Après avoir listé tous les anges tombés lors de l'Affrontement Final, une nouvelle tâche incomba à Aziraphale : répertorier tous les humains et leurs oasis. Le bâtiment dans lequel il avait été mis de force par Michael s'était agrandi, de nouvelles étagères remplies de dossiers vides qui n'attendaient que des documents concernant les humains. Il n'avait pas bien compris ce qu'étaient les oasis au début, du moins pas dans ce contexte. Au détour d'une étagère, il entendit d'autres anges en discuter et se faisant donc le plus discret possible, il écouta la conversation.
« Je tiens ça de source sûre, tu peux me croire, les humains ont tous étés amenés au paradis ! Même ceux dont les âmes devaient aller en Enfer, ça en a fait jaser plus d'un ça oui. »
« Mais le Grand Plan n'était-il pas censé mettre fin à l'existence de l'Humanité ? »
« Sur le papier, si, mais faut croire qu'un haut gradé a changé d'avis. » Un silence s'installa dans le groupe jusqu'à ce qu'un d'eux prit la parole d'une voix peu sûre.
« Je... Je crois que c'est un ordre de Dieu elle-même... J'ai entendu une sorte de dispute l'autre jour quand je suis allé faire mon rapport à l'Archange Uriel. » Chaque personne dans le groupe le regardait avec intérêt, pendu à ses lèvres. « Voilà ce que j'ai entendu... »
Les 5 Archanges et le Métatron se trouvaient face à une forme humanoïde auréolée de lumière.
« ALLEZ SAUVER LES HUMAINS. ILS N'ONT RIEN DEMANDÉ DE TOUT CELA. »
Gabriel se démarqua des autres et prit la parole, baissant la tête.
« Mais enfin Mère, ce ne sont que des pions. Pourquoi voudriez-Vous les épargner ? »
« ASSEZ ! TU NE VAS PAS TE METTRE À ME DÉFIER TOI AUSSI ? CELA ME DÉPLAIRAIT ÉNORMÉMENT. »
Se rapetissant sous les gros yeux sous-entendus de Dieu, Gabriel continua, redoublant de délicatesse.
« Pardon Mère, je n'oserais jamais Vous contre-dire. Que souhaitez-Vous que l'on fasse ? »
« AMENEZ LEURS ÂMES ICI. NE VOUS EMBÊTEZ PAS AVEC LEURS CORPS PHYSIQUES. PLACEZ-LES DANS UN ENDROIT FAMILIER. »
Gabriel, Michael, Uriel, Sandalphon et le Métatron s'inclinèrent en saluant. «Bien Mère, nous ferons selon Votre volonté. »
En sortant, Gabriel se pencha vers ses confrères et se prit une tape sur la tête de la part de Michael ainsi qu'un regard noir.
« Tu crois vraiment que c'est en parlant de cette façon que tu vas être pardonné ? » lui demanda sèchement Uriel.
« Qu'on en finisse au plus vite avec cette tâche ridicule. » conclut Michael alors que leurs voix et l'écho de leurs pas s'affaiblissaient.
Les années qui suivirent cette conversation passèrent très rapidement pour Aziraphale, presque 8 milliards d'humains à répertorier n'est pas chose aisée ; d'autant plus que rien n'était automatisé, tout devait se rédiger à l'ancienne : de l'encre et une plume. Il rencontra plusieurs noms familiers comme des célébrités ou des gens qu'il connaissait avant que tout ne parte en cacahuètes. Voir ces noms et se souvenir de leur vie révolue lui provoquait un pincement au cœur et l'irrémédiable envie de pleurer en mangeant de la glace (et des crêpes) en regardant les Golden Girls afin d'honorer son ami et leur douillette vie sur Terre. La première fois qu'il rencontra le nom d'une personne proche, ce fut celui de Madame Tracy. Aziraphale sentit sa vue se brouiller, il en avait les larmes aux yeux et un espoir grandit au fond de lui contre son gré. Les souvenirs lui revinrent : la fin du monde tels qu'ils le connaissaient s'approchait et ils n'avaient pas eu le temps de se connaître aussi bien qu'Aziraphale l'aurait souhaité. La femme paraissait être une dame, une vraie: faisant preuve d'un courage et d'une adaptabilité hors du commun, elle lui avait autorisé de prendre le contrôle de son corps pour mettre à mal les plans de l'Armageddon.
« Et si je lui rendais une petite visite ? Après tout, les humains sont au Paradis maintenant et les Anges sont les plus proches des humains. Quoi de plus normal que de vérifier que tout se passe bien ? » S'auto persuadant du bien fondé de la chose, il prit sa veste posée sur le dos de la chaise et laissa un petit mot à l'intention de ses collègues: "Je suis parti faire un tour. Ne me cherchez pas."
Tenant un plan des oasis dans la main, il s'orientait en fonction des descriptions qu'il avait annotées à côté de chaque croix. Il était plutôt fier de son idée du plan, cela lui rendait la tâche plus aisée pour trouver l'oasis de la médium, qui ressemblait énormément un complexe d'appartement.
« Madame Tracy ? C'est moi, Aziraphale, l'ange qui a pris votre corps pour régler l'Apocalypse. » Seul le silence lui répondit après qu'il eut toqué et appelé à voix haute. Il persévéra.
« Madame Tracy ? Vous êtes là ? » Inquiet, l'ange essaya de regarder par une fenêtre du rez-de-chaussée mais ne vit rien. Dépité et triste il fit demi-tour pour revenir à son bureau, personne n'avait remarqué son absence ce qui le soulagea.
Plus tard (heures ou jours il ne saurait dire) les anges autour de lui devinrent encore plus excités. Il interrompit l'un d'entre eux pour lui demander ce qu'il se passe.
« Tu n'es pas au courant ? L'Archange Gabriel est là ! »La nouvelle eut l'effet d'un seau d'eau gelée sur Aziraphale, il se figea sur place, ne pouvant bouger, de nombreux scénarios défilants dans son esprit. Il parvint à se rasseoir à son bureau et à continuer sa tâche une fois le choc initial passé. "Que peut-il bien venir faire ici ? Ce n'est pas pour me voir, c'est certain ! La dernière fois, Gabriel n'osait même pas me regarder en face... »
Le fil de ses pensées furent interrompu par une silhouette imposante.
« Aziraphale. Cela fait longtemps. Viens, j'ai à te parler. » Ordonna Gabriel, habillé avec son chic habituel, l'inchangeable écharpe violette autour du cou.
Le susnommé se leva maladroitement de son siège et sous les yeux scrutateurs de ses collègues il suivit son ancien chef jusqu'à une partie des archives que plus personne ne fréquentait car elle rassemblait les dossiers des anges morts par le feu infernal.
« Nous avons notifié une pénétration dans la zone des oasis hier et selon les cloches de surveillance tu étais sur les lieux. Pourquoi ? »
Aziraphale se tordit les mains comme à son habitude « Je voulais simplement rendre visite à une connaissance humaine, voilà tout. Il n'y a rien de mal à cela, n'est-ce pas ? »
« En soi... » Gabriel fit une pause avant de reprendre, un air compatissant sur le visage. « En soi, non. Mais les humains que tu fréquentais ont tous eu la mémoire effacée de ton existence et des derniers jours avant l'Apocalypse. Simple histoire d'organisation tout ça, personne ne voudrait se souvenir d'une catastrophe. »
L'ancienne Principauté baissa les yeux, un sentiment de vide s'était emparé de lui écrasant les petites étincelles d'espoir qui pouvaient exister dans son esprit.
« C'est vrai ça, qui voudrait se souvenir ? Après tout, ils ne savent même pas que ça a commencé... »
« Oui, bon, c'est pas tout mais j'ai de plus gros chats à frire dans de l'huile de poisson fouetté moi. » Gabriel se leva et partit sans plus de cérémonie.
Aziraphale mit quelques minutes avant de comprendre ce que son ancien patron avait voulu dire puis soupira. « Il n'y a vraiment personne qui se souvient alors... Aucun humain... Et pas de Crowley. » Sa gorge se serra en disant le nom de son ami et sa vue se brouilla. « Combien de temps je vais encore le pleurer ? Ça fait 30 ans mais j'ai l'impression qu'on s'est séparés hier... Si seulement je pouvais oublier... » L'ange se recroquevilla sur le banc et invoqua les meilleurs moments qu'il avait passé avec Crowley, ne se rendant pas compte qu'un rai de lumière chaleureuse venait de se poser sur ses épaules, comme le ferait une couverture.
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Mon camp a gagné, je te l'avais dit
Fiksi PenggemarL'apocalypse a eu lieu. 30 ans plus tard Aziraphale a toujours du mal à s'en remettre, il ne peut pas oublier Crowley, les humains ou la Terre. Alors quand l'occasion se présente de renouer des liens, il en profite. Mais évidemment, ce n'est pas si...