5. Une soirée pyjama

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Pourtant il ne m'a pas fallu très longtemps cette fois pour rappeler Violette. De manière assez inquiétante, je n'avais même plus besoin de voir Laura pour sentir régulièrement le besoin de retrouver son corps accueillant. Le corps de Violette bien sûr, puisque Laura... ma Laura, mon amour ... tout était assez confus dans mon esprit. Une seule idée surnageait systématiquement dès que mon désir prenait forme : je dois voir Violette.

Nous avons donc réitéré régulièrement ces séances d'une heure ou deux, sans jamais toutefois aller aussi loin que le premier soir. Jusqu'au jour où je me suis avouée que cela ne me suffisait plus. Je ne savais toujours pas bien ce que je voulais mais ces étreintes éphémères ne calmaient plus les vides béants de mon âme. Il me semblait que j'avais besoin de sa présence encore plus que ses caresses. C'est pourquoi en passant mon coup de fil ce jour-là, je me suis sentie étrangement gauche.

- Bonjour, c'est Anna.
- Je sais, ton numéro est enregistré.
- Ah. Euh, très bien. Et bien ... euh...je voudrais te voir.
- Bien sur, on fait comme d'habitude ?
- Oui ...euh non, en fait je voudrais passer la nuit avec toi.
- Tu veux dire TOUTE la nuit ? Vraiment ?
- Oui. Mais je ne veux pas ... sauter le pas. Je veux juste dormir près de toi.
- Oh ... une espèce de soirée pyjama alors ?
- Oui ... mais sans pyjama ...
- Attends, tu veux qu'on dorme ensemble, nues mais sans se toucher ? C'est bien ça ?
- Sans se toucher peut-être pas, mais sans descendre sous la taille. Enfin tu comprends l'idée quoi ....
- Mouais, et ... euh... excuse moi mais tu penses pouvoir ... te retenir ?
- Eh ! Je ne suis pas la vilaine perverse que tu imagines.
- Tu oublies que je t'ai vue à l'œuvre ... mais si tu es sûre de toi, d'accord. Passe me prendre demain soir.
- Merci, à demain.

J'aurais aimé que mon cœur batte un peu moins vite en pensant à la nuit que nous allions passer ensemble. Pour calmer mon émotion pendant le trajet, je lui ai rappelé que nous n'avions pas discuté du prix de cette prestation un peu spéciale. Nous avons réglé ce sujet épineux, avec un supplément prévu en cas de « non-résistance à personne allongée », comme elle l'a appelé.

Mais j'étais décidée à rester prudente, et à ne pas me laisser emporter. Je voulais juste sentir son corps chaud et accueillant en m'endormant et à mon réveil. Je pouvais me contenter de cela.

En arrivant dans la chambre, un feu accueillant nous attendait, et pour la première fois une table était dressée pour le dîner. Elle avait vraiment pensé à tout. Nous nous sommes installées dans les fauteuils qui faisaient face à la cheminée pour se réchauffer. Les nuits devenaient vraiment fraîches en cette fin d'automne. Et nous avions tout notre temps cette fois. Nous avons dîné en discutant et j'ai pu de nouveau apprécier toute l'ampleur de la culture de Violette. Elle avait beau essayer de la cacher sous un vernis banlieusard quand elle arpentait son coin de forêt, mais ici, seule avec moi, je voyais bien que ses manières et ses connaissances étaient très inhabituelles pour une personne de sa condition. En particulier, elle semblait connaître et aimer la Russie, mais aussi la musique et l'art en général.

Comme je suis pianiste à mes heures, nous avons longuement parlé de musique classique et de nos compositeurs préférés. J'ai un faible pour Chopin et les romantiques depuis toujours. Elle avait un goût plus éclectique, qui allait de la musique baroque aux compositeurs contemporains.

Après le dîner, nous nous sommes installées sur le lit, je l'ai prise dans mes bras et j'ai lu un livre pendant qu'elle pianotait sur son téléphone.

Lorsque j'ai senti la fatigue me gagner, je suis allée prendre une douche et me préparer pour dormir. Elle a pris la suite dans la salle de bain. Je me suis glissée sous les couvertures pour l'attendre, emmitouflée dans mon peignoir. Mon cœur battait la chamade lorsqu'elle est revenue dans la chambre, elle aussi simplement couverte d'un peignoir. Je lui ai ouvert les draps, pour qu'elle s'y glisse. Nous étions toutes les deux inexplicablement intimidées.

Murmurer ton nomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant