Le vent ne soufflait plus. Tout était parfaitement calme désormais, et à la faveur du clair de lune, l'homme distingua les yeux de Ryûko dans la demi-pénombre. Ces yeux brillaient tranquillement d'une fureur glaciale, contenue, qui avait l'éclat d'un orage.
« Alors viens t'allonger avec moi sur ce lit, et endormons-nous dans les bras l'un de l'autre », exigea-t-elle froidement.
Il s'exécuta. Elle appuya sa joue contre son torse chaud, et attendit que sa respiration se fasse calme, régulière, signe qu'il plongeait dans un sommeil profond. Ses doigts couraient sur la peau douce, traçaient prudemment la ligne de la mâchoire, caressaient la joue et les paupières fermées avec nostalgie, comme s'il n'était déjà plus qu'un souvenir. Respirant son odeur une dernière fois, Ryûko enfouit son visage au creux du cou de l'homme, écouta son souffle.
Une fois certaine qu'il ne risquait pas de se réveiller, elle s'empara de la dague qu'elle gardait toujours sous son oreiller de soie. Elle promena la lame froide sur la poitrine de l'homme, pensive, laissa échapper un sanglot, puis l'embrassa tendrement en lui plantant la dague dans le coeur. Son corps eut un soubresaut, il ouvrit deux yeux stupéfaits, et s'éteignit aussitôt.
« Si tu ne veux pas me connaître, alors personne d'autre ne te connaîtra. Ainsi, que tu le veuilles ou non, nous sommes liés pour l'éternité. »
Et, sur ces mots, elle s'ouvrit le ventre d'un geste sec puis, s'effondrant dans son propre sang, les mains écarlates, pensa à l'amant qui l'avait abandonnée, avec une mélancolie tendre, avant de rendre le dernier soupir.
Le vent glacial souffla de nouveau, et si fort qu'il se mit à geler. Tous les pétales du cerisier avaient givré, un seul demeurait intact. Celui qui se trouvait sur sa chevelure. Il tomba lorsqu'on découvrit les cadavres, le lendemain matin, et plus jamais le cerisier ne donna de fleurs.
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Effaçable
Randomidées et bribes d'histoires en bordel, sur un lit de mélancolie et assaisonnés d'un peu de poésie ratée