2. La boite de Pandore

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En y réfléchissant, je n'avais pas du tout l'intention d'y retourner. Je ne voulais pas me faire rejeter encore une fois. Et puis elle avait raison. En quoi embrasser une parfaite inconnue pourrait bien m'aider à oublier Laura ? Au mieux, ça ne pourrait que me donner envie de l'embrasser encore plus. Au pire ça accentuerait encore son absence déjà terrible. Et puis autre chose me taraudait. Est-ce que j'étais lesbienne ? Je ne m'étais jamais posée la question. Je n'avais eu des relations qu'avec des hommes jusqu'à maintenant. Je n'avais pas vraiment envie d'avoir une relation sexuelle avec Laura. En fait, je n'y avais jamais vraiment réfléchi. En revanche, sentir ses lèvres sur les miennes, la serrer dans mes bras, la couvrir de baisers, c'était le fantasme qui me hantait depuis des semaines, des mois, peut-être plus.

Et puis ce jour là, Laura m'a appelée. Elle m'a proposé un café, et comme d'habitude je n'ai pas pu refuser. Ça faisait près de dix jours que je ne l'avais pas vue. Elle me l'a reproché d'ailleurs. Mais en voyant son sourire pétillant, ses grands yeux verts, ses longues mains douces, je me fichais bien de ses reproches. Ils étaient presque comme des caresses. D'ailleurs si elle me reprochait mon absence, c'est que je lui manquais un peu, n'est-ce pas ? J'étais heureuse comme toujours de passer du temps avec elle et j'ai dû résister pour ne pas prendre sa main. J'ai dû lutter pour ne pas fixer sa bouche obstinément. J'ai dû me détourner un peu lorsque j'ai imaginé la douceur de ses lèvres sous les miennes. Ça faisait longtemps que j'avais appris à jouer ce jeu. Je savais qu'elle ne pouvait pas s'apercevoir de mon trouble, ni du mélange de bonheur et de souffrance que provoquait sa simple proximité.

Mais en la quittant ce soir là, un mélange de lassitude et d'abattement m'a envahie. Elle ne serait jamais à moi. Pas même une miette. Pas elle. Mais quelqu'un d'autre, peut-être ... alors je suis retournée dans la forêt. Elle m'attendait.

- T'es en retard.

Le tutoiement m'a surprise.

- Oui, j'avais un rendez-vous.

Elle m'a regardée avec un sourire en coin.

- Avec elle ?

J'ai hésité, et légèrement rougit avant de murmurer.

- ... Oui.
- T'es vraiment accro hein ?
- Oui.
- Tu sais dire que oui ce soir ?
- Tu as décidé ?
- Oui.
- Oui tu as décidé ou oui tu acceptes ?
- Les deux.

Je l'ai fixée, incrédule. Je pensais devoir batailler un peu plus pour la convaincre.

- Et ton couplet sur l'éthique et tout le blabla ?
- Écoute je sais pas pourquoi mais je te fais confiance, et tu me fais de la peine. Alors décide toi avant que je change d'avis.
- Oui je veux bien sûr !
- Ça sera 50€.
- Ah ok, tu veux que je paye d'avance ?
- Oui.
- A combien de temps j'ai droit avec ça ?
- 30 minutes.
- On peut aller dans ma voiture ?

Je me suis sentie très nerveuse d'un seul coup. Et si ça ne me plaisait pas ? Et si ça me dégoûtait même ? Et si ? Je n'étais plus si sûre que ce soit une bonne idée. Mais elle m'a prise par la main et entraînée vers la voiture. C'est vrai qu'il fallait bien qu'elle gagne sa vie, elle. Je lui ai ouvert la portière arrière. Nous serions mieux sur la banquette. J'ai tiré les pares-soleil pour créer un ambiance un peu plus intime, si tant est que la situation puisse l'être. J'évitais au maximum de penser à ce que ça pouvait avoir de glauque ou désespéré. J'ai sorti un billet de 50€ de mon sac et lui ai tendu. Elle l'a rangé rapidement.

- Alors ? Qu'est-ce que tu veux ? Décris-moi exactement ce que tu veux faire et ce que tu veux que je te fasse.
- Je voudrais juste t'embrasser.
- Oui ça j'ai compris. Écoute je sais que ça doit être assez embarrassant mais plus tu seras précise et plus il y a des chances que tu apprécies alors il vaut mieux prendre ces cinq minutes embarrassantes et ensuite... On improvisera.

Murmurer ton nomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant