Chapitre 38 - James

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Anna lit, assise sur mon canapé pendant que je nous prépare à manger. Sophia est partie pour la semaine, je crois qu'elle a rencontré quelqu'un, mais elle ne m'a rien dit de spécial.

J'observe ma petite amie de loin et je me dis que j'ai une chance incroyable de l'avoir rencontré. Cette fille dégage une classe naturelle, j'aime sa façon de me regarder, sa façon de me sourire lorsqu'elle me voit chaque matin, la façon dont elle me parle. J'avoue ne pas avoir pensé à cette issue de notre relation au début, jamais je ne m'étais dit qu'elle pourrait voir en moi quelqu'un qui puisse la protéger et encore moins quelqu'un en qui elle peut se confier. Je ne pensais pas avoir le droit de vivre une telle histoire, sans accroc, et tout simplement je ne pensais plus avoir le droit à une relation saine.


Nous avons terminé de manger les lasagnes que je nous avais préparé et alors qu'elle me demande ce qu'on peut faire de notre après-midi, j'ai déjà une idée derrière la tête.

– J'ai envie de te montrer quelque chose, que tu n'as pas encore vu.

– Oh, qu'est-ce que c'est ?

– Tu verras. Je finis de débarrasser et je te montre, dis-je en emportant une assiette vers le lave-vaisselle.

– Mais attends, je vais t'aider, déjà que tu as tout fait tout seul avant.

– Ça ne me dérange pas, tu sais.

Elle m'aide et en moins de deux tout est rangé et nettoyé. Je perçois bien son impatience quant à ce que je viens de lui dire. Et je dois admettre que mon appréhension monte petit à petit aussi.


Je l'emmène dans la grande véranda et mon stresse grimpe encore, je tente de me calmer, de me dire que si je fais ça c'est pour elle mais pour moi en même temps. Je lis dans ses yeux de l'incompréhension, je ne pense pas qu'elle se doute une seule seconde de ce que je m'apprête à faire.

Je soulève le grand drap qui cache l'instrument et elle écarquille les yeux, de surprise, et je vois aussi qu'elle est intriguée.

– Tu... tu sais en jouer ? demande-t-elle en s'approchant de l'instrument en question.

– Oui, depuis que j'ai l'âge de parler.

Tout en m'installant sur le tabouret, je lui fais signe de venir à mes côtés. Elle s'exécute, non sans esquisser un grand sourire. Qu'est-ce que j'aime quand elle sourit. Son visage s'illumine, puis elle pose une main dans mon dos.

– Je n'ai pas joué depuis longtemps, alors pardon si je fais des fausses notes.

– Si tu crois que je vais les remarquer !

Nous rions et je commence à jouer quelques notes, juste comme ça. Elle ne dit plus rien, attentive à mes moindres gestes.

Je prends une grande inspiration et je me mets à rejouer, comme avant. Je me souviens de quelques morceaux que j'avais appris par cœur, mais parfois il me manque des notes, j'improvise.

Je sens le regard d'Anna posé sur mes doigts habiles. J'enchaîne un autre morceau et je ferme mes yeux. J'ai l'impression qu'on me ramène six ans en arrière. Mais je savoure chaque instant, chaque doigt que je pose sur une touche est un pas en avant. Chaque accord que je réalise est un pas en avant. Chaque fois que je termine une strophe de la chanson que je me chante intérieurement est un pas en avant. Tout ça, grâce à Anna qui a compris implicitement toute l'importance que j'accorde à ce moment. Elle ne pose aucune question, elle ne parle pas non plus, elle se laisse simplement guidée par la mélodie et pose sa tête contre mon épaule.

On n'oublie pas [Publié en auto-édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant