10. Une bonne odeur de brioche

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Il était encore tôt dans la matinée quand on frappa à la porte.

C'était officiellement une heure convenable pour être reçu, si l'on en croyait ce que Mrs Turner lui avait inculqué. Mais les Riley ne recevaient jamais personne à cette heure, à part éventuellement Frederick.

Afanenn n'avait aucune idée de ce que son père avait bien pu lui écrire la veille au soir pour lui expliquer comment son arrestation s'était résolue... elle avait hâte de le revoir, même si elle ne savait pas trop comment s'y prendre pour lui faire avaler le mensonge sur ses fiançailles.

Sauf que ça ne pouvait pas être lui : on était dimanche, il était donc en visite dans sa propre famille.

Ça ne pouvait pas non plus être la tante Abigail qui venait les saluer : elle était à la messe et de toute façon, elle ne se déplaçait jamais avant dix heures ni sans une bonne raison. Afanenn n'avait pas encore trouvé le courage de lui écrire pour l'informer des récents événements, elle craignait trop sa réaction.

Car si Abigail Worthington était bien mieux intégrée à la société que son frère, elle n'en était pas moins exubérante à sa manière.

Il ne restait plus que le lord dans la liste des potentiels visiteurs, mais ça lui semblait étrange. Il s'était déjà imposé dans leur vie, elle le trouverait légèrement gonflé de débarquer en plus de si bon matin, tablette ou pas...

En plus, il venait pour rien : son père était absent pour toute la matinée. Elle s'avachit un peu plus dans son siège, guettant d'un œil l'arrivée de la femme de chambre. Quand Fawkes vint effectivement la trouver, elle avait l'air confus.

« Miss Riley ? »

Afanenn se redressa et lui sourit. Elle n'allait certainement pas se montrer désagréable envers Fawkes sous prétexte que lord machin était matinal.

« Oui, Fawkes, qu'est-ce qu'il y a ?

- Il y a une dame dehors. Je n'ai pas compris son nom. Elle m'a donné ceci pour vous, elle attend. »

La femme de chambre tendit une enveloppe où il était écrit « Mr. et Miss Riley », Afanenn l'attrapa et en déchiffra le contenu avec difficulté. L'écriture était faite de nombreuses pattes de mouches fines et serrées.

« Ce n'est pas possible... »

Quand Afanenn releva la tête, elle déclara :

« Il ne faut pas la laisser dehors, faites-là entrer. »

Mais ce disant, elle ne put s'empêcher de suivre Fawkes jusqu'à la porte de la maison qui s'ouvrit sur une Caroline passablement secouée.

« Miss Jenkinson !

- V... v.... v... vous.... » Caroline retint ses larmes et inspira un instant avant d'essayer de s'exprimer à nouveau « V... v.... v.... vous... » puis elle claqua son talon contre la marche de l'escalier, à bout de nerfs.

Afanenn agita l'enveloppe.

« Je viens de lire votre message, entrez ! C'est... c'est votre seul bagage ?»

Caroline acquiesça en serrant les anses en osier d'un gros sac en tapisserie.

« Papa n'est pas là mais je sais qu'il pensera comme moi, venez. »

Elle répéta son geste accueillant et Caroline pénétra dans le vestibule en tremblotant comme si elle venait d'affronter une chute de grêle.

« Vous voulez une tasse de thé ? »

Un Fantôme de Bon Goût (The S.I.D.H.E.)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant