Par reflexe, je couvre ma tête de mes deux bras et me penche en avant, sentant de nombreux débris chuter sur moi et mes habits se couvrir d'une poussière blanche. Des cris se font entendre de l'autre côté des murs de livres, et la fumée que nous avions sentie est maintenant en train de former un tourbillon gris sombre autour de nous. On sent que la température monte très vite, et je me met déjà à transpirer. C'est là que nous réalisons enfin ce qui se passe : quelque chose a explosé, et un incendie est maintenant en train de se propager dans la bibliothèque.
Je me lève en même temps que mon amie et on quitte rapidement la zone d'exposition en essayant de ne trébucher sur aucune planche, les oreilles sifflantes à cause de l'intonation bruyante. Je plaque le col de ma chemise sur mon nez pour filtrer l'air impossible à respirer, mais notre chemin vers la sortie se transforme vite en parcours du combattant : la fumée me brûle la rétine et les poumons, et les larmes qui me montent aux yeux me brouillent la vue. L'incendie est en train de réduire en cendre la façade droite de la salle, et je suis soulagée en constatant qu'aucun élève ne semble coincé là-bas. Pour éviter les flammes, je décide de bifurquer vers la gauche et de contourner un îlot de tables, même si cela voudra dire que je vais devoir rester plus longtemps dans ce brouillard asphyxiant.
Dans ce décor de planches de bois calcinées et de fumée, tout se ressemble, et je suis bien vite égarée. Je ne sais même plus d'où je viens et vers où je dois aller. En me reculant, je remarque enfin que j'ai perdu Victoria et je sens mon coeur rater un battement à l'idée de l'avoir laissé entre les flammes. Je décide de retenir ma respiration et d'essayer de la retrouver, refusant de sortir d'ici sans être certaine qu'elle a réussit à s'enfuir.
En revenant sur mes pas, je me cogne sur une pile de livre et je tombe à la renverse. Un petit sanglot m'échappe quand je sens que ma cheville s'est légèrement tordue, mais je tente de garder mon calme : je dois retrouver mon amie et sortir d'ici aussi vite que possible.Evoluant au ras du sol, je toussote et essaie d'inspirer, mais l'air se bloque dans ma trachée et je sens la poussière se déposer dans mes poumons. Couverte de sueur à cause de la chaleur, j'essaie de l'appeler, mais ma voix est trop rauque, et le son qui dort de ma gorge ressemble plus à un croassement qu'un cri.
J'accélère la cadence, certaine que je finirais par la retrouver pour que nous puissions sortir et retrouver l'oxygène en dehors du bâtiment. L'alarme incendie se déclenche enfin, assourdissante, et la voix du directeur résonne dans les hauts parleurs, nous indiquant à tous de nous rendre dans le jardin, loin des bâtiments.
Finalement, toujours à quatre pattes, je finis par entrer en contact avec une substance chaude et poisseuse. Comme je ne peux rien distinguer, je continue à tâtonner et à essayer de trouver quelque chose. Mes vêtements sont maintenant imbibés de ce même liquide mystérieux, et ma main finit par se poser sur quelque chose : une jambe ?
Je secoue la personne et me force à cligner des yeux pour enfin y voir quelque chose, et là, un haut le coeur me prend : le sol est couvert d'une flaque de sang, et je baigne dedans, près d'un corps inerte. Quand je constate que la personne a la peau rose, j'ai l'impression de tomber d'un immeuble de trente étages. Je m'approche du visage de Victoria, et je pousse un cri d'horreur face à la vision cauchemardesque qui se joue devant moi.
La sirène est couchée, les yeux grand ouverts et la gorge tranchée.
Je respire par à-coups et hoquette, essayant en vain de remplir mes poumons. Je secoue la tête vigoureusement et m'éloigne de la carcasse de mon amie en rampant. À cause de son sang sur mes paumes, mes mains glissent et je peine à avancer, le corps secoué de tremblements et les poumons en feu. Mon cœur bat si fort à cause du choc et de la panique que j'ai l'impression de le sentir lâcher plusieurs fois.
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ALCARIA ACADEMY
FantasyPoussez les portes d'Alcaria, l'académie qui offre à l'humain une seconde chance dans cet univers où il n'a plus sa place. Couverture par la queen : @JOTAGGUK