CHAPITRE 7

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JASON

Je me souviens parfaitement de la fois où j'ai présenté mon premier petit-ami à mes parents. J'avais dix-neuf ans et je l'avais rencontré dans mon école de danse. La bisexualité d'Elijah ne les avait jamais dérangé alors j'avais pu leur annoncer mon homosexualité sans crainte. Ils n'avaient rien répondu. Ils n'avaient rien à répondre. Cela ne changeait rien à nos vies. Ils étaient enchantés de rencontrer Loan. Ils étaient enchantés de rencontrer celui qui pouvait me faire sourire. Eli ne l'était pas.

Là où Elijah était brun, Loan était roux. Là où Elijah avait les yeux bleus, Loan les avait vert. Ils étaient aux antipodes l'un de l'autre et ça me convenait très bien. On ne pouvait pas me reprocher de les comparer. Malheureusement, Loan n'avait pas le truc qui me rendait dingue chez Eli. J'avais beau être profondément attaché à lui, il n'était pas celui que j'aimais du plus profond de mon cœur. Ce fut en les voyant assis l'un à côté de l'autre que j'avais pris conscience qu'oublier l'ami de mon frère serait bien plus compliqué que je ne le pensais.

Ce dernier avait profité que je parte seul dans la salle de bain afin de me rafraichir après la route pour me suivre. Il m'avait empêché de fermer la porte devant lui et s'était faufilé dans la pièce. Il m'avait ignoré quand j'avais retiré mon tee-shirt et je me demandais à quel point l'homme que j'étais devenu était invisible à ses yeux.

Je n'étais pas narcissique, je savais que je plaisais. On me l'avait suffisamment fait remarquer à l'école et dans les spectacles. J'aimais ça, plaire. Sauf que ce n'était jamais celui que je souhaitais qui me le faisait comprendre. Lui, il semblait complètement insensible à mes abdominaux que la danse avait fuselé. Il semblait insensible à ce V qui disparaissait sous mon boxer, alors que j'avais retiré mon jean. Il avait beau être attiré par les hommes, je ne faisais pas partie de cette catégorie à ses yeux. Je restais l'éternel gamin.

Je m'étais demandé s'il fallait que je sois nu devant lui pour qu'il réagisse enfin. Il avait pris la parole, m'interrompant dans mes gestes. Il avait dit « ce garçon n'est pas pour toi » et « il n'est pas assez bien pour toi ». J'avais haussé un sourcil. Pourquoi me disait-il ce genre de choses ? « Jay ? » Je n'avais pas répondu. Je n'avais rien à lui répondre. De quel droit jugeait-il mes fréquentations ? « Jason, je te parle. » J'avais fini par répondre. Je lui avais dit « pourquoi ça t'intéresse ? » et « qu'est-ce que ça peut te faire ? ». Je m'étais entendu m'exclamer « je me fiche bien de ton avis concernant mes mecs ! ».

Après ça, il avait quitté la pièce en silence et j'avais pu me glisser sous le jet d'eau froide. J'avais laissé l'espoir d'une quelconque jalousie glisser avec l'eau dans le siphon pour rejoindre les canalisations. Je ne devais pas espérer. Elijah n'était pas jaloux, il jouait seulement au grand-frère protecteur. Et il était hors de question qu'il joue ce rôle. Ce n'était ni le sien, ni celui que je souhaitais pour lui.

Quand je les avais rejoint dans le salon, Loan était installé entre Nick et mon père. Eli, face à lui, semblait lui faire passer un interrogatoire. Cela faisait rire ma mère, pas moi. Je m'étais approché d'eux et avais passé ma main dans les cheveux de mon petit-ami pour attirer son attention. Il m'avait offert un sourire, que je le lui avais rendu. Il avait repris sa position pour répondre à Elijah. Il était occupé à lui raconter comment on s'était rencontré à l'école. Que j'étais en hip-hop new style, qu'il était en hip-hop contemporain et que nous avions eu une chorégraphie à créer ensemble. Il avait ajouté qu'il avait été ravi de tomber sur moi parce que j'étais une petite célébrité dans l'école.

À ces mots, Elijah m'avait jeté un coup d'œil et je m'étais contenté de hausser les épaules. J'étais doué, il n'avait eu qu'à venir me voir danser plus tôt. Il avait eu mille occasions, il n'avait eu qu'à les saisir. Ma mère s'était extasiée, la fierté irradiant d'elle, et je l'avais laissé m'enlacer.

J'avais eu mes examens haut la main et mes parents avaient sorti le champagne. Nous avions fêté le début de l'été, comme à notre habitude, et Loan était heureux de faire partie de cette tradition. J'avais senti le regard d'Eli sur nous toute la soirée, je l'avais ignoré. Je me fichais qu'il soit inquiet pour moi. Je ne voulais pas de son inquiétude. Je voulais bien des choses de sa part, mais pas ça.

La nuit tombée, il était rentré à son appartement et j'avais rejoint ma chambre avec Loan. Il m'avait embrassé, m'avait dit qu'il adorait ma famille. Bien sûr, il incluait Elijah dans le lot. Je n'avais pas eu le courage de le contredire. Je savais au fond de moi que je ne pouvais pas continuer à être avec lui alors que revoir Elijah avait réveillé tant de choses. Il allait falloir que je lui parle. Pas de suite, pas alors que je me sentais aimé pour ce que j'étais aujourd'hui. Et non ce que j'étais il y a neuf ans.

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