Un dernier regard...

10-Victoria

Victoria

Je suis gênée, ne sachant pas trop quoi dire. Le fait que sa mère sorte avec mon père me perturbe beaucoup mais étrangement, ce n'est pas ce qui me trouble le plus. J'ai du mal à réaliser que l'adulte qui m'enseigne la littérature et que j'ai l'habitude de vouvoyer se trouve dans ma maison. J'ai du mal à réaliser le fait d'être dans un environnement aussi intime avec cette femme que je ne connais pas réellement. Ici, chez moi, je n'ai pas à faire semblant d'être ou à prétendre d'être quelqu'un que je ne suis pas. Très peu de personnes ont eu l'occasion de rencontrer mon père et de pénétrer dans ma maison ; je n'invite que les personnes en qui j'ai réellement confiance et je peux les compter sur les doigts d'une main alors oui, ça me fait bizarre que ma prof soit ici, avec moi.

Mais sa présence ne me dérange pas. J'ai envie d'apprendre à la connaître. J'ai surtout envie qu'elle ait envie de me connaître...

Je décide de briser le silence :

« Pas une fan d'avocat ?»

L'adulte me regarde curieusement et m'avoue :

« Non, j'ai toujours eu du mal avec ce fruit.
__ Et avec le métier... »

J'ai peur d'être allée trop loin mais me détends en apercevant un petit sourire se dessiner sur les lèvres de l'adulte.

« Ça s'est mieux passé que ce que je pensais, lâche soudainement ma professeure.

__ Je vous avoue que je ne savais pas trop à quoi m'attendre non plus. Mais ça allait.

__ Comme je te l'ai dit, Victoria, tu peux me tutoyer.

__ Oui, désolée. Je vous vois tellement comme ma prof que j'ai du mal à v-te tutoyer.

__ Tu arrives à tutoyer ma mère mais tu as du mal avec moi ? elle me demande en haussant un sourcil.

__ Désolée », je réponds en souriant, embarrassée.

Ma professeure se lève de sa chaise et croise les bras :

« Bon, puisqu'on en a un pour un bon moment, ça te dirait de me faire visiter ?

__ J'ai une meilleure idée, je dis en me levant à mon tour. Suis-moi.»

Nous sortons de la salle à manger et parcourons le grand salon avant de se retrouver devant la cage d'escalier. Nous escaladons les marches et arrivons dans le long couloir qui mène aux chambres –la mienne, celle de mon père, et les chambres d'amis, les membres du personnel logeant dans des chambres au sous-sol. Au lieu de prendre la direction de ma chambre, je prends la gauche, jusqu'à arriver au fond du couloir ou se trouve une porte toute blanche.

« Après vous, pardon, toi», je dis en me plaçant derrière Angela, lui faisant l'honneur d'ouvrir la porte.

L'adulte me regarde, l'air intrigué, et elle tourne la poignée, nous offrant l'accès à ma pièce favorite de la maison.

« Wow», murmure ma maîtresse en s'avançant dans l'énorme bibliothèque, pièce dans laquelle je passe une grande partie de mon temps.

Je regarde l'adulte faire le tour des rayons, effleurant les dos des centaines de livres soigneusement rangés sur des étagères impeccables.

Au fond de la bibliothèque se trouve un petit coin lecture où sont disposés trois fauteuils faisant face à une cheminée. Ironiquement, un énorme écran plat est fixé au mur.

Je le fixe en me mordant la lèvre, perdue dans mes pensées.

Après avoir terminé sa contemplation, ma professeure me rejoint et suit mon regard.