Des rires d'enfants le réveillèrent. Sa tête le faisait souffrir. Il éternua et se rendit compte que le sol de terre battue était couvert d'une épaisse poussière. L'odeur était extrêmement désagréable. Il se redressa et poussa un cri. Le bras droit l'élançait terriblement. Il devait s'être fracturé l'humérus. Il agita la main gauche toujours valide devant son nez tant l'air qu'il respirait renfermait des arômes nauséabonds. Mais où était-il ? ...
L'endroit était obscur. Seule émanait du plafond une faible lueur, certainement la lumière de sa chambre, diminuée par l'imposante armoire qui lui faisait barrage.
Il arrivait à peine à deviner le décor. Il n'y avait plus un bruit. Il était seul dans ce curieux lieu. Il en déduisit que ces voix perçues à son réveil n'étaient que le fruit de son imagination.
Il se leva enfin. Il fallait qu'il sorte de là. Il lui était impossible de remonter vers sa chambre. Il fallait qu'il trouve autre chose.
Les images lui paraissaient floues à certains moments. Le choc en tombant certainement.
Machinalement, Poirot glissa la main dans sa poche pour constater que le calepin était toujours là. Ce n'était pas lui qui le sortirait de ce vilain piège mais il était persuadé que lui et lui seul le mènerait à la résolution de cette énigme.
En sortant la main de sa poche, il effleura du bout des doigts la boîte d'allumettes. Il pensa alors que la bougie avait dû tomber, elle aussi, et qu'à tâtons, il la retrouverait au sol.
Il s'accroupit donc et caressa le sol terreux afin de retrouver ce petit tube de cire. Enfin, il se releva, l'objet de ses convoitises à la main. Il saisit une allumette dans la boîte et ralluma dans la hâte la seule source de lumière à sa disposition.
***
Cette pièce était à l'abandon depuis bien longtemps maintenant. Ses yeux s'accommodaient du peu de clarté et bientôt il discerna plus distinctement les objets qui l'entouraient.
De chaque côté, sur les deux grands pans de murs, deux interminables bancs de bois au dossier de plus d'un mètre de haut se faisaient face. Fixées au point le plus élevé des dossiers en lambris, des patères de fer forgé se tenaient encore péniblement, espacées les unes des autres d'une cinquantaine de centimètres. Certaines pendaient dangereusement. Le bois fragilisé par l'humidité ambiante avait éclaté là où les clous avaient été plantés.
Il approcha la bougie pour deviner, en dessous d'un des tubes de métal travaillés, les initiales gravées : E.C. Il inspecta son voisin, d'autres initiales : E.M.
Cela ressemblait à une grande salle de réunion. Il pensa aux hommes aux longues robes noires de cérémonie. Serait-ce une pièce réservée autrefois à la secte qu'il présumait ?
Dans ce cas, il existait forcément un chemin menant à la cave octogonale qu'il avait découverte quelques nuits auparavant en suivant le passage secret de la chapelle.
***
Son bras droit le faisait souffrir. S'il était au sous-sol, comme il paraissait évident, il avait dégringolé de la hauteur de deux étages. Il estimait avoir beaucoup de chance de s'en être aussi bien sorti.
Il se résigna à avancer vers l'autre extrémité de la pièce, espérant y trouver un passage pour rejoindre l'extérieur.
En effet, après quelques pas, il distingua un trou béant noir obscur. Il déglutit. Il avait froid et il se sentais très fatigué. Il n'avait pas vraiment le choix. Le temps que les autres, restés dans le salon, s'inquiètent de son absence et pensent à passer par sa chambre, il avait le temps de faire les cent pas dans ce cloaque.
Un coup de vent violent fit vaciller la flamme de sa bougie. Il entendit soudain comme des battements d'ailes. Cela se rapprochait de lui mais il ne pouvait rien distinguer dans l'obscurité.
De petites pattes griffues s'enfoncèrent dans son crâne. Il se débattit de mon bras valide. Sa main entra en contact avec un animal velu qui inséra ses dents pointues dans sa paume. Il cria. L'animal lâcha prise. Il entendit les battements d'ailes s'éloigner dans la petite salle dont il venait de sortir.
***
Sa première et, il l'espérait, dernière rencontre avec une chauve-souris...
Il avait toujours porté beaucoup de mépris aux anciens qui clouaient ces petites bêtes à leurs portes pour conjurer le mauvais œil. Mais cette dernière expérience lui donnait toute envie, à lui aussi, de donner du fil à retordre à ces sales bestioles...
Il s'agrippa avec peine au mur de pierre suintant d'humidité qui jalonnait son périple. Ce couloir était sans fin. Poirot essuya son visage mouillé de sueur de son revers de chemise et s'aperçut que sa main dégoûtait d'un chaud liquide. Il l'approcha de ses lèvres. L'animal avait mordu assez profondément dans la chair, déduisit-il au goût du sang. La fièvre devait maintenant l'envahir. Il ne tenait plus debout. Son corps faillit sous ses jambes chancelantes. Il sentit l'odeur de la vieille terre à proximité de ses narines alors qu'il fermait les yeux, éreinté.
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Fanfiction Poirot : Les chiens de Grangemouth
Mystery / ThrillerHISTOIRE TERMINEE Lire "Une pause a Helmsley" et "La femme en bleu" auparavant est préconisé Nouvelle enquête de Hercule Poirot Un automne à Stirling. Les landes sont écrasées par les brumes humides. Un corps est émergé de l'étang du parc du manoir...