Chapitre 3 : Le mystère du piano du foyer

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Depuis quelques semaines, Noé vivait chez Sam. Leur colocation se passait plutôt bien, basée sur un partage des tâches équitables et un mode de vie équilibré. Jamais ils ne se disputaient ou n'élevaient la voix et la présence de l'un pouvait suffire à apaiser l'autre. D'autre part, Noé continuait de travailler à l'auberge deux fois par semaine pour récolter encore quelques économies.

Un jour, alors que Sam faisait la queue au foyer pour acheter des viennoiseries pour Noé et elle, un élève s'approcha d'elle et lui chuchota :

« L'école est hantée, j'en suis persuadé !

- Pourquoi dis-tu ça ?

- Ça fait une semaine que je reste travailler tard dans la salle 24/24 sur les ordinateurs parce que je ne peux pas installer Inventor sur le mien, expliqua Jean-Baptiste. Cependant, à partir d'une certaine heure, le piano se met à jouer tout seul dans la pièce en bas.

- Comment sais-tu qu'il n'y a personne qui en joue ? s'étonna Sam.

- A chaque fois je descends les escaliers et il n'y a personne. De plus, la mélodie cesse lorsque j'arrive au milieu du foyer.

- C'est peut-être juste un plaisantin qui diffuse de la musique avec des enceintres ?

- Non, les touches du clavier bougent ! s'exclama Jean-Baptiste.

- Il y a d'autres témoins ?

- Oui, Laura. Elle était restée avec moi, la troisième fois. Et elle non plus, n'a vu personne.

- C'est étrange, en effet. Je viendrai enquêter ce soir si tu le souhaite !

- Merci beaucoup Sam ! Ça rassurerait beaucoup Laura, qui ne cesse de faire des cauchemars depuis. »

Jean-Baptiste et Laura s'étaient rencontrés aux oraux de l'ENSTIB. Depuis, ils ne s'étaient plus quittés. Ils étaient absolument toujours ensemble ! Sauf depuis quelques jours, où Laura refusait d'entrer au foyer, terrorisée par le fantôme.

Après avoir récupérer les précieuses viennoiseries, Sam rejoignit Noé sur leur banc favori où ils partagèrent leur goûter et leurs informations.

« Théodore te cherchait, indiqua Noé.

- Je sais, il voulait savoir si je pouvais l'aider à retrouver ses clefs. Je lui ai dit que Marina les avait déjà retrouvées et qu'elle les avait déposées à la Scolarité.

- T'as toujours un coup d'avance ! La félicita-t-il.

- Ce soir il nous faudra effectivement être en avance. Nous avons une nouvelle enquête : le fantôme du piano du foyer. »

Sam lui relata sa conversation avec Jean-Baptiste. Le piano avait été amené au foyer par la famille des campeurs au début de l'année. C'était un vieux piano désaccordé en bois qu'une vieille dame avait généreusement accepté de céder en échange d'une patate ... Les joies du patatroc ...

Sam se rappela que Fannie était campeuse. Elle se dépêcha de lui demander comment elle pouvait joindre leur généreuse donatrice. Un numéro de téléphone griffonné à la va-vite et un coup de téléphone plus tard, Sam revînt victorieuse vers son ami.

« D'après l'ancienne propriétaire du piano, celui-ci trainait dans son grenier depuis des années et n'avait plus était utilisé depuis la mort de son mari. Elle n'avait jamais remarqué de phénomènes anormaux, mais elle m'a avoué que ses petits enfants adoraient se cacher dans un des recoins creusés dans le piano pour en jouer depuis l'intérieur. J'ai été jeter un coup d'œil, et il y a effectivement un espace suffisant pour fournir une cachette à un enfant.

- Penses-tu qu'un étudiant d'une vingtaine d'années puisse y tenir ?

- Non, justement, c'est là que mon raisonnement vacille, reconnut Sam. Mais au moins, nous saurons où chercher et scruter cette nuit, lorsque le piano reprendra ses mélodies solitaires. »

Dès qu'elle eut la voie libre, Sam installa plusieurs petites caméras autour du piano afin d'observer tout mouvement suspect au moment venu. Ce fut à 18h18, qu'une musique s'éleva du piano, grave, sombre et menaçante. Il n'y avait aucune fausse note et la virtuosité du morceau fit hérisser les poils de Sam. De plus, les touches s'abaissaient et se relevaient mécaniquement, comme si quelqu'un en jouait réellement.

Malheureusement, personne ne s'en était approché. Mais il n'en fallait pas plus à l'enquêtrice pour expliquer la supercherie. La musique ne pouvait provenir de l'instrument lui-même puisque celui-ci était complètement désaccordé et que la mélodie était parfaite. Il était tout bonnement impossible de créer un morceau aussi beau sans un véritable instrument en état de marche.

Elle s'approcha donc du piano et l'observa sous toutes ses coutures. Elle y trouva sept minuscules enceintes qui diffusaient leur lugubre marche funèbre, et un mécanisme finement rodé qui tiraient sur les cordes afin d'abaisser les touches en rythme. Le dispositif était très ingénieux !

Elle préleva un des haut-parleurs et le mit délicatement dans un sac en plastique. Il semblait que ces modèles fonctionnaient par Bluetooth, à faible portée. Affichant un sourire victorieux, elle se dit qu'elle tiendrait son coupable le lendemain, et qu'elle n'aurait, cette fois-ci, aucune chance de se tromper.

Lorsque Noé la rejoignit quelques minutes plus tard, il s'exclama :

« On entend la musique jusqu'aux salles d'examen dans la halle. Le morceau dure exactement une minute vingt-cinq, soit quatre-vingt-cinq secondes. D'ailleurs, toutes les dix-huit secondes, il y a un accord de sol majeur qui retentit entre les notes. Je ne sais pas à quoi pourraient servir ces informations, mais j'ai essayé de relever tout ce que tu m'as demandé. Et toi ? Du nouveau ? Tu vas m'expliquer à quoi tout cela rime ?

- Un peu de patience mon cher Watson, fit la jeune fille d'un air malicieux. Rentrons chez nous, boire un bon bol de soupe. Toute la vérité éclatera prochainement. »

Black Poplar - Une Enquête ÉpineuseWhere stories live. Discover now