25/07/2019
[TW crise d'angoisse, sang, blessure]
Acte III.
Hagall er kaldastr korna;
Kristr skóp hæimenn forna.
-Freyja ? Vous êtes toujours here ?
Il redressa lentement la tête. Fil de pensées cassé.
-C'est Freyr aujourd'hui.
-Whatever. Alors pour ce bateau je pensais que ...
L'attention du jeune homme s'était déjà envolée loin. Il donna un coup de pied dans un caillou par terre. Que faisait ce caillou dans un port ? Sûrement tombé d'une cargaison. Eloigné des autres. Seul.
-Frey-
-Oui, oui, fit-il excédé. Revenez demain, s'il vous plaît.
L'homme le regarda d'un air suspicieux, voulut ajouter quelque chose mais se ravisa. Il parti en grommelant sur les travers de la jeunesse et la nécessité de la redresser. Connard, murmura Freyr. Avec un peu de chance il ne reviendra pas.
Son regard se posa devant le bateau de pêche devant lui, à quai. La cause de tous les problèmes et de toutes ses angoisses. Il avait voulu s'en débarrasser, -qu'allait-il faire d'un bateau de pêche ? – mais depuis que l'annonce avait été affichée, de jeunes marins arrogants et ivres de voyage étaient venus négocier l'achat et il regrettait son choix. Ils étaient vraiment stupides et irrespectueux. Et il fallait pour ce bateau le meilleur marin, le meilleur héritier, quelqu'un qui pouvait prendre la digne place de Jord-
Il tapa du pied au sol, rageur. C'était ridicule. Tout cela était ridicule. Il ne pouvait pas vendre le bateau. Il ne pouvait pas le garder.
Précautionneusement, il s'agrippa à la coque du navire et sauta à l'intérieur. Dans le port la mer était calme et il n'allait pas avoir le mal de mer. Il traversa le pont, effleura légèrement de la main les cordages, les voiles. Puis son attention se porta sur la porte à hublot. L'intérieur. Le poste de commande.
L'enfer aussi.
Il tendit un bras tremblant vers la poignée. Entra. Il devait voir.
Une boule d'angoisse explosa dans son ventre et il se rattrapa à quelque chose, au mur peut-être. Tomba au sol, déjà expulsé en dehors de son corps, de lui-même, les souvenirs remontant en bloc bloquant tout l'air les pensées la vision le son.
il n'aurait pas dû rentrer il allait mourir que s'était-il passé pourquoi pourquoi pourquoi pourquoi non non non arrêtez s'il vous plait arrêtez il n'aurait pas dû faire ça c'était sa faute sa faute sa faute il n'y a plus d'air plus rien il meurt ça y est c'est la fin il n'existe plus tant mieux tant mieux il meurt il meurt il meurt il meurt il meurt où est l'air où est la lumière où sont les sons la mer l'eau ulmo jordis ses parents loki freyr le vrai le vrai où sont-ils disparus morts partis loin loin loin loin de lui l'être bizarre celui que tout le monde déteste et voilà qu'il va mourir et que tout le monde s'en fichera que tout le monde sera heureux après tout il allait mourir il n'avait plus d'air plus de vie plus d'existence seulement du vide vide vide rien pas de soleil pas de son pas de musique il n'en avait pas le droit cela lui était interdit panique panique panique-
...
..............
....
Chancelant il se jeta sur le pont cherchant de l'air de quoi vivre ne pas mourir pouvoir revoir le soleil la mer la ville les livres le vent
rouge
sombre
chaud
le sang coulait abondamment. Que s'était-il passé ? Ah il s'était cogné contre le mur, et maintenant ça saignait, il fallait sortir, l'air salé piquait. Il trébucha une fois, deux fois, trois fois, pleura de rage, de désespoir, réussit à quitter le bateau et rentra chez lui juste en face après l'escalier, vingt-trois marches et deux devant la porte, c'était ouvert, toujours, les habitants étaient dignes de confiance.
Il ferma la porte à clef.
Le souffle coupé il se laissa glisser le long de la porte. Les Dieux l'avaient abandonné. Ulmo. Anar. Ils avaient pris la vie de son grand-père, il aurait pu le sauver, il aurait pu être là, il aurait DÛ être là, mais non. Jamais là quand il faut, pour les autres, toujours seul seul seul.
Douleur.
Ah il fallait soigner la blessure. Où était le chat ? Parti, comme tout le monde. Il ouvrit un premier placard, pas le bon, les bandages étaient dans la salle de bain, celle de Jordis, il fallait entrer, éviter de mettre du sang partout, ouvrir le tiroir. Sortir le désinfectant. Les bandages. Il agissait méthodiquement, sans réfléchir, complètement épuisé et coupé de lui-même. Il posa sa tête en arrière, contre le mur, sans pouvoir se relever. Il réfléchirait plus tard. Puis, lentement, pas par pas, moitié debout, moitié à quatre pattes, il monta les escaliers et se glissa dans son lit. Il avait besoin de dormir. Pendant un millénaire au moins. Réveillez-le quand il faudra mourir.
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Textes Hens
Short StoryLes aventures de Freyja, mon OC, dans le beau monde de Hens ! http://hens-world.com