« 1 Parmi les déesses dont la nature paraît fort alambiquée, la première qui me vient à l'esprit est ma sœur, Artémis. Sagittaire et vierge éternelle, compagne des nymphes danseuses et des veneurs expérimentés, Artémis fut vulgarisée par ce simple rôle de chasseuse chez les mortels. [...] Artémis connut l'un des plus grands et célèbres cultes chez les Grecs comme chez les Romains sous le nom de Diane. [...] 2 Les épopées homériques firent d'elle cette Πότνια Θηρῶν, la « Maîtresse des animaux » : reine du monde sauvage de la faune et de la flore qui la composent, Artémis s'attribue son aspect sauvage, dangereux et inquiétant. Souvent figurée avec la tête monstrueuse d'une Gorgone, elle prend pourtant soin des jeunes animaux qu'elle protège. De cet aspect traditionnel, elle devint l'Ἀγροτέρα qui abat de ses flèches ses proies et tous ceux qui lui portent préjudice. Nombreux furent ceux qui succombèrent à ses traits, ainsi qu'à ceux de son frère Apollon : les Niobides, Actéon et les Géants lors de la Gigantomachie. [...] 3 L'Odyssée finit par peindre la déesse accompagnée de jeunes filles : maîtresse d'une mosaïque de nymphes qui chassent, dansent et jouent dans les montagnes, Artémis fut Κελαδεινή, la « Retentissante ». De cette forme découla son effigie que se plurent à aimer les sculpteurs : vêtue d'un chiton court, elle porte un carquois plein de flèches et bande son arc ; accompagnée d'une biche ou d'un cerf, elle incarne la jeune fille intrépide à la chasse. [...] 4 Déesse vierge par excellence, à l'instar de moi-même ou de notre tante Hestia, elle est celle qu'on ne peut toucher ni voir nue sous peine d'un châtiment exemplaire. Artémis devint ainsi l'antonyme de sa consœur Aphrodite, dont les travaux ne sauraient l'atteindre, auxquels elle cherche à échapper par tous les moyens, selon le bon vouloir de notre père Zeus. [...] 5 Pourtant loin de son statut de chasseresse divine dont les mortels de ce temps se souviennent uniquement, Artémis fut également la protectrice du monde sauvage et indompté. Refusant le retour du monde civilisé au monde sauvage, elle protège à jamais le passage entre les deux. Car le monde sauvage et le monde civilisé ne sont jamais éloignés, mais ne doivent en aucun cas se toucher. [...] La chasse faisait partie intégrante de l'éducation des jeunes qui intègrent alors leur cité. L'adolescent pénètre dans le monde sauvage, mais toujours dans un contexte de groupe avec ses aïeuls et pairs, discipliné et contrôlé. [...] 6 Courotrophe, Artémis protège les petits, animaux et humains, mâles ou femelles, et les fait grandir jusqu'à ce qu'ils deviennent des adultes accomplis. La jeune fille traverse le seuil de l'adolescence et devient mère et épouse sous son accord ; l'éphèbe devient un citoyen-soldat selon sa volonté. Que ce fût à Sparte sous le nom d'Ὀρθία, ou à Brauron sous le nom de Βραυρωνία, les jeunes filles nubiles et les jeunes garçons grandissaient sous l'œil bienveillant et intraitable d'Artémis. Ils se détachaient du monde sauvage qu'est leur adolescence pour pénétrer dans celui de l'adulte qui se mariera et enfantera afin que se poursuive la pérennité de l'espèce humain. [...] Car telle est la volonté des dieux omnipotents ! [...] 7 Cet enfantement s'est souvent retrouvé sous l'égide d'Artémis qui s'associa à Ilithye, notre sœur. Artémis protégeait les accouchements et les exécutait sans douleur avec l'assistance d'Ilithye, un rôle venu de sa propre naissance – car Artémis aida sa mère Létô à accoucher d'Apollon, alors qu'elle venait d'atteindre l'île d'Ortygie, laquelle fut la seule à l'accepter en dépit des ordres d'Héra l'Acariâtre. [...] 8 L'enfantement résultant du mariage, Artémis fut également comptée parmi les divinités à qui l'on sacrifiait avant la cérémonie officielle et la nuit de noces. Les jeunes filles consacraient une partie de leur chevelure et leurs jouets d'enfants à la déesse, dansaient en son nom afin de s'assurer de son soutien lors de leur mise-bas, d'un même geste solennel et pieux de Thésée lorsque celui-ci arriva pour la première fois à Delphes et sacrifia sa chevelure à Apollon – la naissance d'une coutume ancestrale que les Ioniens pratiquaient dès lors. [...] 9 Mais non seulement maîtresse des passages des âges chez les jeunes mortels, Artémis guidait les soldats à la guerre, afin d'empêcher le retour de ces âmes sanguinaires au monde sauvage. [...] Déesse aux multiples ruses, maîtresse de la nuit et de la surprise, elle inspira le stratagème aux Hypérésiens face à l'armée sicyonienne ; elle perdit l'armée du général mède Mardonios, époux d'Artazostre, fille de Darius Ier, roi achéménide et père de Xerxès Ier, dans la région du golfe de Corinthe afin que les Mégariens puissent vaincre les Perses durant les guerres médiques. [...] 10 Ainsi déesse de la chasse, du mariage, courotrophe, protectrice des accouchements et de la guerre, Artémis interagissait toujours comme la déesse qui délimite les marges de la sauvagerie et de la civilisation, les nécessaires passages, tout en maintenant strictement les frontières au moment où elles se trouvent franchies. [...] 11 L'Olympienne qui connut l'un des plus grands cultes dans tout le monde connu grec, et bien au-delà ! »
Mémoires d'Athéna VI, 77
(IIIe siècle de notre ère)
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Kháos, tome 2 : Le Seigneur des Mers
Fantasy« Jouir de l'immortalité est un don comme une malédiction. Mais pour un Primordial, progéniture de Kháos, c'est avant tout le devoir inéluctable qui prédomine. » Désormais fort de son identité, de son épée et de deux des Dragons Primordiaux, Daímôn...