Chapitre 66 - Puis tout ne fut qu'obscurité.

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Et si j'étais plus bouffé de l'intérieur que je ne le pensais ? Se pourrait-il que je pourrisse de plus en plus, rien qu'en restant là? Est-ce que ma toxicité touchait les autres également ?

Le baiser de Livaï me revint avec force dans la mémoire, faisant vibrer mon corps.
Non. Je me le persuadais mais non, Jules avait raison, il avait sûrement pitié. Et même si il ne l'avait pas, par miracle, il fallait que j'arrête d'empiéter sur son existence. Délivrer les autres une bonne fois pour toutes.
Il ne souffrira plus de me voir comme ça, ça le libèrera d'un poids qui est mien.

Il me revint en tête les paroles de ma grand-maman. Elle m'avait dit quand j'étais enfant, alors que je pleurais pour une bêtise que j'ai fait : "apprend-toi à t'aimer comme tu es, et quand tu auras trouvé la raison de pourquoi tu te détestes... ça t'aidera... tu peux faire pleins de choses pour te sentir vivant, je suis avec toi, ne t'inquiète pas Eren."

Elle est morte peu de temps après, mais ces paroles ne m'ont jamais quittées. Pourquoi ? Simplement parce qu'elle avait déjà compris ce qui me rongeait depuis mon plus jeune âge.

Je me levai, du sol où je m'étais effondré sans même le remarquer, et allai par la porte de derrière le musée. Je croisai Auruo qui fumait à l'extérieur. Je lui demandais où était Emily, ce qu'il me répondit avec mon noiraud. Rassuré, je compris qu'il avait fait le tour pour fûmer et se libérer d'un stress que la clope lui détendait. Mais cela détruisait également ses poumons. Je lui affirmai que je rentrai, comme notre hôtel n'était pas loin. Je me sentais mal, que je lui ai dit. Il n'émit pas d'objections, même si il me regarda bizarrement. Bon, okay. Notre hôtel est à 30 minutes à pied.

Merde. Merde. J'en ai besoin maintenant. Il.. il faut que j'y aille. Je vais craquer. Faut que je m'éloigne des gens, je ne veux pas qu'on me voie pleurer.

Pourquoi ? Pourquoi maintenant alors que tout se passait bien !?
Il y a Emily. Livaï. Sans compter Jean et Sasha. Et Armin. Mes parents. Tous.

Je peux pas.

« Tu n'as pas le choix. »

Je fais le con alors que j'en ai pas le droit maintenant. Je fais tellement n'importe quoi...
J'avais tout eu. Un baiser de celui que j'aimais, une étreinte, une petite soeur en sécurité, des amis en bonne santé, des parents heureux... pourquoi continuer à tenter le sort ?

Je ne savais que trop bien que Livaï allait arrêter de s'intéresser à moi au bout d'un moment... si seulement il avait commencé.

« Arrête de résister. Tu le sens sur toi non ? Ta peau n'es plus qu'immondice. »

J'entendis Auruo refermer la porte, et rentrer dans l'habitacle chaud, alors que je m'enfonçais dans la soirée froide et glacée. Je commençais à me sentir libre, de plus en plus vivant aux portes de la mort.
Je n'avais pas dit un dernier au revoir. Cela me pesait presque. Mais cela aura été comme si tout allait bien non ? Pas de au revoir, pas de départ non ?

« Ils n'ont pas besoin de ta présence, pars maintenant. »

Je me mis en route, avec pour seule protection une petite veste que j'affectionnais beaucoup et mon sac à dos.
Mes écouteurs dans les oreilles, je commençai à me laisser aller.
Je quittais tout comme ca, mais au moins j'étais imprévisible pour cette fois. J'en avais marre de rater et de me maudire plus à chaque fois.
La forêt, elle, ne fut pas compliquée à dénicher. Pas moins que le parcours Vita, ni le beau et dangereux pont.

Ecouteurs avec de la musique dans les oreilles, seul, je pus enfin laisser libre cours à ma peine et ma douleur. Je levai d'abord les yeux vers le soleil qui se couchait et projetait ses rayons incandescents sur la rivière folle, puis laissai couler librement mes larmes, qui ne demandaient qu'à partir, tout comme mon âme torturée jour après jour.
Je pourrai peut-être toujours apprendre à m'aimer ?
Jamais je ne m'aimerai. Je me déteste.

My Shitty BratOù les histoires vivent. Découvrez maintenant