Se reprendre en main

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Je n'ai pas eu de nouvelles d'Ambre depuis bientôt 3 semaines. Maman crie à travers les étages : "Juline ! Prépare-toi, c'est l'heure de ton rendez-vous ! ". J'ai bien vu qu'elle faisait des efforts pour être plus présente, mais honnêtement, je n'ai pas la tête à ça. Je ne bouge pas de mon lit, jusqu'à ce que ma mère toque et passe la tête par l'entrebâillement.

-Juline ! C'est l'heure. Tu vas être en retard.
-Je veux pas y aller, grommelé-je.

Ma mère entre complètement dans la pièce et me demande d'un ton inquiet :

-Ça va ma chérie ? Tu m'as l'air un peu triste en ce moment. 
-...
-Tu n'as pas de problèmes à l'école au moins ?
-Mais non maman, c'est juste que je ne veux plus aller voir cette psy, elle ne me sert à rien !
-Mais, Ju, tu l'aimais tant. Tu courais presque à ton rendez-vous et tu lui parlais beaucoup je crois.

C'est moi, ou il y a de l'amertume dans la voix de ma mère ? Mais... elle est jalouse ! Elle est jalouse que je dise plus de trucs à ma psy qu'à elle. Je me lève et sers ma mère dans mes bras. Une étreinte qui me fait tellement de bien. J'ai l'impression de recevoir tout l'amour de ma mère en une seule minute. Pour la première fois depuis 3 semaines, je ne me sens pas comme la dernière des nulles mais comme une humaine, qui mérite de vivre et d'être aimée.

"Mon amour, j'aimerais vraiment que tu ailles voir ta psy."

Je sais que ma mère a raison. Je la sors un peu plus fort, puis je la relâche et me dirige vers ma paire de Converse, jetée dans un coin de ma chambre.

-Juline ! Je suis heureuse de te revoir !
- Bonjour Mme Bloirat, réponds-je poliment avant d'entrer dans son cabinet et de m'assoir dans le grand fauteuil.

Ma psy s'installe en face de moi. Il va falloir que je trouve le courage de lui dire ce qui s'est passé et je sais qu'elle ne va pas être contente. 9 mois de travail, et je n'arrive pas assumer mes sentiments.

-Je crois que j'ai un problème concernant mon orientation sexuelle.
-Ah. Il va falloir que tu m'en dises plus.

Je n'y arrive pas. Si je parle, je vais être admettre que je suis tombée amoureuse d'Ambre. Je ne comprends pas pourquoi ça me gêne. Je suis bi. Je suis bi. J'essaie de me répéter cette phrase en boucle. Je l'avais compris et accepté sans trop de problèmes. "Mais tu n'es pas sûre", persifle la voix de mon esprit. Et si j'avais tout inventé, pour avoir le droit de défendre ces gens ? Si je me forçais à ressentir des choses ? Et si, d'une certaine manière, je subissais une influence, pas mauvaise hein, mais qui fait que je ne suis pas moi ? Comment savoir si je suis bi ou hétéro ?

La fin de la séance arrive. J'ai l'impression de sortir d'un combat dur et acharné. Je ne sais pas si j'ai avancé ou reculé. Les mots ont eu du mal à sortir et je plains sincèrement la pauvre dame qui a du me comprendre. Mais je suppose que c'est son métier. Mme Bloirat me regarde fixement et me déclare : "Juline. Tu es en train de refouler ta bisexualité. Il va te falloir beaucoup d'efforts pour arriver à t'en sortir. Mais tu vas y arriver, parce que tu es une battante. J'ai confiance en toi. Je pense qu'un des points importants, serait que tu recontactes Ambre ; que tu lui expliques ce qui est en train de se produire. Tu vas avoir besoin d'aide, et une personne comme Ambre, qui peut mieux te comprendre que moi te sera utile. Tu dois accepter ta bisexualité. Tu ne dois pas avoir peur. Ce n'est pas sous le coup d'une influence que tu t'es mise à te poser des questions. Tu l'as fait, parce que tu es bisexuelle et qu'il fallait que ça arrive un jour. Il est temps que tu l'acceptes."[ndla : Je reviens, j'ai un fou rire : c'est cliché et peu réaliste. ] J'ai les larmes aux yeux. Je suis fatiguée, et tout ça est si compliqué. J'aimerais tellement accepter ça, le plus simplement du monde, mais la voix de mon esprit me dit de ne pas l'écouter, qu'elle n'y connaît rien et que je ne me posai aucune question avant de côtoyer ces gens. 

Quand je me rend compte que j'ai pensé "ces gens", je réalise que j' ai vraiment un problème. Je n'aurai jamais parlé comme ça de la communauté LGBTQ+. J'ai vraiment besoin d'aide.


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Voilà, un nouveau chapitre. Alors oui, ça se finit "trop bien". Mais bon, parfois dans la vie, les choses se passent bien et c'est pas une horreur (@_pluiesdemots_). 

Enfin bref, pour quoi est-ce que j'ai l'impression de parler d'une secte ? "la communauté LGBTQ+". 

J'arrête de dire des bêtises et bah, à plus les amis ! (et là, il faut imaginer un générique un peu stupide)

Capsuleur.


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