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SI ON M'AVAIT DIT UN JOUR QUE JE ME RÉVEILLERAIS DANS LE BATEAU DE WARD CAMERON, J'AURAIS RI TRÈS FORT.
Et pourtant.
Je suis dans la petite salle de bain du bateau, en train d'inspecter mon reflet dans le miroir.
Ce n'est pas très joli à voir.
J'ai une plaie sur la mâchoire que Sarah a gentiment recouvert d'un pansement, plusieurs sur les coudes et mon dos est strié de blessures. Celles sur ma main se sont rouvertes, d'ailleurs.
Mon ventre est décoré d'ecchymoses.
Je tire la langue. Une minuscule fente indique que je l'ai mordue.
J'observe mes yeux. Ils sont noirs et contrastent avec ma peau extrêmement pâle. Je ne les aime pas. Ni mes iris, ni ma peau, ni rien.
Jessica a hérité de la beauté de ma mère. Elles ont toutes les deux des beaux cheveux blonds et soyeux, des yeux clairs qui respirent la bienveillance et des traits doux qui inspirent la confiance.
Et moi, j'ai récolté le physique d'un père que je n'ai connu que quatre petites années.
Je ne me souviens presque pas de lui.
Enfin, bref.
Je suis le vilain petit canard de la famille.
C'est la porte qui s'ouvre en grand, manquant de me péter le nez, qui me ramène à la réalité.
— Putain ! je m'écrie. Fais gaffe, Sarah !
C'est une brunette d'environ treize ans qui me fait face. Je peux sentir son regard s'attarder sur mes blessures.
— Tu n'es pas Sarah.
— T'es qui ? me demande-t-elle en remontant ses lunettes sur son nez.
Très bonne question.
— Euh... Une connaissance de Sarah. Elle m'a hébergée pour cette nuit. Et toi, tu es ?
— Wheezie. La sœur de Sarah.
— Ah.
Je me racle la gorge. C'est un peu gênant.
— Bon, euh, je vais partir du co—
J'entends des voix au-dessus de nous. Celle de Sarah et celle de... John B ? Je me rue dans les escaliers en poussant Wheezie.
Je m'arrête en haut, juste assez proche pour les voir et écouter ce qu'ils disent mais assez loin pour qu'ils ne me remarquent pas.
— S'il te plaît, ne lui dis rien, supplie John B. Ou il me virera.
