Cinq

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Bonne lecture !

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Légèrement fatiguée, Iris souleva une chaise et la porta jusqu'à pouvoir la renverser sur la table. Elle fit de même avec les deux autres à proximité, puis passa le balai jusqu'à faire disparaître les dernières saletés qui traînaient par terre.

– Tu sais, lui dit Adrian en arrivant auprès d'elle avec une petite pelle, j'ai réfléchi. À propos de ta jolie rousse. Je pense que tu devrais prendre les devants.

Iris se retourna avec étonnement, et haussa un sourcil. Adrian la regardait de derrière ses épaisses lunettes rondes, comme si ce qu'il disait était évident. Il lui tendit la pelle.

– Elle est jolie, et toi aussi. Où est le problème ?

– C'est une fille, dit Iris en soupirant.

Elle s'accroupit pour ramasser la poussière, puis partit derrière le comptoir pour tout mettre dans la poubelle.

Il était tard, et la nuit d'été qui tombait plus lentement prenait enfin sa place : de l'autre côté des grandes baies vitrées de la boutique, les passants et les voitures avançaient dans des rues bien moins remplies.

Quand elle revint dans la pièce, Adrian regardait dehors. Quelqu'un attendait, appuyé contre les rambardes qui protégeaient les piétons de la route. Des cheveux noirs et un sweat-shirt par ce temps, elle reconnut presque immédiatement Kieren, le garçon qui venait de temps en temps chercher Adrian au boulot.

Il finit par se détourner pour aller attrapa un chiffon.

– Je sais que c'est une fille. Et alors ?

– Et alors, elle a rompu avec son copain dans le café, la dernière fois. Elle n'est pas... enfin tu vois.

– Elle est pas lesbienne ?

Iris grimaça. Dans la bouche des autres, ça lui faisait toujours bizarre d'entendre ce mot, sans qu'elle ne sache pourquoi.

– Et alors ?

– Oh, Adrian, s'il te plaît.

Il leva les mains en signe de reddition.

– Bon, d'accord. Je vois le problème, tu sais, mais franchement je pense que tout ça, c'est dans ta tête. Je travaille ici, je la vois à chaque fois qu'elle vient commander son café.

Il s'approcha jusqu'à pouvoir la surplomber d'une tête : Adrian était peut-être un type un peu dégingandé avec des lunettes épaisses et des cheveux blonds cendreux, ça n'empêchait pas le fait qu'il était grand, le salaud.

Il pointa son doigt sur sa poitrine avec un sourire, tout en la regardant dans les yeux.

– Tu souris, elle rougit, tu lui donnes son gobelet, elle rougit, tu fais absolument rien, elle rougit. Je l'ai servi qu'une seule fois, et elle était tellement déçue qu'elle m'a fixé jusqu'à ce que je lui donne son café. J'avais oublié sa crème. J'ai cru qu'elle allait m'étrangler.

Il haussa les épaules.

– Si tu veux l'avis d'une personne extérieur : elle est aussi intéressée que toi tu l'es.

Iris fit la moue tandis qu'il se reculait pour aller chercher la serpillière.

– Tu penses que je devrais faire le premier pas, alors ?

– Oui. Elle est grande, elle parle fort, elle a pas l'air d'avoir peur des mecs : ça n'empêche qu'avec toi elle bafouille et elle part en courant.

Il lui fit un sourire et Iris le lui rendit : ce garçon avait l'air et la manière de lui donner du courage. Elle lança un petit coup d'œil à l'extérieur, et vit que Kieren attendait encore.

– Tu sais quoi ? Je vais écouter tes conseils. Je suis une grande fille. Je vais prendre les devants.

Adrian parut satisfait et commença à passer le tissu humide sur le sol.

– Adrian, arrête. Je vais finir seule, t'as qu'à y aller.

Il releva la tête, surpris.

– Sérieux ?

– Pour te remercier de ton oreille attentive. Va le rejoindre, ça va faire trente minutes qu'il t'attend dehors.

Avec un visage radieux, il vint la prendre dans ses bras et la serra fort alors qu'elle riait.

– Je te revaudrais ça, promit-il.

– C'est ça. Allez, dégage de là.

Elle l'observa avec une moue songeuse sur les lèvres tandis qu'il allait rapidement récupérer ses affaires ; il ne prit même pas le temps de se changer car quelques secondes plus tard il sortait du café. Adrian traversa le trottoir jusqu'à Kieren, et le fit sursauter en se plantant juste devant lui.

Iris observa leurs sourires, la façon dont leur corps se rapprochaient sans s'en rendre compte, la joie que le visage souvent affable de Kieren afficha. Elle soupira d'envie et se remit au travail.

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Des bisous !

Un nuage de crèmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant