PDV Adèle
— T'aurais quarante-cinq centimes ?
Je levai légèrement la tête de mes pensées, avant de détourner rapidement le regard. L'auteur de la question était un jeune homme, dont le premier aperçu qu'il m'offrit, était sa paire de fesses. En effet, celui-ci était face au distributeur, tournant légèrement la tête derrière lui – vers moi donc, mais surtout, portait une blouse d'hôpital dont la magnifique fente laissait entrevoir une partie de son anatomie. Une paire de béquilles était non loin de lui, et il se soutenait légèrement au distributeur, comme assurance pour maintenir son équilibre.
Manquerait plus qu'il s'écrase sur ma face.
— C'est ce qu'il te manque pour te payer un slip ? Rétorquai-je ironiquement.
Il arqua un sourcil avant de jeter un coup d'œil en direction de ses fesses. Il eut un léger fou rire, tout en cachant ladite partie avec sa main. Dites, il ne s'est pas échappé de l'asile j'espère ?
Le laissant dans son délire, je sortis le portefeuille de mon sac à main – avec deux trois babioles supplémentaires, qui cachaient l'objet voulu. Je suis sûre que ce sac contiendrait un parapluie, un four et un Hulk.
Je lui tendis les quarante-cinq centimes et il me remercia, toujours dans son euphorie.
— J'espère que je ne participe pas à l'achat d'une contre-indication médicale, ajoutai-je.
— Non, enfin à vrai dire je n'en sais rien, mais je profite du sommeil et de l'achat d'un café de mes proches pour me balader et me faire plais', répondit-il en souriant légèrement.
Je ne répondis pas et observai l'achat de ce type étrange...qui confirme bel et bien l'adjectif que je lui attribue car il vient de s'acheter un paquet de chips à la moutarde à neuf heures trente du matin.
Il va me filer la nausée le bougre.
— Ça t'arrive souvent les petits déj à la moutarde ou... ?
— Je t'avoue que j'ignore totalement l'heure qu'il est, me répondit-il en s'asseyant – difficilement, à côté de moi avec ses chips.
— Neuf heures trente.
— Quel jour ?
— Vendredi.
— Quel mois ?
— Août, répondis-je en fronçant les sourcils, étonnée.
— Quelle année ?
— Eh bien... deux mille dix-huit. Mais pourquoi...
D'où il sort celui-là encore, j'ai l'impression d'assister à un remake des visiteurs.
Bientôt il va me sortir disparoisse et que trépasse si je faiblis avec son paquet de chips à la main.
Je me demande bien pourquoi il... Noooon, ne me dites pas qu-
— Noooon, ajoutai-je en l'observant.
— Si, répondit-il sourire aux lèvres.
— Noooon.
— Eh si.
— Tu sors tout juste d'un coma là ?
— Merci de me demander ça comme si je sortais d'un lieu aussi banal qu'une supérette. Pour répondre à ta question, oui et non, je suis réveillé depuis plusieurs semaines maintenant déjà, bien que je sois toujours aussi désorienté niveau date visiblement. Mais tu peux m'appeler Marty McFly, je viens de cette fabuleuse année qu'est deux mille dix-sept, fit-il d'une voix grave un regard au loin.
Le fixant avec des yeux grands comme des soucoupes, je plantai complètement comme si j'avais assisté à un phénomène paranormal. Il esquissa un sourire.
— Range-moi ces yeux de merlan frit s'il te plaît, j'ai juste passé un an dans un lit t'inquiète.
Tentant de reprendre une tête plus naturelle, je plissai légèrement les yeux.
— Je ne t'ai pas non plus demandé de m'observer comme si tu voulais voir à travers ma blouse, ajouta-t-il, sourire au coin, en piochant dans ses chips.
— Mais c'est mon regard naturel, rétorquai-je.
— Je ne pense pas non, sinon je ne t'aurais pas adressé la parole, te prenant pour une psychopathe. Est-ce que je peux prendre ton portable pour téléphoner ?
J'arquai un sourcil.
— T'es qui, un racketteur sauvage sans slip ?
— Mais non, j'aimerai seulement téléphoner à ma copine, répondit-il en riant. Mon numéro ne m'est plus attribué je crois, et quand bien-même il le serait, j'avoue que je ne sais pas où est passé mon portable et ça fait des lustres que tout le monde semble détourner le sujet quand j'en parle.
Je lui tendis mon portable. De toutes façons, le voler serait une très mauvaise affaire pour lui, donc je me moquais bien dans le fond de ce qu'il pouvait faire avec.
— Merci bien, je reste là au cas où tu me prennes pour un dégénéré qui souhaite voler ton portable.
— Les fesses à l'air et tenant à peine debout, je te vois mal courir en direction de la rue avec, répondis-je.
Il se mit à rire en apportant le téléphone à son oreille. Il me le rendit quelques secondes plus tard, n'ayant pas eu de réponses.
— Sûrement en train de dormir cette marmotte, ajouta-t-il. Sinon, chère personne inconnue de deux mille dix-huit, que fais-tu ici à observer ce distributeur ?
— Je viens d'aller voir ma sœur, elle a accouché cette nuit. Et là j'étais venue prendre un truc à manger, me posant un peu, loin des pleurs de sa progéniture. Je devrais d'ailleurs peut-être y retourner.
— C'est probablement moins ennuyant que de discuter avec quelqu'un qui vient du passé à moitié à poil, répondit-il toujours ce sourire scotché au visage. Je crois que leurs médocs et le fait de rester dans ce bâtiment depuis si longtemps, m'ont légèrement fait oublier certains détails, comme le fait que se balader sans slip dans un lieu public n'était pas forcément la meilleure idée.
— En effet, ajoutai-je en me levant de mon siège. Fais attention à ne pas effrayer d'autres personnes en exposant ton anatomie.
— J'y penserai, en tout cas merci pour l'argent et ton téléphone..., déclara-t-il semblant attendre de savoir mon prénom pour terminer sa phrase.
— ... Adèle.
— Adèle. Moi c'est Logan.
— Eh bien, bon retour parmi nous Logan de deux mille dix-sept. Et bon courage pour affronter ce nouveau monde, dis-je en souriant avant de m'éloigner.
— Merci ! répondit-il en me rendant un sourire.
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Les Âmes Solit/daires
RomanceSolit/daire. À une lettre près, l'âme décide de se murer ou de s'allier. Deux individus, de nombreux points et poids communs. Des maux et démons s'entremêlent. Qu'est-ce qui peut créer cette main mutuellement tendue, entre deux consciences égrati...