Chapitre 21

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7 Avril

Nahël offrit le cornet de glace à la fraise qu'il tenait en attendant que sa cliente sorte des toilettes, à la jeune femme qui trottinait jusqu'à lui. Elle s'appuya sur son avant-bras afin de remettre son escarpin et récupéra le dessert en s'avachissant sur le banc. Elle poussa un profond soupir et passa une main dans ses élégants cheveux couleur miel avant d'adresser un faible sourire au jeune homme. Elle faisait partie de ses réguliers et une bonne relation s'était imposée entre eux. Ou tout du moins, elle se confiait beaucoup à lui.

— Je suis fatiguée..., soupira-t-elle en goûtant la fraise du bout de sa langue.

— Tu préfères qu'on arrête maintenant ?

— Oh non ! répondit-elle avec un sourire. J'aime passer du temps avec toi. Même si tout n'est qu'illusion.

Le châtain sourit et termina son propre cornet, se délectant de la vanille qui coulait dans sa gorge. Ils discutèrent une bonne demi-heure bien que le jeune homme s'entêtait à caler l'image que la jeune femme souhaitait qu'il ait. Au moment de se quitter, elle se leva et réajusta son sac en bandoulière.

— Tu as changé, Nahël...

Il arqua un sourcil et se mordit la lèvre inférieure, se demandant ce qu'il avait pu faire de mal pour qu'elle ne soit pas satisfaite. Loin de ses préoccupations, elle continua :

— Tu sembles plus heureux.

— Ah...

Il ne savait s'il devait s'excuser ou prendre cela comme un compliment.

— Et plus sexy aussi.

Elle lui sourit de façon espiègle et il ouvrit la bouche quelques secondes avant de la refermer, s'amusant de son commentaire. D'un geste de la main, ils se saluèrent et Nahël bascula son crâne vers l'arrière, lâchant un soupir profond. Plus sexy, hein ? Plus heureux surtout... Inconsciemment, il pensa à Armand et ses doigts le démangèrent. Il mourrait d'envie de le contacter, de lui demander s'il était déjà arrivé chez ses parents et si tout allait bien, mais il se retenait. Le brun l'appellerait en tant voulu. Même si c'était une torture d'attendre.

Il quitta le banc et décida de revenir à l'agence afin de boucler sa journée. Il y avait laissé ses affaires et il se maudissait déjà de ne pas avoir de véhicule. Certes, le chemin n'était pas extrêmement long entre son lieu de travail et le domicile de son amant. Cependant, c'était harassant de se poser dans un bus et d'attendre sagement que les minutes s'égrènent jusqu'à l'arrêt souhaité.

Sur le chemin, il observa les arbres qui reprenait lentement de leur couleur, faisant naître leur bougeons qui, à la fin du mois, viendraient à éclore en de belles fleurs rosées. Il aimait le printemps parce que cette saison résonnait avec son âme. Les fleurs, les brises fraîches, le soleil, les animaux qui sortaient de leur tanière, les familles qui se réunissaient dans les parcs pour profiter des premiers rayons de soleil... Tout cela reboostait son moral et lui donnait le sourire.

Lorsqu'il arriva devant l'enseigne de Love Affair, il passa les portes avec un grand sourire, apaisé. Armand ne lui avait pas dit à quelle heure il comptait rentrer aussi voulait-il lui faire plaisir en concoctant un petit plat. Certes, il n'avait pas le talent de son petit ami, mais il avait envie que ce dernier se glisse sur sa chaise sans rien faire. Pour toutes ces fois où il s'occupait du repas, Nahël pouvait bien le soulager !

— ...uisque je vous dis que je le connais ! fit une voix qu'il reconnut instantanément. Je sais quand même à quoi ressemble mon fils.

Son sang se glaça et l'air quitta ses poumons. Pendant quelques secondes qui lui parurent durer des minutes, il cessa de respirer. En état de choc, il ne parvenait à obtenir aucune pensée. Lorsque ses yeux d'un beau vert tombèrent sur la cinquantenaire qui s'époumonait face à l'hôtesse, son corps trembla. Pas de peur puisqu'il n'avait jamais été terrifié devant sa mère, mais d'angoisse. Que faisait-elle là ? Comment l'avait-elle retrouvé ? En quittant cette maison, il avait mis un point d'honneur à disparaître de leur radar. Il était jeune et même si ses parents le traitait d'hérésie, ils auraient pu le pourchasser afin de l'enfermer dans sa chambre dans l'espoir qu'un jour, il soit tout aussi « normal » qu'eux.

Un petit-ami à louerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant