trop vite

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Sous le porche de Gabin, nous attendions depuis déjà vingt bonnes minutes. Nous étions trempés. Nous nous partagions la place sous le petit rebord au dessus de sa porte.

《On y va. Il viendra pas. Il doit faire la gueule.
- Nan. Si on s'en va si facilement il va être déçu de nous.
- Luna, on va juste choper la crève.》

Pour toute réponse, je sonne une énième fois à sa porte.
À notre grande surprise, c'est sa mère en peignoir qui nous ouvre. Elle avait l'air de tout juste se réveiller.

《Les enfants, je travail de nuit, s'il vous plaît, laissez-moi dormir. Gabin est même pas là en plus.
- Comment ça il n'est pas là ? Avec cette flotte ? demande Ethan
- Je sais pas moi, il dois être chez Léon ou Nathan là, un de vos potes. Il réponds pas à son téléphone ?》

Ethan me lance un regard interrogateur et rempli d'inquiétude.

《Euh... oui, il doit être là bas. Il a peut-être juste plus de batteries. Désolé du dérangement.》

Sur ce il tourne les talons et me fais signe de le suivre. Sa mère ne semblait même avoir remarqué que nos vêtements étaient trempés, et referme simplement la porte en haussant les épaules. La pluie était presque agressive, et le tonnerre grondait. Nos vêtements collaient à nos peaux et mes cheveux ne cessaient de goutter. Ethan avait raison, il n'y avait pratiquement aucune chances que nous ne tombions pas malades.

《Où est-ce qu'il peut-être ?je lui demande en empruntant la rue
- Je sais pas. C'est bien ça le problème. Et à tous les coups il a pu lui arriver quelque chose.
- Il est pas simplement à la bibliothèque, ou un endroit où il pourrait se vider l'esprit ?
- Non, il est pas comme ça Gab. 》

Il commence à courir et je le suit. Nous attrapons le premier bus qui va dans le centre.
Dans le bus, je me repose contre lui, qui pose sa tête contre la vitre. Nos masques étaient trempés, et le chauffeur avait faillit ne pas nous accepter.
Je manque de m'endormir. Nous sortons et commençons à faire tous les cafés, fast food et petit commerce dans le style que nous voyons. Pas de trace de mon petit ami. Je commence à perdre espoir à mon tour.

Et là, alors que nous nous apprêtons à faire demi tour, je perçois une ambulance au loin. Ethan et moi nous regardons, et nous nous comprenons immédiatement. Nous courrons vers le véhicule, lorsque nous vîmes le disparu étalé par terre. Il y avait beaucoup de sang autour de son crâne qui de diluait et se répendait dans l'eau de pluie sur le sol.
Nos yeux écarquillés, nous ne comprenions pas grand chose. Ma vue se trouble, et je tremble de tous mes membres. Je ne prête même plus attention à Ethan, à la pluie, à l'ambulance, à tout, et je cours vers lui.
Je répétais les mêmes mots en boucle 《qu'est-ce qu'il s'est passé ? qu'est-ce qu'il s'est passé ?》
Un ambulancier veut me pousser, mais une pompier lui dit quelque chose et il me laisse passer.
Je prend sa tête entre mes mains, il était inconscient. Mais sous ma main droite, je sent sa mâchoire se resserrer. Je commence à pleurer, sans vraiment comprendre si il était réellement en danger. Je prend sa main, et elle se resserre dans la mienne. Je constate que la blessure vient de l'arrière de son crâne. Ethan me rejoint, et caresse les cheveux du blessé. Lui aussi pleurait. Puis un pompier vient nous tenir à l'écart. Il nous indique de nous asseoir dans le camion, je ne comprenais pas vraiment ce qu'il disais. Je ne détachais pas mes yeux de mon copains. Je comprends vaguement que le pompier nous explique que nous sommes en état de choque mais que nous pourrions aider à identifier la victime. Mais victime de quoi ? Je savais à peine qu'il était encore en vie. Quelques instants plus tard, nous avions repris nos esprits. Le pompier nous avait donné du sucre et une couverture de survie pour pas qu'on ne prenne trop froid. Nous montons avec Gabin et nous dirigeons vers l'hôpital. Dans le camion, nous donnons son nom, son prénom, son âge et le numéro de sa mère. Ils nous expliquent qu'une passante l'avait vu chuter en skate à cause de sa vitesse sous la pluie et qu'elle les avait appelés, car il ne bougeait plus et qu'il avait quasi immédiatement saigné. C'était sûrement un trauma crânien. Il s'était prit le bord du trottoir en voulant le poper. Je lui tiens la main, seul membre avec lequel il arrive à serrer la mienne.

《Si je savais me maîtriser, j'aurais pu éviter ça.
- Dis pas ça. C'est moi qui n'aurais pas dû déconner à la soirée.
- C'est pas toi qui l'avais embrassé, tu ne pouvais rien faire.
- Si, lui dire que j'étais en couple.
- Euh, attends.. quoi ?
- Quand il m'a demandé si j'étais en couple, je ne sais pas ce qu'il m'a pris, j'ai pas répondu. Je lui ai demandé pourquoi il voulait savoir ça, un peu en mode séduction. Je sais pas pourquoi j'ai fait ça, j'ai jamais vraiment assumer d'être en couple avec qui que ce soit en fin de compte. J'aime me sentir plus ou moins "libre" je pense.
- T'es sérieuse là ?
- Je suppose.
- Alors pourquoi tu t'es mise avec Gabin si tu tiens tant à ta liberté ?
- C'est pas ça Ethan. Je tiens énormément à lui tu sais, j'ai juste peur de tomber amoureuse, de m'engager. Parce que s'engager c'est un peu confier sa santé mentale à quelqu'un, et à tout moment cette personne peut te la briser si elle le souhaite.
- Tu ne fais pas confiance à Gab ?
- Je ne fais confiance à personne. Mais tu sais, si j'ai réussi à faire ma première fois avec lui c'est qu'au fond je lui fais énormément confiance, j'ai juste besoin d'être détachée pour l'instant. Comme je l'ai toujours été, tu sais.
- Moi je t'aime. murmure Gabin avec peine

Je n'avais pas conscience qu'il nous entendait. Je sursaute alors. La tension dans ma main s'intensifie. J'avais dévoilé toutes ces choses que je n'aurais jamais réussi à lui dire sans le savoir. Et le pire, c'est qu'il l'acceptait. Et même, il me déclarait qu'il m'aimait.

《C'est pas grave pour le bisou.》

Je sentais qu'il avait énormément de mal à formuler une phrase. Je me lève lentement, et a la même vitesse, je m'approche de son brancard. Je regarde son visage presque inanimé. Sa mâchoire, ses sourcils. Comme la première fois que nous avions dormis ensembles après nous être mis en couple. Chaque particule de sa peau. Je dépose un baiser délicat pour ne pas lui faire mal sur ses lèvres.

《Je crois que moi aussi je t'aime Gabin.》

L'ambulancière qui surveillait son brancard, d'une vingtaine d'années a peu près, et qui était là depuis le début nous regarde tous les trois avec un petit sourire attendrie.

《Que c'est mignon.》

inspired by a dreamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant