Un drôle d'individu

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Un jour où la princesse s'ennuyait, elle guettait, songeuse, assise dans l'herbe, à l'orée d'un long chemin, l'arrivée des guerriers. Ils venaient se réunir tout les trois jours au minimum auprès de leurs chefs, et accessoirement, lui rendre visite à elle. Quand elle les vit enfin sur le chemin se rapprocher, au lieu d'avoir hâte de les rencontrer, cette fois-ci elle en avait déjà marre, c'était chaque fois la même chose, chacun la couvrait de flatteries, chacun lui racontait ses exploits, ses aventures mais quand elle se mettait à parler, personne ne l'écoutait. Elle faisait sans arrêt face à des absences de réactions ou des absences de réponses quand on ne lui coupait pas la parole. Et elle en avait plus qu'assez de les écouter eux, toujours et toujours parler d'eux et qu'ils ne s'intéressent à elle que pour: "ses beaux cheveux", "ses beaux yeux", et le reste, dont ils ne disaient rien mais n'en pensaient pas moins... Alors, Aliénor se leva avant leur arrivé et retourna dans le village des chefs, ce village qu'elle connaissait si bien, ce village qu'elle arpentait déjà depuis toute petite, ce village qui était plutôt grand et plutôt beau pour l'époque, mais dont elle rêvait tant de s'échapper. Parfois la jeune princesse rêvait d'aller voir plus loin dans la forêt, de découvrir les animaux qui s'y cachaient, de voir les maisons des paysans, de voir d'autres personnes, de voir d'autres fleurs... Elle se demandait souvent à quel point le monde était grand et à quel point il pouvait compter de villages différents. Alors qu'elle était plongée au plus profond de ses pensées, au beau milieu de l'avenue de la maison royale, Aliénor sentit tout à coup un regard posé sur elle. Elle avait pourtant l'habitude d'être regardé mais là il y avait quelque chose de différent, elle mit alors quelques secondes à se rendre compte que c'était un homme, pas très grand, avec un casque lui dissimulant le visage, qui la fixait debout, sans bouger. Il se pensait peut-être caché, à moitié derrière un mur mais il ne passait pas du tout inaperçu avec son drôle de casque sur la tête. La princesse regarda alors ce mystérieux individu pendant quelques instants puis il parut soudain avoir un sursaut en se rendant compte qu'on le voyait. Il s'éclipsa si vite qu'Aliénor n'eu même pas le temps de voir dans quelle direction il était parti. Qui était-ce ? Il ressemblait à un chevalier pourtant elle ne l'avait jamais vu auparavant, et que faisait-il avec cet étrange casque rouillé sur la tête, même si c'était un combattant il n'y avait pas lieu de porter un casque à cet endroit. La jeune princesse restait immobile au milieu du village, sidérée par la rapidité avec laquelle cet inconnu l'avait semé. Un peu intriguée, la princesse repartit en direction des autres guerriers, peut être les avaient-ils rejoint ? Se dit-elle, il se passait tellement peu de choses ici, elle voulait découvrir qui il était. En arrivant à l'entrée du village, elle les vit tous. Ils étaient agglutinés autour de quelque chose mais la princesse ne comprit pas tout de suite ce que c'était. Aliénor s'approcha, elle entendait des rires mais ne comprenait pas ce qui se disait, alors elle s'approcha encore tout en faisant attention de ne pas être vu, et là, elle vit le mystèrieux individu qui l'espionnait la minute précédente encerclé par tout les autres chevaliers. Elle pensa au début que ce fut quelque chose d'amical mais elle comprit vite que non, dès que l'inconnu essayait de bouger il se faisait bousculer de sorte à ce qu'il reste au centre du cercle formé par les autres, un grand chevalier lui faisait face :
-Qu'est ce que tu fous là ? Tu sais bien que t'as pas le droit d'être ici, tu fais honte à notre titre ! C'est pour voir la princesse hein ? (rire) Quelqu'un comme toi n'a même pas le droit de regarder une princesse, dit le chevalier de la façon la plus méprisante qui soit.
-...
-Tu peux pas parler ? Ah ! Mais attends c'est ce vieux casque qui t'en empêche, je vais t'aider... Le grand chevalier attrapa violemment le casque de l'inconnu et d'autres lui coincèrent les bras, il le lui extirpa alors brutalement de la tête et le jeta par terre.
-Arrête ! Rend le moi ! Criait-il pendant que le chevalier écrasait le casque rouillé à grand coup de pied. Aliénor était scandalisée par ce qui se passait sous ses yeux mais elle ne pouvait s'empêcher de dévisager celui qui l'avait surpri il y avait quelques instants, maintenant qu'il n'avait plus son casque. Il était beaucoup plus jeune que les autres chevaliers, il était peut être même plus jeune qu'elle, il avait des cheveux blonds plutôt foncé, mal coiffés, une peau un peu plus bronzé que d'autres, elle le trouva unique en son genre dès le premier regard. Le grand chevalier finit par briser le casque en morceaux, une fois relâché le jeune inconnu se précipita sur les débris du casque et les ramassa, il se fit violament poussé par terre mais il se releva et fuit aussi vite qu'il put. Aliénor avait assisté à toute la scène. À présent les chevaliers se dirigeaient vers la maison royale, la deumeure d'Aliénor, là où elle passait le plus clair de son temps quand elle n'était pas dehors. Probablement venaient-ils pour lui raconter comment ils l'avaient héroïquement protégé d'un individu louche... Mais la princesse n'était plus là, elle s'était déjà faite semer une fois, elle ne s'y reprendrait pas. Le jeune-homme, était parti à toute vitesse, des débris rouillés lui tombant des bras, il plongea dans le village, zigzagant entre les maisons, bousculant les marchands. Il ressortit du village aussi vite qu'il y était rentré, il sauta au dessus d'un petit ruisseau qui bordait les environs, courra encore quelques mètres et s'enfonça dans la grande forêt. Aliénor s'arrêta là, elle l'avait suivi durant toute sa course folle, elle avait même enjambé le ruisseau, mais elle se tenait à présent devant l'immense forêt. La princesse le vit encore pendant quelques secondes courir au dedans avant qu'il ne soit totalement englouti dans la profondeur de ces bois. Aliénor avait échoué, elle s'était finalement encore faite semer, et sûrement une bonne fois pour toute se dit-elle cette fois. Désespérée de son manque de courage, elle se laissa tomber dans l'herbe et contempla les grands arbres qui lui faisaient face, des sapins à n'en plus finir,des sapins tellement hauts que même les bûcherons les plus aguerris n'y viendraient pas à bout. Comment aurait-elle pu ? Il lui était interdit de quitter le village, encore plus de s'aventurer toute seule dans la forêt... Mais au delà de ça, le fait est qu'elle avait peur, elle ne pouvait se résoudre à mettre un pied dans cette forêt.

La légende de la ChevalièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant