Chapitre 13 Vivre ou Périr

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Ses battements d'ailes étaient puissants et d'une lenteur presque irréelle, chacun de ses mouvements était calculé pour lui permettre de se stabiliser dans l'espace. Son corps était beaucoup plus robuste et bien plus musculeux que celui, rabougri, de la harpie commune. Elle avait l'air beaucoup plus dangereuse et plus calculatrice que toutes les autres créatures qui peuplaient de leurs membres épars le balcon.

Bien plus grandes et colorées que leurs cousines les harpies, les erynias étaient uniquement présentes sur les îles de Skellige. Alpha par nature, les erynias n'étaient pas seulement plus violentes et impitoyables, elles étaient également beaucoup plus imposantes et paraissaient beaucoup plus jeunes.

Les muscles saillants de leurs corps légèrement bleutés laissaient transparaître un réseau veineux complexe. Leur peau presque translucide paraissait aussi fine que du papier de soie, mais en réalité elle était bien plus résistante que la peau sèche et parcheminée des harpies.

La distinction entre les deux races tenait également au fait que l'erynia ne vivait pas en groupe, elle n'en avait pas besoin. Une erynia adulte pouvait soulever une vache à elle seule.

Plus petites et plus frêles, les harpies se devaient d'attaquer en groupe pour réussir à attraper une proie. Une fois que l'objet de leur rapine se trouvait dans leurs serres, elles prenaient de l'altitude et le lâchaient de haut afin que le corps de leur prise se brise à l'impact. Elles adoraient par-dessus tout aspirer la moelle osseuse de leurs victimes.

Cependant, les harpies étaient des opportunistes. Elles pouvaient se contenter de cadavres ou de carcasses d'animaux car elles devaient subvenir avant tout au besoin de la colonie, contrairement à leurs insulaires voisines.

Pour le plus grand malheur du sorceleur, l'erynia n'était pas un vulgaire charognard. Elle ne pouvait se contenter d'être un simple nécrophage, elle aimait uniquement la chair fraîche.

Le grand brun resta un instant interdit par ce qu'il avait devant lui.

Une erynia ?! Ici ?! Mais... Mais... Elles ne quittent pourtant jamais les îles de Skellige !

Le cerveau du sorceleur se mit à tourner à plein régime. Il réfléchit avec une rapidité incroyable à certaines théories qu'il avait lu dans de vieux tomes poussiéreux.

« Dans de très rares cas, il est arrivé que faute d'Alpha compétente, un groupe de harpies en recherche de leader rencontre une erynia solitaire qui accepte d'endosser ce rôle. »

Bon sang... Se pourrait-il que...

Eskel, sans quitter des yeux l'horrible apparition, se mordit violemment l'intérieur de la joue pour être sûr que la potion qu'il avait prise plus tôt ne lui provoquait pas d'hallucinations. Mais il fut forcé de se rendre à l'évidence, le monstre était bien là.

Son médaillon vibrait affreusement sur son pourpoint ouvert et le goût du sang qui se répandait dans sa bouche ne lui laissait aucun doute sur le fait qu'il était bien éveillé.

Le monstre et le sorceleur se faisaient face.

Le grand brun essaya de se souvenir du texte sans succès, puis d'un coup une page lui revint en mémoire.

« En tant qu'Alpha l'erynia restera toujours en retrait pour voir ses troupes combattre et lui rapporter comme offrande les morceaux les plus savoureux. Cependant, si le groupe échoue pour une quelconque raison elle sortira de l'ombre et défendra violemment sa colonie. Malheur à ceux qui croiseront son chemin, car une erynia qui perd son troupeau devient comme un lion féroce. Elle n'aura de répit que lorsque l'objet de sa colère sera en lambeaux entre ses minuscules dents. »

Les aventures du sorceleur EskelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant