Chapitre 6 (Mary)

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-"Vous avez été rappelées à la cour de France sur injonction de votre souveraine", tels sont les mots de bienvenue que Mlle Loyse, la gouvernante, adresse à mes amies, de son ton monotone.

Nous sommes dans mes nouveaux appartements et mes dames d'honneur reçoivent leurs premières directives. Assise sur un fauteuil un peu à l'écart, j'écoute d'une oreille distraite les règles de protocole que Mlle Loyse doit enseigner à mes amies.

-"En tant que dames d'honneur, vous devez la conseiller, la préparer, être responsable d'elle. Aux noces de la princesse Elisabeth, comme aux autres événements, Mary et vous devrez faire connaissance avec tous les invités royaux et les dignitaires."

Cette femme commence à m'ennuyer, et je n'apprécie pas beaucoup qu'elle parle de moi comme si je n'étais pas là...

-"Laquelle d'entre vous parle le mieux italien ?", demande-t-elle de sa voix hautaine.

Mes amies s'interrogent du regard. Finalement, Aylee se décide à prendre la parole.

-"Euh, je pense que c'est moi.", dit-elle, timidement.

-"Dans ce cas, vous tiendrez compagnie au cousin du pape."

Aylee hoche la tête, mesurant l'importance de cette rencontre : elle n'aura pas de droit à l'erreur.

-"Il n'a plus de dents, et il parle très vite !", ajoute Mlle Loyse en levant les yeux au ciel.

Mes amies ne parviennent pas à cacher leur amusement, et éclatent de rire. Moi non plus, je ne peux pas m'empêcher de sourire devant cette absurdité. Je plains Aylee !

Une fois la gouvernante partie, nous nous pressons autour de ma coiffeuse, qui regorge de trésors. Nous nous maquillons toutes, assises devant le miroir. Lola et Kenna s'appliquent une sorte de pâte rouge sur les lèvres, tandis que je saupoudre Aylee de fard à joues. Des servantes nous aident ensuite à enfiler de somptueuses robes que nous avons trouvé dans mon armoire.

-"Toutes ces robes viennent de Paris ?", demande Kenna.

-"Sans exception !", s'exclame Greer.

A cet instant, Lola sort du paravent, vêtue d'une magnifique robe-bustier blanche ornée de perles dorées.

-"Je suis sûre que si Coleen me voyait, il m'épouserait dans la seconde !", déclare-t-elle."J'ai l'air d'une femme, non ? Comme vous toutes !", ajoute-t-elle, les yeux brillants.

Je m'observe un instant dans le miroir. Lola a raison, j'ai déjà l'impression d'avoir grandi depuis mon arrivée.

-"Vous savez ce que j'ai envie de faire ?", dit soudain Aylee."Un petit tour ! Nous ne sommes pas venues ici depuis notre enfance, le château a dû changer ! Qui vient avec moi ?"

Sa proposition est accueillie par un concert de cris de joie. Je devrais peut-être moi aussi partir en repérage, mais une idée me vient à l'esprit.

-"Euh allez-y, je vous rejoindrai. Je voudrais revoir quelque chose...", dis-je à mes amies.

Je sors de ma chambre un peu après elles pour prendre le temps de trouver mon chemin. Alors, si je tourne à droite, puis à la seconde à gauche, j'atteindrai le couloir principal qui mène aux immenses escaliers du château. J'exécute donc cet itinéraire, et constate que je sais encore me repérer. Lentement, je m'accroche à la rampe, lève la tête, puis grimpe les marches qui me conduisent à mon passé. Je ferme les yeux, et l'espace d'une seconde, le décor change légèrement et je suis projetée 10 ans en arrière, à l'époque où je vivais encore à la cour de France. Dans mes souvenirs, je nous vois, François et moi... Deux enfants grimpant les marches une à une, dans un éclat de rire... Cette époque me manque. Lorsque que j'ouvre les yeux, j'ai atteins le sommet des escaliers. Je franchis la porte, et pénètre enfin dans ce lieu que je connais bien, mes anciens appartements. Rien n'a changé, tout semble être resté à la même place que depuis le jour de mon départ. Le petit cheval à bascule, le jeu de perles en bois... C'est comme si je n'avais jamais quitté cet endroit.

Mary Stuart : Long Live The Queen [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant