3. Couronné.

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                                                              .oOo.

   2ème jour du 2ème cycle d'Énant.
                                                  An 506 du calendrier andorrien.

Les rayons du soleil filtraient à travers les fenêtres en verre et venaient saluer un lit aux draps déjà vide.

Assis sur une chaise blanche, scrutant les contours à peine illuminés de cette cité qu'il n'avait, la veille, pas pu contempler, Azurin regardait le soleil se lever et éclairer petit à petit les rues pavées de Prym au rythme de la lente course du temps. Mais le spectacle qu'offrait la ville qui se réveille sous le chant des oiseaux du matin n'absorbait que partiellement son attention.

Les cernes sous ses yeux témoignaient de sa nuit blanche. Il n'avait de cesse, depuis que l'on l'avait assigné pour ne pas dire enfermé dans cette chambre, de se remémorer les évènements de la veille. Toutes les images s'imposaient à son esprit de façon claire, nette et précise, il pouvait décortiquer chaque expression chaque parole des témoins du trépas de son souverain, son père.

Le bain aux parfums enivrants des fleurs des forêts et les draps de soi à la douceur sans pareil n'avaient su le détourner de ses pensées dangereuses. Furieux était l'ouragan qu'elles formaient et qui ballotait son esprit en tous sens.

La promesse arrachée par son père avant de rendre l'âme était désormais son geôlier, prisonnier du serment qu'il avait fait, il se retrouvait à présent seul dans cette cité inconnue où mille dangers le guettaient. Le mal le narguait et lui promettait tortures et sévices, il ne se cachait point. Car ses ennemis, il en connaissait les noms, les visages.

Il se maudirait s'il le pouvait. Traitresses avaient été ses émotions, colère et chagrin s'étaient associés pour le tromper, embrumer son esprit et le pousser à commettre l'irréparable, à prononcer l'inaliénable.

Le bruit de la ville qui se met à bouger le sortit momentanément de sa torpeur, l'odeur du pain du matin vint lui titiller les narines et lui rappeler sa condition de mortel et un mortel se devait de se sustenter, il n'en avait eu guère le temps, tout s'était enchaîné si vite.

C'était lui le roi? Soit, autant tirer avantage de sa situation. Il était prisonnier? Bien, il serait un prisonnier exigeant . Il se leva brusquement de sa chaise, ses bottes vernis claquèrent la dalle et l'emmenèrent prestement devant la porte de sa prison.

Le concert de tambour improvisé dans leurs dos surpris par cent fois les gardes assignés à la protection de l'invité, même si officieusement il s'agissait de la surveillance du prisonnier, la reine ne semblait pas faire de différence. Les deux hommes se regardèrent en chien de faïence. Que faire ? Les ordres avaient été clairs: ne pas ouvrir.

- Ouvre-lui la porte! Se risqua le premier.

- Pourquoi moi? S'offusqua le second. Nous avons reçu des ordres, si tu tiens à tourner contre toi la furie de la reine, je t'en prie ne te gênes pas, ouvre-lui donc.

- Je suis le futur roi, s'il y a quelqu'un ici dont il faut éviter les foudres c'est bien moi. Ouvrez cette porte. Maintenant!

Le premier des deux gardes ouvrit la porte, son regard croisa deux yeux bleutés qui le firent ciller.

ROYAL ( Chroniques d'un souverain en herbe)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant