Alors, elle inspira profondément, rassembla ses dernières forces, puis appuya sur la gâchette pour tirer le coup de grâce.
Elle l'a touché dans le coeur. Aïe.
Les doigts faiblissent. La main retombe, souillée par la souffrance.
Son coeur saigne toujours, mais elle n'a plus mal.
Elle est anesthésiée. Il fait juste un peu froid, maintenant.
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Effaçable
Randomidées et bribes d'histoires en bordel, sur un lit de mélancolie et assaisonnés d'un peu de poésie ratée