Foutu Menteur ! [SOUS CONTRAT D'ÉDITION ADDICTIVES]

CHAPITRE 6

♫ How I Needed You – Puggy ♫

Charlotte

13 ans plus tôt

Je n'y crois pas ! Je suis allongée sur le lit de Thomas. Moi, Charlotte Wilhems, la fille la plus banale de la Belgique, si pas de toute l'Europe, je suis littéralement dans le lit du garçon qui me fait rêver. Il se redresse sur une épaule et son regard me transperce. Je pense d'abord que c'est à cause de tout l'alcool qu'on a ingurgité et de l'herbe qu'on a fumé, mais il a l'air de plutôt bien gérer, et quand ses lèvres se posent sur les miennes, je manque de défaillir. Thomas Leroy, l'amour de ma vie depuis mes trois ans, m'offre mon tout premier baiser. C'est doux, c'est simple, c'est furtif, mais c'est là. Il se recule tout à coup et s'empare de la bouteille de tequila qu'il avait emportée avec lui, et porte le goulot à ses lèvres, celles-là même qui viennent de toucher les miennes. Je ne peux m'empêcher de le regarder, de me délecter de cette vision brute de lui, mais il me prend en flagrant délit, ce qui ne manque pas de me faire monter le rouge aux joues.

— Tu sais, Trois Pommes, tout le monde à part toi s'en tape que tu sois vierge.

— Les mecs préfèrent les filles expérimentées, reponds-je sans plus oser le regarder.

— Ca dépend lesquels.

— Tu aimes quoi, toi ?

— Non, Chacha, je ne vais pas te parler de ça, dit-il en manquant de s'étouffer avec la latte du joint qu'il vient de tirer. Tu risquerais de rougir encore plus fort, et je n'ai pas vraiment envie de ma chambre prenne feu à cause de ton auto-combustion.

Chacha ... Il ne m'avait plus appelé comme ça depuis une éternité. Depuis Valentine, sa première petite amie, en réalité. Avant ça, je venais régulièrement dans sa chambre et il m'apprenait à jouer aux jeux vidéo. J'ai été la première personne à qui il a avoué vouloir devenir acteur, et je suis certaine qu'il arrivera à réaliser son rêve. Thomas ne m'a jamais considéré comme une fille, au mieux j'étais un pote, au pire l'emmerdeuse de meilleure amie de sa sœur, mais j'ai l'impression que, malgré qu'il ne m'en dise rien, son regard sur moi à changer ce soir. Mais encore une fois, je dois songer ça à cause des nombreuses substances qui peuplent mon organisme.

— Vous faites chier, vous, les Leroy ! Entre ta sœur qui se tape un mec juste pour ne pas avouer qu'elle aime les filles, et toi qui saute tout ce qui bouge, j'ai l'impression d'être la cinquième roue du carrosse. Celle qui ne sert à rien, qui est juste là au cas où.

Thomas éclate de rire et me tend la bouteille d'alcool, que je lui arrache des mains un peu trop violemment avant de boire une longue gorgée qui me brûle la gorge.

— Tu l'as déjà dit, il y a moins de cinq minutes, se moque-t-il, et puis t'as oublié Louis qui s'est fait la surveillante, toute sa rétho !

— Madame Paulus ? hurlé-je presque.

Madame Paulus est la plus âgées de nos surveillants. La petite cinquantaine et toujours en tailleur pantalon, elle est aussi aimable qu'une porte de prison, et distribue des heures de colle à tour de bras. Il ne lui manque plus que le képi et une matraque télescopique pour qu'elle ressemble à un véritable maton ! La vision de l'ainé des Leroy et d'elle, enfermés dans les toilettes de notre école pour se bécoter m'arrache un sourire.

— Mais non, Chacha, dit-il hilare, Mademoiselle Stein, tu sais celle qui a une sacrée paire de...

Il ne termine pas sa phrase, mais mime deux énormes seins avec ses mains, et tout à coup je blêmis. Je me rallonge sur le dos, fixant le plafond, beaucoup moins joyeuse que quelques minutes plus tôt. Les yeux clos, je sens une larme solitaire s'échapper au bord de mes cils, et je la balaie discrètement avec mon pouce. A côté de moi, le matelas bouge, et quand j'ouvre enfin les yeux, Thomas est au-dessus de moi, muet. Il a ce regard qui me fait fondre à chaque fois, celui qui me fait me sentir toute petite et importante en même temps. Il fait sombre, et pourtant il illumine la pièce. Il illumine toujours l'endroit où il se trouve, d'ailleurs.